Cet article fait partie de la série "Perspective", qui regroupe des contributions externes. Le texte suivant a été rédigé par Rory Bateman, responsable de la gestion actions européennes de Schroders.
Une conjoncture macroéconomique favorable en Europe
La zone euro a renoué avec la croissance sur deux trimestres consécutifs. De plus, les économies de la périphérie en difficultés montrent des signes d’embellie. Les progrès devraient être lents, mais l’économie s’est stabilisée et les indicateurs avancés semblent suggérer un redressement.
Nous sommes encouragés par la convergence des coûts unitaires de la main d’oeuvre au sein de la zone euro, ceux de l’Espagne et du Portugal se rapprochant de leurs homologues allemands. Les coûts d’emprunt commencent également à converger. Les entreprises basées dans la périphérie de l’Europe empruntent toujours à des coûts plus élevés que leurs homologues allemandes, mais l’écart tend à se resserrer.
Côté négatif, les taux de chômage demeurent à des niveaux considérablement élevés dans certaines parties de la zone euro. Selon nos prévisions, le gouvernement allemand, une fois la coalition formée, fera preuve de proactivité dans sa lutte contre le chômage des jeunes, dont le taux est particulièrement élevé dans certains pays tels que la Grèce et l’Espagne.
Le retrait progressif des injections de liquidités par la Fed aura un impact limité sur l’Europe
L’un des principaux risques auxquels l’économie mondiale sera confrontée en 2014 sera le retrait progressif du programme d’assouplissement quantitatif de la Réserve fédérale américaine.
L’Europe ne devrait pas être affectée par cette mesure. La réduction des rachats d’actifs devrait se traduire par une appréciation du dollar américain ainsi qu’une baisse relative de l’euro, ce qui devrait jouer en faveur des exportateurs européens. À l’inverse, les marchés émergents devraient essuyer l’impact négatif du retrait progressif, de l’appréciation du billet vert et d’une inversion des mouvements de capitaux internationaux en quête de rendement.
La politique monétaire demeure accommodante en Europe et la Banque centrale européenne (BCE) a démontré qu’elle était prête à agir avec détermination. Un niveau d’inflation inférieur aux attentes a récemment contraint la BCE à abaisser ses taux directeurs, mais il ne s’agit pas de la seule corde à son arc.
Nous constatons que, contrairement aux autres banques centrales, la BCE n’a pas utilisé tous les instruments dont elle dispose pour atténuer les risques d’une croissance fragile et d’une inflation faible.
L’examen de la qualité des actifs (AQR) devrait montrer que le secteur bancaire européen est investissable
Le risque d’une crise bancaire systémique en Europe a presque disparu. Les banques régionales ont réduit les risques de leurs bilans et ont émis des actions. Le secteur est bien placé pour atteindre un ratio de fonds propres durs (Core Tier 1) de 10 % d’ici la fin 2013, bien avant la date limite imposée par le régulateur.
La BCE effectuera son AQR en 2014. Certaines banques devraient avoir besoin de fonds propres supplémentaires, mais l’exercice devrait permettre de rétablir la confiance et montrer que les banques européennes ne présentent plus de risque systémique.
Les banques espagnoles éprouvent des difficultés liées à leur exposition aux prêts accordés aux promoteurs immobiliers, tandis que les banques italiennes sont confrontées à une incertitude autour des prêts irrécouvrables. Toutefois, 80 % des banques en termes de capitalisation boursière se trouvent hors de la périphérie.
Les banques ne retrouveront pas le taux de rentabilité des capitaux propres « ROE » de 25 % atteint avant la crise financière, mais un taux de 15 % est tout à fait plausible. Les banques européennes se négociant à environ 0,7 fois leur valeur comptable, il s’agit d’une opportunité de valorisation très intéressante.
Une prime de risque toujours élevée, mais en baisse
Récemment, les actions européennes ont bénéficié d’un rebond des valorisations. Toutefois, ces gains s’expliquent en grande partie par la baisse de la prime de risque des actions européennes qui avait atteint des niveaux record, la perspective d’un éclatement de la zone euro s’étant dissipée. La prime de risque reste au-dessus de sa moyenne historique et le retour à la normale devrait donner lieu à de nouvelles hausses. Par ailleurs, les actions européennes demeurent attractives au regard de leur propre historique et en comparaison avec leurs homologues asiatiques et américaines.
La hausse des bénéfices des entreprises devrait également jouer en faveur des actions européennes. Les résultats des entreprises européennes demeurent inférieurs de 30 % à leur plus haut historique. À l’inverse, ceux des sociétés américaines ont déjà battu leur précédent record. Les marges de progression des bénéfices des entreprises européennes devraient être importantes en 2014 grâce au retour de la croissance et à la reprise de l’activité. Le potentiel de hausse des marges bénéficiaires demeure important en Europe.
La sélection de titres est déterminante
Les craintes autour d’un éclatement de la zone euro ont incité les investisseurs à privilégier une exposition à une croissance mondiale de qualité acquise par le biais de secteurs comme l’alimentation et les boissons. Cependant, avec l’amélioration de la conjoncture économique, ces secteurs défensifs sont devenus plus coûteux et les opportunités sont devenues plus nombreuses sur les titres « Value ».
Du fait de la hausse de la consommation des ménages, le secteur des biens cycliques présente un intérêt particulier. Les entreprises de ce secteur devraient, selon nous, voir leurs bénéfices augmenter dans les 18 prochains mois. Au plan régional, le DAX a atteint des plus hauts historiques, mais la situation est loin d’être identique au sein de la périphérie. L’IBEX 35 espagnol et le FTSE MIB italien se situent bien en deçà des sommets atteints en 2007 et les cours des entreprises cotées sur ces marchés sont très attrayants.
Au point le plus bas de la crise de la dette de la zone euro en 2011/2012, le type de placements que vous déteniez en Europe n’avait pas d’importance : les actions ont été vendues sans discernement.
Cette tendance s’est à présent estompée. Les corrélations sont désormais bien plus proches des niveaux normaux et devraient encore baisser davantage, à la faveur de la stabilisation de la zone euro et du retour de la croissance. Nous pensons que la priorité est de comprendre les différentes nuances entre pays européens plutôt que de cibler un pays ou un secteur en particulier. Le marché européen sera incontournable en 2014 pour les investisseurs en actions.