La correction récente des marchés offre-t-elle un point d’entrée ? Oui si l’on lit la recherche de plusieurs courtiers. Pour la plupart d’entre eux, au-delà de la volatilité provoquée par le dossier grec, les marchés n’ont guère de raison de paniquer sur le moyen terme, car les fondamentaux de la zone euro s’améliorent et ceux des entreprises européennes sont solides.
Beaucoup rappellent en outre qu’à la différence du dernier épisode de forte volatilité sur les marchés (octobre 2014), la BCE a mis en place son « QE » depuis mars dernier et dispose d’outils pour arrêter tout mouvement de panique (elle peut aussi en créer, en particulier si elle décide de retirer son soutien aux banques grecques).
Tout ceci peut rassurer. Mais il ne faut pas oublier que les conséquences d’un événement systémique (pensez à Lehman) sont généralement minorées et mal évaluées par les investisseurs.
En dépit de ce risque, plusieurs éléments semblent indiquer que ce n’est pas encore le moment pour accroître son exposition aux actions européennes.
Tout d’abord, si l’on compare l’épisode actuel avec celui d’octobre, on est encore loin d’une « capitulation ». L’indice MSCI World est 13% au-dessus du niveau d’octobre 2014, alors que dans l’ensemble, l’économie mondiale va un peu mieux, mais guère mieux. En dehors de la Grèce, les rendements obligataires périphériques sont encore en-deçà de leurs niveaux d’octobre, tandis que le Bund offre un rendement de 0,8%, équivalent à peu de choses près à ce qu’il offrait il y a neuf mois.
Seul le VSTOXX s’est rapproché de ses niveaux d’octobre dernier (30,65 contre 31,52), mais la VIX est lui encore bien en-deçà de ses niveaux passés (18,85 contre 25,20). L’aversion au risque est bien remontée en Europe, mais elle ne s’est pas diffusée aux autres places, en particulier à Wall Street (jusqu’ici).
Ensuite, en termes de stricte valorisation, les actions européennes n’offrent pas une décote synonyme d’une marge de sûreté suffisante pour protéger les investisseurs. En octobre dernier, le ratio cours sur juste valeur sur l’ensemble des titres couverts en Europe par les analystes Morningstar était de 0,89, alors qu’il est actuellement de 0,97.
Source: Morningstar.
Au niveau de l’indice Stoxx 600, le P/E à 12 mois est passé de 12,9x à 16,1x, pour une croissance des résultats attendue cette année à 8,7% (+6,3% prévus en octobre). Autrement dit, le marché a déjà largement intégré un rebond des résultats qui ne se matérialise que lentement. A un tel niveau de valorisation, supérieur à la moyenne historique, il nous semble que le risque pour les investisseurs en actions est celui d’une poursuite de la correction que d’un rebond à court terme.
Qu’est-ce qui pourrait contrarier ce scénario ? Tout simplement, la BCE qui dispose d’une arme ultime : sa parole ainsi qu’une panoplie d’outils d’intervention. Il n’est pas impossible que certains intervenants de marché testent cette capacité et que les marchés corrigent à court terme.
Pour les investisseurs patients, ce sera alors l’occasion de chercher des titres bon marché qui disposent d’un avantage concurrentiel élevé.