Pour les représentants du BlackRock Investment Institue, filiale du gérant d’actifs BlackRock, les marchés financiers vont connaître une situation inédite entre d’un côté des politiques monétaires divergentes et la nécessité de retrouver une croissance réelle de l’économie mondiale pour permettre de soutenir la valorisation déjà élevée de nombreuses classes d’actifs.
Jean Boivin, stratégiste au sein du BII, a estimé mercredi au cours d’une conférence de presse à Paris que la Fed relèvera son taux directeur de 25 points de base la semaine prochaine, puis qu’elle procèdera à au moins 2 autres hausses de taux courant 2016.
Elle pourra aller jusqu’à 4 hausses de taux mais le mouvement sera très progressif pour éviter à tout de revivre comme en 2013 une vive tension sur les taux longs qui avait menacé de casser la vigueur de la reprise économique aux Etats-Unis et avait créé un regain de volatilité sur les marchés financiers.
Si elle relève effectivement ses taux directeurs, la Fed devrait donc poursuivre une politique monétaire accommodante pendant « un certain temps ». Cette hausse des taux alimentera également une poursuite de la hausse du dollar, mais celle-ci sera mesurée et pourrait connaître des revirements dans le courant de l’année.
Le BII s’attend en outre à ce que la Chine connaisse un ralentissement maîtrisé de sa croissance (« soft landing »), mais reconnaît que le changement de modèle de la deuxième économie mondiale aura un impact non négligeable sur de nombreux pays émergents, obligeant ces derniers à faire évoluer leur propre modèle.
Dans ce contexte, des stratégies directionnelles de certains investisseurs qui ont mis en place tout au long de 2015 des paris baissiers sur les émergents et les matières premières pourraient se retourner contre eux en 2016.
Une autre source de surprise pourrait être l’inflation, appelé à croître au fur et à mesure que les effets de base liés à l’évolution des matières premières et des devises de l’année passée se seront écoulés. « Les anticipations d’inflation sont très basses. Actuellement, les marchés pensent que la Fed va rater sa cible d’inflation de 2% de 60 points de base pendant les 30 prochaines années, ce qui nous semble excessif », a souligné Jean Boivin.
« Une telle perspective n’est envisageable que dans le cas d’un scénario de déflation durable et généralisée auquel nous ne croyons pas », a-t-il ajouté.
Le défi le plus important pour l’économie mondiale est que la normalisation de la politique de la Fed s’accompagne d’une reprise du crédit au secteur privé. Des signaux se font sentir aux Etats-Unis et en Europe, mais compte tenu d’un endettement encore significatif et d’une nette préférence des agents économiques pour l’épargne plutôt que pour l’investissement ou la consommation, les autorités monétaires ne pourront resserrer leur stimulus monétaire que de façon très graduelle.
En termes d’allocation, le BII n’est pas très éloigné du consensus, en privilégiant les actions européennes et japonaises, et dans l’univers des taux et du crédit les obligations indexées, la dette émergente en devise dure (dollars) ainsi que les actifs réels, qui offrent un rendement attrayant et un moyen de diversifier le risque d’un portefeuille.