Le « Brexit » a-t-il fait « pschitt » ? Ou bien les marchés sont-ils trop complaisants ? Alors que les indices boursiers européens semblaient entrer dans une phase de correction importante entre les séances de vendredi dernier et de lundi, ils ont depuis repris une partie du terrain perdu.
La performance la plus étonnante vient des actions britanniques elles-mêmes, puisque depuis le 23 juin, l’indice FTSE 100 affiche un gain de 6% quand l’indice Euro Stoxx gagne 2,2%. Le S&P 500 engrange une hausse de 3% (en dollars).
Les investisseurs sont-ils devenus complaisants ? C’est possible. Car le « Brexit » aura bien des conséquences d’ordre économique pour l’Europe (perte de 0,5% de croissance selon certaines estimations – ce qui vu le niveau de la croissance n’est pas négligeable). Mais l’impact du Royaume-Uni sur les échanges internationaux et la croissance mondiale est à relativiser.
Pour plusieurs observateurs, il s’agit avant tout d’un événement politique et le risque de contagion systémique semble sous contrôle. Les banques centrales veillent au grain (achats d'obligations gouvernementales et maintenant d'obligations privées). Les marchés ne semblent pas paniquer. Les indicateurs de volatilité (VIX, VSTOXX) se sont fortement détendus, sans avoir même atteint les niveaux observés lors des deux précédentes phases de correction sur les marchés financiers (août 2015 et janvier 2016).
L’or s’est apprécié de 15% en un mois (et de 33% depuis le début de l’année), mais il semble que l’intérêt pour le métal jaune soit plus lié à des risques potentiellement plus significatifs (récession aux Etats-Unis, « hard landing » en Chine) qu’au seul Brexit.
Il semble que les investisseurs n’intégreront réellement les implications du Brexit que si d’autres pays de l’Union européenne manifestaient eux aussi leur souhait de partir. Le mouvement de « désintégration » européenne, pronostiqué par de grands gérants de hedge funds comme George Soros, serait lui de nature à provoquer un mouvement durable de repli des actifs risqués.
Aussi, au regard de l’évolution récente des marchés, y a-t-il une opportunité de s’exposer aux actifs risqués en Europe ?
Depuis l’annonce du Brexit, les prévisions de résultats au niveau de l’indice Stoxx Europe 100 ont été réduites de 1,4%. Depuis le début de l’année, le mouvement de révision en baisse atteint 6,2%. Les analystes ne tablent plus que sur une progression de 1,7% des profits en Europe cette année et de 14% l’an prochain.
Les actions européennes se traitent sur un multiple de 14,7x, contre une moyenne historique de 12,8x (depuis 2002). Un niveau de valorisation pas excessif, certes, mais insuffisant pour justifier un retour important. Prudence donc de ce côté.
Cela fait cinq ans que les entreprises européennes déçoivent sur le front des résultats, en dépit de l’amélioration relative de l’environnement économique ou d’éléments favorables comme le repli de l’euro ou la baisse du coût de financement.
On comprend pourquoi les investisseurs témoignent d’une certaine fatigue à l’égard des actions européennes, qui, sur le front de la gestion collective, subissent un mouvement de décollecte continu depuis plusieurs mois comme le montrent les données de Morningstar.
Si les actions européennes sont moins intéressantes, y compris au niveau de leur valorisation, où regarder ? Nombreux sont ceux qui pointent vers le crédit, qui a le grand avantage de bénéficier des mesures de soutien de la Banque centrale européenne et de son programme d’achats d’actifs, et où les spreads se sont récemment écartés (sans toutefois atteindre des niveaux de stress excessif).
C’est sans doute une option à considérer, pour peu qu’elle corresponde aux objectifs financiers des investisseurs. Mais là encore, il faut se montrer sélectif et privilégier en priorité les actifs ou gérants de qualité, parmi les mieux notés par Morningstar.
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