Nous conduisons une opération de maintenance sur notre outil de gestion de portefeuille. Nous espérons une résolution dans les plus brefs délais. Merci de bien vouloir patienter.

Le retour du risque politique

Le continent européen, encore secoué par le résultat du référendum britannique, devra faire face à différentes échéances politiques qui pourraient nuire à la stabilité des marchés. Voici les variables à surveiller.

Valerio Baselli 19.10.2016
Facebook Twitter LinkedIn

Un spectre hante l'Europe : la possibilité, de plus en plus concrète, que l'incertitude politique pourrait déstabiliser la faible reprise économique et causer une forte volatilité sur les marchés boursiers. Le Vieux continent, en fait, connait une phase troublée et les prochains rendez-vous aux urnes pourraient mettre à nu la fragilité du système.

Les investisseurs en sont conscients. Les fonds et les ETF dédiés aux actions européennes ont enregistré entre juillet et septembre une décollecte nette d’environ 22 milliards d'euros, en dépit de la reprise du marché qui a suivi les baisses marquées immédiatement après le vote sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Au cours de la même période, l'indice Morningstar Europe de NR a bondi de 24,7% et tous les principaux marchés domestiques du Vieux continent ont affiché des performances positives.

Au commencement était le Brexit

Tout a commencé depuis le résultat, inattendu, du référendum britannique. Pas tellement pour les conséquences à court terme (en dehors de la chute de la livre, à près de quatre mois du vote, on peut dire qu'il n'y a pas eu de tremblement de terre sur les marchés, en particulier grâce à l'action de la Banque centrale européenne), mais plutôt sur les possibilités que cette décision ouvre à moyen et long terme.

Sur les marchés de la zone euro, en fait, le Brexit ne devrait pas avoir des conséquences importantes, « presque nulles » d’après une analyse de Goldman Sachs. Et même sur la Bourse de Londres, les effets seront limités étant donné que 70% des bénéfices des sociétés composant l’indice FTSE 100 proviennent de l'étranger. Les problèmes seront plutôt plus graves pour l'économie britannique, mais pas tout de suite, probablement au cours de l'année prochaine, après que la procédure de sortie (le fameux article 50) sera officiellement déclenchée.

L’Italie fait peur

Les craintes liées au Brexit, donc, sont fortement en retrait. C’est peut-être pour cette raison que maintenant les peurs se tournent vers un autre référendum, de type constitutionnel, qui se tiendra le 4 décembre en Italie, un pays historiquement beaucoup plus fragile que le Royaume-Uni et qui pourrait être affecté par un résultat négatif.

« Si le ‘non’ l’emportait, cela risquerait d'ouvrir une période d'instabilité politique et les marchés pourraient aussi envisager la possibilité extrême que l’Italie quitte l’UE », estiment les gérants de Legg Mason. « Le spread des obligations du gouvernement italien est soutenu par la politique de la Banque centrale européenne ; nous sommes prêts à augmenter notre exposition si les écarts devaient s'élargir davantage, mais le risque représenté par le résultat du référendum suggère une gestion prudente et tactique ».

Les analystes de BNP Paribas sont d’un même avis : « la victoire du ‘non’ serait négative pour les marchés, car elle entraînerait de sérieux doutes sur le long processus de réforme en Italie et affaiblirait le gouvernement, ce qui se transformerait en forte volatilité sur les marché ».

L’arrivée de Matteo Renzi à la tête du gouvernement avait été bien accueillie par les marchés, de sorte que l'on parlait à l'époque de « lune de miel » entre les investisseurs et le Premier ministre italien.

Mais après les attentes doivent suivre les faits. Si la voie des réformes devait subir un net ralentissement, les choses pourraient changer rapidement. L’incertitude du vote a déjà commencé à faire bouger les lignes. Les analystes de BNP n’attendent pas d’élections anticipées, même en cas de démission de Matteo Renzi.

Francexit, énigme Merkel et chaos Espagne

L’Italie n’est pas la seule cause d’inquiétude. Au cours des 12 prochains mois, plusieurs pays européens seront invités à voter. La partie se joue principalement en France (avril 2017) et en Allemagne (octobre 2017), pays au cœur de la zone euro, où la possibilité le changement est réelle et où il y a eu une percée significative des partis populistes et eurosceptiques.

Tous les yeux seront rivés en particulier sur Paris, où le Front national est en tête dans tous les sondages comme premier parti du pays. Marine Le Pen est donnée gagnante au premier tour, mais perdante au second, indépendamment de qui sera son adversaire (difficilement contre l'actuel président François Hollande, défini comme étant le plus impopulaire de l'histoire).

Si elle gagnait, Marine Le Pen a déjà promis d'organiser un référendum sur la permanence de la France dans l’UE, et à ce moment la désintégration de l'Union pourrait devenir une possibilité, en tenant compte du poids de l’Hexagone dans la région et de l'issue très incertaine d'un tel vote.

Même de l'autre côté du Rhin les idées anti-immigration et contre l'Europe sont de plus en plus populaires, avec le jeune parti d'extrême droite AfD qui gagne des points dans les sondages, même s’il semble impossible d’envisager son arrivée au pouvoir l'année prochaine.

« En Allemagne, il existe un très faible risque de voir la victoire d'un parti extrémiste », a estimé dans un rapport Azad Zangana, économiste chez Schroders. Selon toute vraisemblance, la coalition actuelle (CDU / CSU, de Angela Merkel, et les sociaux-démocrates de Sigmar Gabriel) devrait continuer gouverner, peut-être avec l'ajout des Verts, si les sondages devaient continuer à montrer une perte de consensus.

Mais beaucoup dépend des intentions de la chancelière, dont l'absence pourrait faire pencher la balance. « Angela Merkel n'a pas encore annoncé son intention de poursuivre au-delà de son mandat actuel - explique Zangana - Les attentes vont en ce sens, mais si elle devait décider de mettre fin à son expérience du gouvernement, les sondages pourrait abandonner la CDU / CSU, dans le cas où ils ne seraient pas en mesure de trouver un candidat dont la popularité est au moins une fraction de celle de Mme Merkel ».

Enfin, il y a le cas espagnol, où les électeurs vont sans doute voter pour la troisième fois en un an, il parait juste avant Noël.

Les premières élections ont été le 23 décembre 2015, mais le résultat a vu un Congrès fragmenté en quatre sections : le PP, le PSOE, et les deux nouveaux mouvements Podemos et Ciudadanos. Les populaires étaient encore le premier parti, mais sans alliés pour former une majorité.

Donc, l'Espagne est appelée à voter le 26 juin, mais le résultat a été presque identique, avec le PP, qui a augmenté son score de 5%, mais toujours sans obtenir de majorité. Le Congrès a à nouveau nié la confiance à Mariano Rajoy. La décision revient maintenant au roi Felipe VI, qui a dit vouloir attendre la fin d'octobre pour voir si les parties ne parviennent pas à trouver un accord. Si ce n’est pas le cas, à ce jour, la chose la plus probable est que les espagnols retourneront aux urnes.

Opportunités pour ceux qui osent

L'accumulation de tous ces facteurs pourrait avoir un effet négatif sur les marchés financiers européens. Néanmoins, les prochains rendez-vous politiques pourraient ouvrir des opportunités pour ceux qui ont l'appétit pour le risque.

« Les marchés sont particulièrement vulnérables dans la période actuelle de faible croissance » lit-on dans un communiqué rédigé par Nadège Dufossé, responsable de l'allocation d'actifs de Candriam.

« Nous pensons que l'incertitude sur le plan politique restera élevée en Europe. Cela pourrait affecter la confiance des entreprises, en particulier en ce qui concerne les décisions d'investissement. Cela dit, nous avons également constaté qu'un choc sur le marché peut présenter des opportunités intéressantes si les banques centrales appliquent le modèle de la crise financière en ouvrant les robinets pour fournir des liquidités suffisantes pour atténuer les facteurs négatifs ». Et dans ce sens, le rebond du marché post-Brexit peut servir d'exemple.

« Dans le cas présent, nous pensons que la prime de risque actuelle associée aux actions européennes est largement expliquée par le niveau d'incertitude politique », continue Dufossé. « À notre avis, l’agenda serrée des prochains mois ne devrait pas permettre une réduction constante de la prime au risque européen ».

Facebook Twitter LinkedIn

A propos de l'auteur

Valerio Baselli

Valerio Baselli  est éditorialiste sénior chez Morningstar.