La courbe des taux américaine s’aplatit. Les deux graphiques suivants l’illustrent. Le premier montre l’écart entre le rendement d’une obligation souveraine américaine (bon du Trésor) à 2 ans et à 10 ans. Le second montre l’évolution du rendement des bons du Trésor entre fin 2016 et le 17 juillet 2017 pour des maturités différentes.
Ecart de rendement 2 ans-10 ans
Source : Morningstar Direct
Courbe des taux US
Source : US Treasury
Ces deux graphiques montrent l’impact de la politique monétaire de la Fed, conduisant à une remontée des taux courts (les maturités inférieures à 2 ans). Mais au même moment, la partie de longue de la courbe (5-10-30 ans) a baissé. En gros, le marché obligataire prend bien en compte l’impact de la politique de la Fed (hausses des taux), mais n’anticipe pas de redressement significatif de l’inflation sur le long terme.
A partir de l’été 2016, un mouvement de « relfation » est intervenu sur les marchés financiers, lequel s’est accéléré avec l’élection de Donald Trump fin 2016 et l’espoir de la mise en œuvre d’une politique de relance budgétaire et de baisses d’impôts.
Mais dans le courant du premier semestre, les statistiques de croissance économique ont montré une faiblesse de l’activité, malgré des indicateurs avancés ou un marché du travail porteur. En outre, l’administration Trump a rapidement rencontré des difficultés à dérouler son programme économique. Enfin, malgré une économie en situation de quasi-plein emploi, les salaires ont du mal à accélérer, donc à tirer les prix à la hausse.
Source : FRED St Louis Federal Reserve
La partie courte de la courbe est celle où l’impact de la politique monétaire est le plus visible. En revanche, la partie longue reflète plus l’état de l’économie (croissance et inflation).
L’aplatissement de la courbe montre donc que le marché ne table pas à ce stade sur une accélération de la croissance, mais plutôt sur un ralentissement, voire une possible récession.
Les signaux envoyés par la courbe des taux d’intérêt sont toutefois difficiles à interpréter, en raison du contexte particulier dans lequel nous sommes. En effet, les injections massives de liquidités de la part des banques centrales ont distordu la valorisation de nombreuses classes d’actifs en achetant des obligations souveraines et des titres de dette.
C’est d’ailleurs le grand sujet de discussion sur les marchés : comment la Fed et les autres banques centrales des pays développés (BCE, Banque du Japon, Banque d’Angleterre…) vont-elles piloter l’arrêt de leurs programmes d’achats puis la diminution de la taille de leur bilan – lequel signifiera une réduction de la base monétaire et des liquidités mises à disposition du système bancaire.
Pour de nombreux intervenants, cette perspective pourrait entraîner un regain de volatilité, tombée à des niveaux historiquement bas ces derniers mois. Mais les marges de manœuvre des banques centrales sont limitées.
L’autre risque est qu’à un moment l’inflation accélère de manière inattendue, obligeant les banques centrales à remonter leurs taux directeurs plus rapidement que prévu, ce qui augmenterait le risque de faire plonger les économies développées en récession.
Ces dernières vont devoir faire preuve d’une grande prudence dans les mois à venir. Elles devront s’assurer que la sortie des dispositifs exceptionnels de création de liquidités peut s’opérer sans créer de perturbations majeures dans le système financier.