Comprendre les risques structurels des ETF

Quels sont les risques de contrepartie propres aux ETF synthétiques et aux ETF physiques?

Jose Garcia Zarate 20.06.2013
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La croissance du marché des ETF en Europe au cours des dernières années a fait l'objet d'une attention particulière de la part des régulateurs, de la recherche et des médias. Cette attention accrue a eu l'effet d'une lame à double-tranchant. Du côté positif, c'est une reconnaissance implicite que la notion d'investissement "passif" est une réalité pour les investisseurs. Cependant, dans de nombreux cas, l'industrie des ETF a été souvent singularisée sur un certain nombre de questions - principalement liées au risque - qui affectent l'industrie de la gestion collective dans son ensemble.

Qu'il soit passif ou actif, l'investissement signifie toujours une prise de risque avec l'espoir d'un gain. Réduit à sa plus simple expression, on peut identifier deux catégories de risque: le risque lié à l'investissement renvoie à la performance de l'actif dans lequel on investit, tandis que le risque structurel renvoie au risque du produit retenu pour investir dans un actif. Le risque de l'investissement est inévitable, mais prendre un risque structurel devrait être une affaire de choix personnel.

En Europe, le débat sur le risque structurel des ETF a toujours été lié à la méthode de réplication. Il y a deux catégories d'ETF sur le marché européen: les ETF physiques, qui répliquent un indice en détenant physique tous, ou un échantillon représentatif, de ses constituants; et les ETF dits "synthétiques", qui offrent la performance de l'indice à travers des contrats de swaps.

Conceptuellement, il est plus facile d'expliquer ce qu'est la réplication physique. Cependant, ce serait une erreur de croire que "facile à comprendre" signifie " aucun risque structurel". Or, les ETF physiques peuvent eux aussi présenter un risque de contrepartie lorsqu’ils ont recours au prêt de titres. Et c’est d’ailleurs ce que font les plus grands fournisseurs d'ETF physiques en Europe.

Ceci étant, il est important de souligner que le risque de contrepartie (c'est-à-dire le risque que la contrepartie au contrat financier ne soit plus en mesure de remplir ses obligations) n'est pas réservé aux ETF. Il peut aussi concerner une multitude d'autres véhicules d'investissement, y compris les fonds traditionnels, qui ont aussi parfois recours au prêt de titre ou utilisent des produits dérivés. Cela étant, lorsqu'il s'agit d'ETF, les investisseurs et leurs conseillers doivent être sûrs qu'ils comprennent bien la nature du risque structurel. De même, ils doivent aussi être capables d'évaluer si les mesures de protection en place contre ce risque, ainsi que les mesures compensatoires prévues, sont adéquates.

L'utilisation des swaps dans les ETF synthétiques

Les ETF synthétiques offrent la performance de l'indice qu'ils suivent à travers des contrats de swaps. Le gérant construit un "panier de substitution" - encore appelé " collatéral" - avec un mix de titres qui peuvent avoir ou pas un lien avec l'indice sous-jacent de l'ETF. Il passe ensuite un contrat de swap avec une contrepartie - en général une banque d’investissement – qui permet d'échanger la performance du  panier de titres contre celle de l'indice. Pour cette raison, le risque de contrepartie est intrinsèque à la structure de l'ETF. Cela signifie que les investisseurs sont irrémédiablement exposés - au moins en théorie - au risque que la contrepartie au swap ne soit pas en mesure de fournir la performance de l'indice, dans un cas de faillite de la contrepartie par exemple. Le détenteur de l’ETF se retrouverait ainsi avec le collatéral.

Il faut toutefois savoir que ce risque de contrepartie est limité par la réglementation européenne. Selon les règles UCITS, l'exposition non couverte d’un fonds à a un tiers via un produit dérivé (un swap, dans le cas d’un ETF synthetique) ne peut dépasser 10% de l'actif total. Cela signifie que 90% de l'ETF doit être collatéralisé.

Dans la réalité, la majorité des fournisseurs d'ETF synthétiques offrent désormais des niveaux de collatéralisation bien plus élevés, allant jusqu’à plus de 100% de la valeur de l’actif total des fonds. Les fournisseurs d'ETF synthétiques ont aussi réalisé de gros progrès en matière de transparence. Par exemple, la publication en ligne - en général quotidienne - de la composition des "actifs de substitution" est devenue la norme. Ce niveau de transparence aide les investisseurs à mieux évaluer le risque.

Prêt de titres dans les ETF physiques

Le prêt de titres consiste pour un fonds à prêter une partie de ses actifs à une tierce partie en échange d'une commission. Cette pratique permet de générer des revenus qui peuvent partiellement, ou parfois complètement, compenser les frais de gestion et autres sources de tracking error (écart de suivi) d'un fonds. Le risque de contrepartie dans ce cas provient du fait que les emprunteurs des titres ne soient pas en mesure de les restituer.

Il est important de souligner que, à la différence de l'utilisation de swaps pour les ETF synthétiques, le prêt de titres n'est pas indispensable à un ETF physique pour lui permettre d'offrir la performance promise dans le suivi d'un indice. Au contraire, l'objectif du prêt de titre est d'améliorer la performance de l'ETF. En tant que tel, exposer l'investisseur au risque de contrepartie est un choix qui relève du fournisseur de l'ETF. Cela étant, le choix d'assumer un tel risque incombe à l'investisseur. D'où le besoin d'une grande transparence de la part du fournisseur d'ETF concernant, dans un tel cas, les mesures de protection mises en place ainsi que les éventuels bénéfices pour l'investisseur.

Le niveau de d'information sur les prêts de titres en place s'est grandement amélioré chez les fournisseurs d'ETF physiques au cours des dernières années. Certains pourraient affirmer que ce n'est pas optimal. Mais, au regard du secret sur ces pratiques dans la gestion active, les fournisseurs d'ETF peuvent être considérés comme travaillant à "livre ouvert".

En matière de mesures de protection, une pratique courante des fournisseurs d'ETF est de couvrir totalement ou de manière excessive leurs prêts. Il est aussi important de noter que s'il n'y a pas de limite réglementaire au montant des fonds qui peuvent être prêtés, certains fournisseurs ont adopté des plafonds en matière de prêts. Certains offrent aussi une assurance contre les pertes potentielles.

Les nouvelles règles publiées par l’ESMA en 2012 établissent que tous les revenus provenant des activités de prêts de titres, nets des coûts directs et indirects explicitement décrits dans le prospectus, sont au bénéfice de l'ETF.

La qualité du collatéral est primordiale

Que l'on décide d'investir dans un ETF synthétique ou un ETF physique qui a recours au prêt de titres, le degré de protection contre le risque de contrepartie dépend du collatéral depose en garantie. L'aspect quantitatif du collatéral est important et les cas où la règle "plus il y en a, mieux c'est" s'applique sont prépondérants. Cependant, dans l'éventualité d'un défaut de la contrepartie, le niveau de compensation ne sera pas uniquement déterminé par la quantité, mais par le fait de savoir si le collatéral est de suffisamment bonne qualité pour être liquidé rapidement et à un prix raisonnable. Evaluer la qualité n'est pas chose aisée. Il est possible de déterminer une classification assez grossière des actifs sur la base de leur sécurité perçue. Néanmoins, la possibilité de vendre un actif, à un prix auquel il peut être vendu, dépendra in fine de l'environnement de marché au moment de la transaction.

Les nouvelles règles publiées par l'ESMA l'an dernier ont abordé cet aspect de la qualité du collatéral. Parmi d'autres, des facteurs comme la liquidité, la note de crédit, la transparence de la fixation du prix et une diversification suffisante des actifs collatéraux sont des éléments clefs pour minimiser les risques de déception quand on liquide un collatéral.

Dans tous les cas, l'élimination complète du risque ne semble pas possible. Mais là encore, c'est la prise en compte du risque qui distingue les investisseurs des épargnants. Ce qui devrait importer pour des investisseurs envisageant le risque sous toutes formes est de le faire en pleine conscience. A cet égard, les ETF répondent à des standards élevés de transparence - bien plus élevés en tout cas que dans la gestion active traditionnelle - ce qui permet aux investisseurs d'agir en connaissance de cause.

Cet article a été initialement publié sur le site Morningstar.co.uk le 10 juin 2013.

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A propos de l'auteur

Jose Garcia Zarate  is an ETF analyst with Morningstar UK.