En dehors des commentaires de gestion ou de points sur l’actualité, quelques gérants offrent à leurs investisseurs l’occasion de prendre un peu de hauteur et de "lever le nez du guidon". Un exercice auquel se plient bien plus volontiers les gérants anglo-saxons que les français.
Warren Buffett
A tout seigneur tout honneur, nous commencerons cette revue brève (et partiale) par le plus célèbre des gérants, Warren Buffett, patron de Berkshire Hathaway. Les écrits de Buffett sont plutôt rares, mais copieux. L’oracle d’Omaha s’exprime notamment en longueur à travers sa lettre aux actionnaires, dans laquelle, outre une revue des opérations de sa firme, il devise de quelques sujets pouvant faire l’actualité du moment.
L’édition 2012 comportait par exemple une tirade sur l’incertitude ("America has faced the unknown since 1776"), le manque d’optimisme des dirigeants américains et leur timidité en matière d’investissement (page 5) particulièrement à propos lorsque l’on sait qu’une des variables clefs de la reprise économique dans les pays développés, c’est justement l’investissement des entreprises. Dans l’édition précédente, Buffett s’étonnait de l’engouement autour de l’or, actif qui ne produit pourtant aucun revenu…
Howard Marks
Howard Marks, patron du fonds Oaktree Capital, se distingue également par des mémos souvent remarquables sur des thématiques très diverses. Le dernier, daté du 13 mars, portait sur les perspectives sur les actions. Marks a publié en 2011 un livre reprenant certains de ses mémos, dissertant à l’envi sur des sujets aussi divers que le risque, la patience, la recherche de valeur et d’opportunités décotées, le fait d’être contrariant… Autant de contributions qui aident l’investisseur à développer sa propre philosophie à l’égard de la Bourse. Et une aide incomparable pour prendre du recul sur les soubresauts du marché.
Jeremy Grantham
Dans la capacité à prendre du recul, il faut sans doute aussi citer Jeremy Grantham (GMO), lequel appelait en mars 2009 à réinvestir significativement dans les actions (tout comme Buffett quelques mois plus tôt). Grantham cherche souvent à regarder les différentes classes d’actifs dans une perspective de long terme (GMO publie une prévision de rendement sur 7 ans dans ce domaine).
On peut également recommander les commentaires de gestion de Bruce Berkowitz (Fairholme Funds), ceux de Tweedy Browne ou les gérants de Grey Owl Capital Management – tous ayant un biais value et se réclamant de l’héritage de Benjamin Graham (LE mentor de Buffett pour mémoire). D’autres gérants fameux, dédiés à la préservation du capital de leur client, sont cités abondamment dans le livre de Louis Lowenstein, The Investor’s Dilemma.
Des gérants français plus timides ?
En France, Marc Renaud, l’un des gérants value respectés de la place de Paris, partage ses vues sur les marchés de façon périodique (on peut lire sa dernière lettre). L’exercice est plus convenu et souvent relativement bref.
Les responsables de la Financière de l’Echiquier ou ceux de Carmignac se plient également à l’exercice de communiquer avec les investisseurs en dehors des « canaux habituels » que sont les rapports mensuels de gestion.
Malheureusement, en France, certains gérants réputés s’expriment peu, y compris par écrit. C’est le cas de Jean-Charles Mériaux, chez DNCA Finance, ou de Romain Burnand, de Moneta Asset Management, dont les sites institutionnels ne comportent que des commentaires de gestion « classiques ». Ces gérants, souvent notés favorablement par les analystes de Morningstar, préfèrent à l’évidence garder leur nez sur leur guidon et générer de la performance pour leurs clients.