Schneider : trop de goodwill pénalise la rentabilité

La stratégie de croissance de Schneider s’est beaucoup appuyée sur les acquisitions, au risque de pénaliser sa rentabilité. 

Jocelyn Jovène 12.07.2013
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En annonçant hier son intention d’acheter le britannique Invensys pour 3,8 milliards d’euros, Schneider Electric se donne l’opportunité de renforcer son positionnement sur des secteurs où il était peu présent.

Mais cette politique très active d’acquisition – inscrite dans les gènes du fabricant d’équipements électriques – a un inconvénient : elle peut avoir un effet dilutif sur la rentabilité du groupe, avertit Daniel Holland, analyste chez Morningstar en charge du suivi de la valeur.

Lorsqu'une entreprise en rachète une autre, elle constate un "écart d'acquisition" (ou "goodwill") entre le prix payé et la valeur comptable de la société rachetée. Cet écart représente la création de valeur espérée par l'acquéreur. Mais en mobilisant des ressources pour ce rachat (fonds propres et/ou dette), ce dernier attend un retour sur investissement (apport de nouvelles compétences, de parts de marché ou de positions commerciales, synergies de revenus et/ou de coûts...) qui doit couvrir le coût des ressources engagées.

C'est le pari qu'a fait à plusieurs reprises Schneider, avec un résultat mitigé, et ce malgré une conjoncture favorable entre 2004 et 2007 (graphique). Car toute acquisition comporte un risque d'exécution (rapprochement de deux cultures d'entreprise parfois très différentes) et dépend de la capacité à dégager les synergies prévues. Schneider a été capable de créer de la valeur, mais au prix d'une rentabilité volatile - ce qui signifie que le groupe a peut-être eu tendance à surpayer certaines de ses acquisitions.

"Bien que la société dispose d’un potentiel de rentabilité élevé, nous anticipons une croissance très modérée [des résultats] tant que Schneider devra digérer des acquisitions", écrivait Daniel Holland dans une note datée du 21 juin. Ses anticipations en termes de rentabilité du capital investi sont d’ailleurs prudentes.

Il faudra selon lui attendre 2016-2017 avant que le groupe ne dégage une rentabilité du capital équivalente à celle obtenue en 2004, soit lorsque la conjoncture économique internationale commençait tout juste à s’améliorer.

Pour les actionnaires du groupe, cette stratégie s'avère payante, au regard du parcours boursier de la société. Mais Schneider reste une valeur très volatile, car elle est très sensible au cycle économique.

En rachetant Invensys, le groupe dirigé par Jean-Pascal Tricoire tire parti d'un environnement de taux très favorable pour capter un moteur de croissance, quitte à le payer un peu cher. Le rachat d'Invensys, s'il va jusqu'au bout, représente un pari non négligeable sur la reprise du cycle économique.

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Valeurs citées dans l'article

NomValeurVariation (%)Notation Morningstar
Schneider Electric SE240,65 EUR-3,02Rating

A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.