Capital vs Rendement
Certaines actions permettent aux investisseurs d’accumuler du capital, au sens où un actionnaire profite de l’appréciation du cours de Bourse d’une société pour vendre et empocher une plus-value. D’autres titres offrent plutôt un rendement régulier, c’est-à-dire que leur cours de Bourse évoluera peut-être moins, mais la production d’un dividende assure à l’investisseur un flux de revenu.
Aux objectifs de l’investisseur correspondent différentes catégories d’actions : des titres de plus petites tailles pour l’accumulation de capital, ou des valeurs mal comprises par le marché et qui disposent d’un potentiel de rebond (valeurs cycliques, titres value).
Les investisseurs qui recherchent un flux de revenu plus régulier se positionneront sur des grandes entreprises déjà bien établies, et qui disposent d’une bonne visibilité sur leurs cash-flows et sur leur dividende ou qui sont en mesure de procéder à des rachats d’actions (pour peu que cela soit fait à un prix raisonnable).
« Value » vs « Growth »
Les investisseurs qui cherchent des titres décotés ont une approche « value » - la Bourse attribue à certaines sociétés une valeur très inférieure à leur valeur intrinsèque, telle qu’estimée par l’investisseur. D’autres investisseurs sont plus attirés par les histoires de croissance (« growth »), celles qui sont censées bénéficier d’une appréciation de leur valeur boursière, grâce notamment à une croissance bénéficiaire sensiblement supérieure au reste du marché.
Les actions ont donc, en fonction de ces différents styles, des rôles différents à jouer pour les investisseurs. Pourtant, ces derniers ont tendance à appréhender plus facilement la différence entre accumulation de capital vs rendement qu’entre « value » et « growth ».
Creusons ces notions.
L’investissement « value »
Il y a plusieurs manières d’appréhender la notion de « value ». Chaque gérant a sa propre manière d’appréhender la valeur intrinsèque d’une société et il existe de nombreuses techniques pour parvenir à cette fin. L’écart entre la valeur estimée d’un titre et son cours de Bourse détermine le plus souvent le poids qu’un gérant accordera à cette valeur dans son portefeuille (tout en respectant les limites de risque de sa stratégie) : plus l’écart (ou décote) est important, plus la conviction d’achat sera forte et potentiellement le poids affecté à un titre sera grand.
Pour déterminer cette valeur, le gérant peut donc avoir une approche relative ou absolue. Dans le premier cas, il se réfère à des ratios boursiers (http://www.morningstar.fr/fr/news/110862/valoriser-une-action-avec-des-ratios-boursiers.aspx) pour comparer des sociétés entre elles ou par rapport à un indice de marché ou sectoriel (par exemple : le P/E de Renault contre celui du CAC 40 ou du Stoxx 600 Autos).
L’autre approche consiste à déterminer la valeur d’un titre à partir de ses qualités propres (résultats, génération de flux de trésorerie, positionnement stratégique…) et en utilisant des modèles de valorisation comme l’actualisation des flux de trésorerie (ou « DCF » ou « Discounted Cash Flow »), la création de valeur, la capacité bénéficiaire (« earnings power value ») ou le revenu résiduel (« residual income model »)…
Quand les gérants vendent-ils ?
Deux raisons poussent un gérant value à céder son titre : ce dernier n’est plus « value » ou c’est une « value trap », c’est-à-dire que le titre continue d’être délaissé par le marché malgré la décote par rapport à sa valeur intrinsèque (cas des valeurs minières actuellement). Ces « value trap » peuvent exister pour de bonnes raisons, généralement d’ordre fondamental (les profits tardent à repartir du fait d’un environnement économique peu porteur).
Un titre est généralement vendu lorsque son cours de Bourse a comblé l’écart avec la valeur attribuée par le gérant. Ce dernier va donc vendre au fil de l’eau pour engranger une plus-value.
L’investissement « growth »
Les gérants ayant un biais « growth » s’intéressent plus à la croissance du chiffre d’affaires et des résultats, qu’à la valeur bilantielle d’un titre. Pour ces gérants, croissance organique ou amélioration des marges sont des moteurs plus puissants d’appréciation de la valeur d’une société cotée. Ces fonds auront donc tendance à afficher des ratios de valorisation de leur portefeuille souvent supérieur à la moyenne du marché, reflétant ce biais en faveur de titres de croissance.
Croissance des bénéfices
La capacité d’une société à faire croître ses profits est souvent un critère très important de sélection. Si la société ne peut faire croître ses bénéfices plus rapidement que son industrie ou que le marché à un instant donné, les gérants « growth » ne s’y intéresseront pas.
Les gérants recherchent cette croissance des profits de différentes manières. Certains gérants cherchent un effet « momentum », en particulier autour des dates de publications de résultats ou bénéficiant d’un trend d’évolution de leurs bénéfices qui s’améliorera au cours des trimestres à venir.
D’autres, plutôt que de s’intéresser aux sociétés pouvant créer la surprise lors de l’annonce de leurs prochains résultats trimestriels, semestriels ou annuels, cherchent des sociétés en mesure d’afficher des niveaux de croissance de leurs résultats comprises entre 15% et 25% par an.
Croissance du chiffre d’affaires
La « top line » comme l’appellent les analystes (le chiffre d’affaires d’une entreprise) est un autre indicateur fondamental qui peut servir de filtre de sélection de valeurs. C’est en particulier le cas des entreprises qui ne « produisent » pas encore un résultat positif (cas des start-ups dans de nombreux domaines d’activité comme l’Internet ou des sociétés de biotechnologies…). Mais comme les sociétés sélectionnées n’ont pas encore fait la preuve de leur capacité à générer des profits, cette approche est particulièrement risquée.
La croissance à prix raisonnable (« GARP »)
Certains gérants cherchent un équilibre entre croissance des profits et valorisation d’un titre, ce que l’on appelle l’approche « GARP » ou « Growth At a Reasonable Price » (« croissance à un prix raisonnable »). Leurs idées d’investissement apparaissent généralement dans l’univers des titres exclus par les gérants momentum, ou dans l’espace des titres délaissés par les analystes et le marché et qui présentent du coup une valorisation attrayante.
Les investisseurs GARP cherchent des sociétés dont la croissance bénéficiaire est temporairement en berne avec l’espoir de trouver un catalyseur qui permettra un changement de statut boursier pour la société étudiée.
Cet article a été initialement publié le 20 février 2013 sur le site Morningstar.co.uk. Il a été revu et édité.