Emma Wall : Bonjour et bienvenue sur Morningstar. Je suis Emma Wall et avec moi, Mark Mobius, vice-président du groupe Templeton Emerging Markets. Bonjour Mark.
Mark Mobius : Bonjour.
Emma Wall : Quels seraient aujourd’hui les marchés émergents que vous privilégieriez dans une optique de long terme ?
Mark Mobius : Tout d’abord, la Thaïlande. C’est un pays qui croit rapidement. Comme vous le savez, ce pays fait maintenant partie de l’ASEAN, l’association des pays du Sud-Est asiatique. Ils vont en profiter. Ils sont proches de la Chine, à côté de la Birmanie, du Laos et du Cambodge. C’est donc un pays très intéressant et se développant rapidement, et je crois qu’à long terme cela sera une source de résultats satisfaisants.
Une des choses intéressantes est qu’il y a eu une plus grande distribution des richesses à travers le royaume. Vous aviez une situation dans le passé où toute la richesse était concentrée à Bangkok. Maintenant, avec la nouvelle structure politique avec M. Thaksin et sa sœur qui arrive au pouvoir, un effort a été engagé pour transférer des fonds vers la campagne et cela est positif pour l’économie.
Emma Wall : Quels sont les risques ? Pour une personne non initiée, le pays doit être confronté à une intense concurrence internationale. Qu’a-t-il à offrir ?
Mark Mobius : Il y a en effet une concurrence sur l’industrie, le tourisme… mais la Thaïlande a les moyens d’y faire face. La main-d’œuvre est qualifiée, et travaille dur. Le tourisme, comme vous pouvez l’imaginer, est en plein boom. Beaucoup d’européens s’y rendre en plus …
Emma Wall : les 18-30 ans surtout.
Mark Mobius : oui, en plus des touristes asiatiques. Le problème pour l’avenir est d’ordre politique. En d’autres termes, s’il y a un sérieux désaccord entre les dénommés « rouge » et les « jaunes ». Vous savez que ces derniers soutiennent – ou sont plus favorables à la monarchie et au status quo, tandis que les « rouges » souhaitent plus de réforme et de changement. S’il y a un conflit entre ces deux groupes, qui peut, parfois, devenir violent, cela pourrait constituer un problème.
Emma Wall : Quel est votre deuxième marché ?
Mark Mobius : Le deuxième serait la Russie. La Russie a une très très mauvaise réputation, et les gens sont généralement négatifs sur le pays. C’est en général un bon signe, car lorsqu’une chose n’est plus populaire, vous pouvez y trouver des opportunités, ce qui est le cas en Russie. La valorisation des sociétés russes est très basse et elles sont attrayantes.
Emma Wall : La Russie me semble très comparable au Japon. On a l’impression que ce pays est à la mode une année puis abandonné l’année suivante. Pensez-vous qu’en ne se laissant pas influencer par ses émotions, c’est un investissement attrayant sur longue période ?
Mark Mobius : Oui, c’est en effet mon point de vue, car le processus de réforme se poursuit. Je veux dire, lorsque nous avons démarré en Russie, c’était un désastre. L’infrastructure était dans un état pitoyable, on ne trouvait rien sur les étals des magasins. Le pays évoluait du système communiste au système capitaliste, et c’est là où ils en sont. Beaucoup s’est passé en peu de temps. Il faut donc faire preuve de patience. Nous pensons que dorénavant les choses iront mieux.
Emma Wall : Votre troisième suggestion ?
Mark Mobius : La troisième idée est plus difficile, car, à la fin, la situation du marché des matières premières pourrait évoluer, et je pense que l’Afrique du Sud est à regarder dans cette perspective. Les nouvelles ne sont pas très réjouissantes. Les prix des matières premières ont baissé, dans certains cas de manière pas si prononcée mais la tendance est baissière. Il y a eu des grèves dans l’industrie minière, mais il y a des opportunités, selon moi, dans ce pays. Pas uniquement à cause des minières, mais car les valeurs de consommation sont plutôt intéressantes. Ces sociétés se développent au nord du pays dans le reste de l’Afrique et c’est là que la croissance se trouve.
Emma Wall : Quels seraient les risques en Afrique du Sud si les matières premières venaient à rebondir ?
Mark Mobius : Le risque, bien sûr, ce sont les tensions sur le marché du travail, car les syndicats, en particulier dans l’industrie minière, sont mécontents du niveau des salaires. Les coûts augmentent. Le niveau de vie de certains d’entre eux recule du fait d’une inflation plus forte. Je pense que cela pourrait être un gros problème.
Cependant, s’il y a réforme, et une réforme d’ampleur, ce qui pourrait arriver après les élections, nous pourrions voir un changement rapide.
Emma Wall : Merci Mark.
Mark Mobius : Merci à vous.
Emma Wall : C’était Emma Wall, pour Morningstar. Merci de nous avoir écoutés.