C’est l’un des autres paris assez consensuels au sein des marchés financiers : 2014 devrait voir un mouvement plus net d’appréciation du dollar, qui, à la surprise de beaucoup, ne s’est pas produite en 2013.
« Le gagnant de 2013, c’est… l’euro ! » note Vincent Chaigneau de la Société Générale. La devise européenne s’est en effet appréciée face à l’ensemble des grandes devises des pays développés (G10) ainsi que face aux devises émergentes.
Ces dernières, que beaucoup voyaient fin 2012 comme les gagnants du long processus de sortie de crise financière, ont périclité (au moins temporairement), avec des baisses face au dollar allant jusqu’à 20% pour la roupie indonésienne ou -11% pour la roupie indienne.
« Tapering », mot-clef de 2013
2013 aura été l’année où la planète finance a « découvert » un mot « nouveau » : le « tapering » (en français la réduction des achats d’actifs par la Réserve fédérale, qui se traduit de fait par une diminution des injections de liquidités dans le système financier américain).
En annonçant son intention de réduire ses achats d’actifs mi-mai, la Fed a mis à jour les fragilités de nombreuses économies émergentes (de la Chine à l’Afrique du Sud en passant par le Brésil, l’Inde ou la Turquie). Elle a fait apparaître les Etats-Unis comme le pays où le redressement économique a été, tout au long de l’année, le plus avancé – situation qui s’est confirmée par la décision de réduire les achats d’actifs de 10 milliards de dollars lors de la dernière réunion du comité de politique monétaire de l’année.
De manière générale, les devises ont continué de subir en grande partie les décisions de politique monétaire, comme le montre le graphique suivant, lequel retrace l'évolution de la parité euro-dollar en 2013.
Source: Morningstar
L’évolution du yen en sans doute l’exemple le plus édifiant, la devise nipponne a perdu respectivement 21% et 17% face à l’euro et au dollar alors que la croissance économique japonaise est repartie de l’avant et que la sortie de déflation semble enfin amorcée.
Le rôle des fondamentaux
S’ils ont peu joué en 2013, les « fondamentaux » économiques sont susceptibles d’avoir un rôle plus important en 2014, à en croire les experts de différents brokers. Et à ce jeu, c’est le dollar qui sera la devise vedette l’an prochain.
David Woo, stratégiste taux et devises chez Bank of America Merrill Lynch résume ses perspectives en trois points : « un dollar en hausse ; des taux d’intérêt américains en hausse et une volatilité des taux d’intérêt en hausse. »
« Les Etats-Unis ont réduit leur taux de chômage, leur déficit de la balance courante et leur déficit public durant 8 trimestres d’affilée. C’est la première fois que l’on a observé une telle amélioration depuis le milieu des années 1980 », écrit-il dans une note datée du 24 novembre (on peut aussi le voir dans cette vidéo). Le stratégiste voit notamment le billet vert s’apprécier face à l’euro, avec un taux de change de 1,25 fin 2014.
L’un des moteurs de la surperformance du dollar sera le décalage des cycles économiques et celui des politiques monétaires (le marché anticipe que la BCE engagera l’an prochain une politique d’assouplissement quantitatif alors que la Fed réduira son action dans ce domaine).
Parallèle avec 1995
Même son de cloche chez Morgan Stanley, qui trace un parallèle entre la situation actuelle et celle d’il y a 20 ans.
En 1995, un certain nombre d’économies émergentes laissaient transparaître certaines faiblesses, tout comme l’Europe où les tensions déflationnistes pesaient sur certaines devises comme le Deutsche Mark. La période était aussi marquée par une envolée des taux d’intérêt, provoquée par un resserrement trop brutal des taux par la Fed.
En 2013, l’envolée des taux d’intérêt américain a provoqué une onde de choc pour les devises émergentes. « Les précédents cycles ont montré que la sous-performance des devises émergentes et la surperformance du dollar vont main dans la main », explique Morgan Stanley. La banque voit la parité euro-dollar à 1,24 fin 2014.
Pour aller plus loin
L'historique de la parité euro-dollar sur 20 ans