Pour les économistes de Barclays, la Banque centrale européenne joue un jeu dangereux en faisant le pari que la reprise de l’économie européenne suffira à écarter tout risque déflationniste.
« La déflation est un risque asymétrique dont il est difficile de sortir », a averti mardi Fabrice Montagné, économiste senior chez Barclays.
Observant que Mario Draghi, le président de la BCE, ne cesse de changer de définition de la déflation tous les mois, l’économiste a rappelé que la menace déflationniste est bien réelle, en particulier si la France et l’Italie, qui contribuent à hauteur de 40% aux chiffres d’inflation, engageaient un processus d’ajustement structurel, avec un impact négatif sur des chiffres d’inflation déjà faibles (0,5% en zone euro).
« Nous sommes dans une reprise atypique en zone euro », a souligné Apolline Menut, économiste de la banque britannique. « Le rythme de croissance de l’économie est inférieur à ce qu’il devrait être dans une reprise classique », précise Fabrice Montagné, soulignant l’impact sur l’activité des pertes de richesse provoquées par la crise, lesquelles n’ont à ce jour pas été récupérées.
« Le problème de l’Europe est que la croissance n’a pour l’instant pas d’autre moteurs que l’atténuation des forces négatives qui avaient pesé sur elle », a ajouté Apolline Menut.
L’économie européenne est en effet dans une situation paradoxale, avec d’un côté une convergence des taux souverains à des niveaux antérieurs à la crise de la dette et une normalisation des coûts de financement (favorable aux banques), mais d’un autre côté pas de transmission du crédit à l’économie réelle.
La situation sur le front de l’inflation n’est guère meilleure. « L’output gap est toujours négatif ; les prix de vente des producteurs sont sous pression, les salaires réels baissent et le PIB de la zone euro est aujourd’hui 3 points de pourcentage inférieur à son niveau d’avant-crise », a constaté l’économiste de Barclays.
Au final, si le scénario de reprise économique n’entraine pas de mouvement de hausse des prix, la BCE sera contrainte d’agir, expliquent les économistes de Barclays. « Ne rien faire à court terme aura un coût en termes de communication de la banque », a conclu Fabrice Montagné.
Barclays prévoit une croissance de 1,3% en zone euro en 2014 et de 1,5% en 2015, tandis que l'inflation atteindrait 0,9% cette année et 1,1% l'an prochain.