Source: Morningstar.
La 5è conférence annuelle de Morningstar France s'est ouverte mardi 9 septembre sur une table-ronde sur la macro-économie à laquelle ont participé Jean-Pierre Petit de la société Socofi et Véronique Riches-Flores de RF Research.
2014 est la troisième année consécutive où la croissance économique mondiale va se situer sous sa moyenne de long terme (3,5%/an), avec une prévision qui devrait être ajustée vers 3% par le FMI contre 3,5% en début d’année.
Au moment où la Fed envisage de réduire son soutien à l’économie et où la BCE doit, elle, tout fait pour lutter contre la menace de la déflation en zone euro, les économistes invités à la conférence ont estimé que les banques centrales des pays développés devront maintenir leur effort de soutien à l’économie.
« Depuis 2008, les bilans des banques centrales occidentales se sont accrus du même montant que l’économie mondiale », a rappelé Véronique Riches-Flores, présidente du cabinet indépendant RF Research.
La crise financière s’est traduite par une diminution de la croissance potentielle dans de nombreuses régions du monde. Lla perspective d’un rebond insuffisant de l’investissement aux Etats-Unis ou la moindre dynamique des exportations en zone euro devraient peser sur les perspectives de croissance sur le moyen terme.
« Le cycle a perdu en intensité mais il a gagné en durabilité », a estimé pour sa part Jean-Pierre Petit, président des Cahiers Verts de l’Economie, tout en prévoyant que l’économie américaine devrait difficilement se dégager d’un rythme de croissance de 2% l’an dans un futur proche.
Faute de moindre dynamique de l’activité économique, les deux économistes ont estimé qu’il y avait un risque que les taux d’intérêt des banques centrales, mais également que les taux longs, restent bas plus longtemps que prévu par les investisseurs.
« S’il n’y a pas de reprise de l’investissement aux Etats-Unis, il n’y aura pas de normalisation des taux d’intérêt », a affirmé Véronique Riches-Flores.
Concernant l’Europe, Jean-Pierre Petit a noté pour sa part qu’elle était toujours sous la menace d’un scénario de déflation à la japonaise, l’assainissement des bilans des agents économiques et du système bancaire ayant été plus lent qu’aux Etats-Unis.
« La décision de la BCE [de baisser ses taux et d’ouvrir la porte à des achats d’actifs] est bienvenue, mais elle est trop tardive », a estimé l’économiste, tout en rappelant que l’institution avait relevé deux fois ses taux en 2011, au moment où les pays de la zone euro étaient contraints de mettre en place une politique budgétaire « trop stricte ».
Pour la présidente de RF Research, le risque de déflation devrait pousser la Commission européenne à chercher à mettre en place un plan d’investissement massif qui soit de nature à soutenir la demande interne.
« Le ‘Quantitative Easing’ n’a aucun sens sans un grand projet en matière d’investissement. Il faut viser au moins 1.500 milliards d’euros » pour avoir une chance de relancer l’activité en zone euro, a-t-elle précisé.
Les marchés émergents sont eux aussi en train de changer de monde. S’ils affichent toujours des rythmes de croissance soutenus et sont devenus prépondérants dans l’économie mondiale (en parité de pouvoir d’achat), les défis sont encore nombreux et l’analyse des investisseurs doit se faire davantage pays par pays.
« Les pays émergents n’ont plus la même capacité à être moteur de la croissance mondiale », a expliqué Véronique Riches-Flores.
Jean-Pierre Petit a abondé, expliquant que la Chine est confrontée à la lutte contre la corruption et à la restructuration de son « shadow banking ». « Si la Chine parvient à croître de plus de 5% par an sur le long terme, ce sera un miracle », a affirmé l’économiste.
Les investisseurs ne peuvent donc totalement exclure un scénario extrême dans cette région du monde, qu’il s’agisse d’un « hard landing » chinois ou d’un accident dans un autre pays qui constituerait un choc dans d’autres régions du monde.
Une perspective plutôt sombre, mais qui permet de prendre un peu de recul surtout lorsque les investisseurs attendent tant de l’action des banques centrales.