SPARX : « les actions japonaises ont un potentiel d’appréciation significatif »

Pour Tetsuya Hirano, gérant chez SPARX Group, les actions japonaises sont bon marché et devraient profiter d'un rebond sensible de leurs résultats en 2015.

Jocelyn Jovène 03.10.2014
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Tetsuya Hirano, gérant et co-responsable de  la recherche et des investissements au sein de la société de gestion SPARX Group (7,3 milliards de dollars d’actifs sous gestion), partage son analyse de l’économie japonaise et des perspectives pour la Bourse nipponne. Il gère les fonds SPARX Japan et SPARX Japan Smaller Companies Fund, où il adopte une approche de type value.

Les marchés financiers ont été volatils cette année. Etait-ce lié à la hausse de la TVA au Japon qui a eu un impact sur la croissance du PIB ? Y a-t-il d’autres explications ?

La hausse de la TVA a eu un impact sur la Bourse japonaise, mais nous pensons que deux facteurs ont surtout contribué à la volatilité du marché : tout d’abord, les craintes de « hard landing » en Chine et les questions liées au système bancaire de l’ombre ; ensuite, la volatilité du taux de change du yen face au dollar.

La TVA et la météo ont également pesé sur l’activité au Japon, mais nous pensons que ces facteurs ont eu un impact qui s’atténuera dans les mois à venir. Les gens ont gardé à l’esprit ces facteurs de court terme, mais ils ne voient pas que les salaires ont recommencé à croître du fait des tensions sur le marché du travail et devraient avoir un effet positif sur la consommation.

Quelles sont vos anticipations en matière de croissance des profits en 2015 pour le marché japonais et pour les titres dans votre portefeuille ?

Le consensus sur les profits du TOPIX table l’an prochain sur une progression de 10%, sur la base d’un taux de change dollar-yen de 100. Lorsque le yen se déprécie de 1 par rapport au dollar US, cela génère une croissance additionnelle de 1 point de pourcentage pour les profits.

Le taux de change actuel est de 109 yen par dollar US. S’il devait se stabiliser au niveau actuel, cela ajouterait 9 points de pourcentage à la croissance des résultats l’an prochain.

Les sociétés qui composent notre portefeuille devraient voir leurs profits croître de 20% l’an prochain, en grande partie parce que le fonds comporte une part importante d’exportateurs qui sont sensibles à l’évolution du yen.

Que pensez-vous de la valorisation actuelle du marché ?

Le P/E du TOPIX se situe à 15x environ actuellement, et à 13,5x l’an prochain. Dans l’ensemble, les actions japonaises sont moins chères qu’aux Etats-Unis et en ligne avec l’Europe. Comme le yen a eu tendance à se déprécier, nous pensons que la valorisation est en fait bon marché.

La rentabilité sur fonds propres (ROE) des entreprises japonaises est en retard sur le reste du monde. Pensez-vous qu’elles ont la capacité de rattraper ce retard et par quels moyens d’après vous ?

La moindre rentabilité a deux explications majeures d’après nous. Tout d’abord, la concurrence intra-sectorielle est très forte. Par exemple, il y a 8 marques de voitures au Japon, et 5 dans parmi les fabricants de téléviseurs. La concurrence pour mettre sur le marché des produits innovants est intense, mais la contrepartie est que cela pèse sur les marges.

Ensuite, la culture du management au Japon est plus conservatrice dans l’usage de l’effet de levier pour booster le retour sur fonds propres.

Sur la base des évolutions récentes de la gouvernance d’entreprise, telles que promues par le gouvernement Abe, nous pensons que cette situation va changer. On voit déjà quelques progrès (mise en place d’un code de gouvernance d’entreprise et de bonne administration (« stewardship ») et nous pensons que la rentabilité des fonds propres devrait s’améliorer, même si elle n’atteindra sans doute pas les niveaux que connaissent les Etats-Unis ou l’Europe.

Un certain nombre d’investisseurs s’inquiètent du retard du marché sur la Fed dans l’anticipation d’une remontée des taux directeurs. A votre avis, quelle est la sensibilité de la Bourse japonaise et quelle est celle de votre portefeuille de titres ? Comment s’en protéger ?

Une hausse des taux directeurs serait positive pour le Japon, car cela signifie que l’économie américaine est suffisamment solide pour la tolérer. Ce serait également positif car cela amplifierait la baisse du yen face au dollar, du fait de l’écart de taux entre les deux pays.

Toutefois, il faut tenir compte des effets de second tour. Des taux plus élevés ont un impact négatif sur les autres économies asiatiques, où les entreprises japonaises font commerce.

L’impact sur le fonds devrait être moins prononcé car ces économies asiatiques ne sont qu’une étape intermédiaire pour les entreprises exportatrices dont nous sommes actionnaires. Les marchés finaux de ces sociétés sont les Etats-Unis et l’Europe.

Le manque de dynamisme démographique est un défi dans de nombreux pays occidentaux et au Japon alors que c’est un élément fondamental de la croissance économique. Pensez-vous que les mesures structurelles proposées par Abe (la « troisième flèche ») sont suffisantes pour traiter le problème du vieillissement de la population au Japon ?

Récemment, le gouvernement japonais a annoncé l’objectif d’une population de 100 millions d’habitants dans 50 ans (contre 127 millions actuellement). Il considère que si rien n’est fait, la population japonaise tomberait à 87 millions d’habitants.

Tous les détails du plan pour atteindre cet objectif ne sont pas encore connus, mais nous comprenons qu’il y a de nombreuses options à l’étude, y compris la possibilité d’une politique d’immigration.

Pour un investisseur français ou européen, quelle exposition recommanderiez-vous aux actions japonaises ?

Le Japon représente actuellement 8% du PIB mondial. Je recommanderais à un investisseur d’avoir une exposition équivalente dans sa poche actions. La classe d’actifs est la moins chère des pays développés. Le gouvernement et le secteur privé font un gros travail pour réduire l’écart de valorisation avec le reste du monde, ce qui signifie que les actions japonaises ont un potentiel d’appréciation significatif à offrir aux investisseurs.

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A propos de l'auteur

Jocelyn Jovène

Jocelyn Jovène  est analyste financier senior et rédacteur en chef de Morningstar France.