Les effets de la crise russe sur le moral des entrepreneurs ont largement contribué à la panne de la croissance économique en Allemagne, et par ricochet à la panne de croissance de la zone euro, amplifiant le mouvement de défiance des investisseurs à l’égard d’une classe d’actifs décoté par rapport aux Etats-Unis.
Depuis le début de l’année, l’écart de performance entre actions européennes et américaines n’a cessé de se creuser : l’indice Stoxx Europe 600 progresse de 2,3% tandis que le S&P 500 bondit de 10,5%. La décote de valorisation entre les deux marchés, qui était de 9% fin 2013 a cru pour atteindre 12% actuellement.
Pour Philippe Brugère-Trélat, co-gérant des fonds Franklin Mutual European Fund (noté « Gold » par Morningstar) et Franklin Mutual Global Discovery Fund (noté « Silver »), les investisseurs sont confrontés à deux choix.
Ou bien ils donnent crédit au scénario de la déflation en zone euro et à l’enlisement du conflit russe, auquel cas les actions européennes n’ont aucune place dans leur portefeuille.
Ou alors ils font le pari d’une « normalisation » de la situation russe et d’une action plus agressive de la BCE, et la probabilité d’un retour de la croissance en zone euro sera plus forte – scénario qui n’est aujourd’hui pas intégré dans les cours de Bourse selon le gérant.
Mais le défi central est bien celui de la confiance, selon Philippe Brugère-Trélat. « Aux Etats-Unis, personne ne veut entendre parler d’Europe. C’est un peu le nouveau Japon. Mario Draghi a perdu beaucoup de crédibilité : sa marge de manœuvre est limitée à cause des allemands », affirme-t-il.
Si la macro-économie est décevante et pèse sur le sentiment des investisseurs, la volatilité récente des marchés a fait apparaître une série d’anomalies au niveau des secteurs et des sociétés cotées, dont le gérant a cherché à profiter. Cela l’a notamment conduit à accroître son exposition au secteur bancaire ou à certaines valeurs industrielles allemandes.
Les entreprises européennes devraient également profiter de la baisse simultanée de l’euro et du cours du baril de Brent, lesquels ont respectivement reculé de 9% et de 27% depuis le début de l’année. Les résultats des entreprises européennes au cours du deuxième trimestre étaient bien orientés (+18% sur un an) et la saison des publications de résultats du troisième trimestre est à ce stade d’assez bonne facture.
« Il y a de la valeur dans les sociétés globales (Volkswagen, Thyssenkrupp, Daimler…), mais comme ces sociétés sont étiquetées ‘valeurs européennes’, elles sont mal évaluées par le marché », note Philippe Brugère-Trélat.
Cependant, « avec un rendement du dividende de 3,4% en moyenne en Europe (contre 2% aux Etats-Unis), les investisseurs sont bien rémunérés pour attendre » que la situation s’améliore, a-t-il ajouté.