Dans le bureau de Pascal Blanqué au siège d'Amundi, à Paris, un poster géant, encore posé au sol lors de l’entretien accordé à Morningstar peu avant les fêtes de fin d’année. Ce poster, reproduit ci-après, retrace l’évolution des taux d’intérêt depuis… 1790.
Retraçant l’évolution plus récente des marchés financiers, le directeur des investisseurs d’Amundi observe :
« Historiquement, on observe sur très longue période trois régimes d'inflation. Le premier est un régime de croissance forte et inflationniste, durant lequel la corrélation entre actions et taux est élevée. Le deuxième est celui que l'on a observé durant les années 1950-1960, avec une croissance soutenue et une inflation modérée, durant lequel la corrélation entre taux et inflation est élevée et négative et où la valorisation des actions peut croître. Le troisième est un régime de déflation et de récession, comme ce qu'a connu le Japon. Actuellement, nous sommes à la frontière des régimes 2 et 3. »
Source: Bianco Research
Pour le responsable d’Amundi, il est impératif que la croissance économique mondiale se raffermisse. Car avec l’effet des politiques monétaires actuellement en place, les actifs risqués seraient les principaux bénéficiaires d’une croissance plus soutenue et qui a souvent déçu ces dernières années.
D’où le risque que, comme le pense Pascal Blanqué, 2015 soit dans continuité de 2014. « On a deux banques centrales (BCE, Banque du Japon) qui vont poursuivre l'expansion de leur bilan à un rythme supérieur à ce qu'a fait la Fed. Le thème de la reflation et de la surliquidité est donc là pour durer. Dans un tel contexte, nous pensons qu'il est pertinent de s'exposer aux actifs risqués (crédit/actions) et aussi d'être long de bons du Trésor sur la partie longue de la courbe. »
« Nous faisons deux hypothèses », ajoute-t-il. « La croissance économique mondiale ne glisse pas sous les 3%, qui est le niveau nécessaire pour justifier une baisse des primes de risque, sinon nous risquons de tomber dans un régime de déflation. »
En matière d’allocation d’actifs, Amundi privilégie toujours les actifs risqués.
« En ce début d'année, nous maintenons notre exposition aux actifs risqués, en jouant la thématique du rattrapage de la zone euro et du Japon qui nous semble cohérente avec les écarts de valorisation actuellement observés sur les marchés », explique Blanqué, qui ajoute :
« Nous pensons également que les devises seront un moteur de performance important à ne pas négliger. Les politiques d'assouplissement quantitatif sont une guerre des changes qui ne dit pas son nom. »
La dette émergente fait aussi partie des classes d’actifs à regarder, avec une préférence pour l’Asie et pour les pays dont les fondamentaux s’améliorent.
« Parmi les thématiques qui peuvent être considérées, il y a le thème de la reflation en Europe sera favorable aux valeurs financières; les actions américaines exposées à la croissance domestique; les "proxies" obligataires, notamment l'immobilier coté, pour jouer la recherche de rendement qui domine la dimension gain en capital dans les gestions de portefeuilles. »
Pascal Blanqué reconnaît que la baisse des taux longs, qui se poursuit en ce début d’année 2015, pose un vrai défi en termes de recherche de rendement et de diversification des risques pour les investisseurs institutionnels.
« Les investisseurs institutionnels peuvent trouver des poches de diversification dans des actifs réels et illiquides, comme l'immobilier, la dette privée (prêts) ou les infrastructures (financement de projets dans les énergies renouvelables par exemple) », estime-t-il.
« On observe également un appétit pour le crédit avec une dominante euro, qui est une poche plutôt active, ainsi que pour la dette émergente, avec une préférence pour les émissions en devises fortes (dollar...) », précise le responsable d’Amundi.