Rappelez-vous. C’était en mars 2000. Internet allait tout dévorer. Valoriser les entreprises à partir de la trésorerie générée était devenu ringard. Les temps changeaient, il était de bon aloi de les valoriser sur la base du nombre de clics ou d’abonnés – et gérants, banquiers, analystes devaient revoir leur boîte à outils.
L’histoire nous a montré comment ce rêve s’est terminé. Dans les pleurs et les larmes. Une expérience qu’il faudra moins de 10 ans à répéter avec les subprimes. Mais depuis que les marchés ont rebondi, les valeurs technologiques retrouvent leur lustre d’antan.
Après le krach de 2000, ont émergé de nouveaux acteurs – Google, Facebook, Twitter, Alibaba pour prendre parmi les plus emblématiques – mais d’anciennes gloires sont renées de leur cendres – Apple étant sans doute un cas d’école, avec le lancement de l’iPod en 2001, puis iTunes en 2003 jusqu’à l’iPhone en 2007, vague sur laquelle la firme de Cupertino surfe toujours.
Valorisation raisonnable
Aujourd’hui, l’indice phare des valeurs de croissance américaines – le NASDAQ Composite – retrouve ses plus hauts de 2000. Mais les excès de valorisation de la Bulle Internet sont loin derrière nous.
« On ne peut pas dire qu’il y a de bulle sur le segment des valeurs de croissance. Le cœur de marché des valeurs de croissance reste raisonnablement valorisé », affirme Christophe Nagy, de COMGEST.
« Le NASDAQ est proche du niveau observé en mars 2000 mais avec un environnement économique et fondamental qui est complètement différent », confirme Bruno Taillardat chez Unigestion. « A l’époque, on avait des entreprises qui avaient des valorisations stratosphériques uniquement sur la promesse de délivrer dans le futur de la croissance alors qu’à l’époque, il n’ y avait pas d’éléments tangibles pour mesurer cette croissance. Aujourd’hui, on trouve des entreprises solides avec un cash-flow récurrent et beaucoup plus important qu’au début des années 2000, et qui s’appuient toujours sur une forte innovation qui alimente cette croissance », ajoute le gérant.
Si l’on regarde l’évolution de l’indice et celle des résultats des sociétés le composant, on a plutôt l'impression d'une évolution relativement harmonieuse des résultats et de l'indice.
Source: Factset, Morningstar.
En 2015, les profits des sociétés composant le NASDAQ devraient croître de 18% - un chiffre relativement solide si l'on considère que depuis octobre dernier, les anticipations de croissance des résultats aux Etats-Unis ont été sensiblement revues à la baisse à cause de l'envolée du dollar et des craintes de remontée des taux d'intérêt.
Comme l’explique Christophe Nagy : « On ne paie pas plus cher aujourd’hui pour avoir de la croissance et de la qualité dans le marché américain qu’il y a cinq ans. Au contraire, la prime payée aujourd’hui pour ces valeurs par rapport au reste du marché est de 16% contre 24% il y a cinq ans. »
Le travail pour les investisseurs est de se concentrer sur les valeurs qui sont capables de maintenir un rythme de croissance raisonnable de leurs résultats, et dont la valorisation est cohérente.
Où sont les bulles ?
Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a peut-être pas quelques excès dans certains compartiments de la cote. « Certains segments sont surévalués, comme la biotechnologie, où les investisseurs semblent ignorer le risque clinique de développement de certains produits. Il y a aussi l’impact du non coté dans certains compartiments de la technologie qui peuvent avoir un impact sur les valeurs cotées en Bourse », note Christophe Nagy.
D’autres sources de risque peuvent provoquer de la volatilité sur le segment. « Il y a un risque dollar, mais surtout pour les secteurs où il y a de grosses disparités entre la part des revenus générés en dollars et la part des coûts en dollars », observe Bruno Taillardat. « Si une société génère 60% de ses revenus en dollars, mais que 60% de ses coûts sont à l’étranger, il y aura une sorte de couverture naturelle », ajoute-t-il.
Alors que de nombreux investisseurs craignent un regain de volatilité en 2015, s'exposer de manière linéaire aux valeurs de croissance est d'autant plus risqué que les valorisations sont tendues.
Ce risque existe donc pour certains segments de la cote au sein du NASDAQ, mais c'est également vrai d'autres secteurs de l'économie (comme la consommation courante), nous rappellent nos deux gérants.
Quelques ETF "valeurs de croissance US"
Les investisseurs peuvent s'exposer à la catégorie des grandes valeurs de croissance aux Etats-Unis au travers d'ETF, comme illustré dans le tableau suivant (nota: il s'agit de résultats obtenus avec l'outil "Classement ETF").
Précisons à toute fin utile que les gérants cités précédemment sont des gérants actifs, qui ont apporté leur éclairage sur la valorisation du marché dans son ensemble, mais dont le travail consiste à sélectionner des titres, et non à répliquer la performance d'un indice.
Source: Morningstar.