Le décollage du marché parisien a été soudain et très rapide. En l’espace de deux mois, le CAC 40 affiche un bond de 14%, atteignant désormais des niveaux de valorisation plutôt généreux.
A 15,8 fois le résultat prévu cette année, l’indice se traite avec une prime de valorisation de 36% par rapport au PER moyen historique observé depuis 2003 (11,7x).
La vigueur du rebond s’explique par le mouvement de rotation sectoriel observé sur les marchés à partir du début février, les investisseurs délaissant les titres dits défensifs (consommation courante) pour favoriser les valeurs plus cycliques, automobile en tête.
De fait, les publications de résultats au sein de l’indice ont été plutôt positive, avec des commentaires pour 2015 encourageants dans certains secteurs, comme l’automobile (voir le bilan des résultats des sociétés du CAC 40).
On peut néanmoins se demander si les investisseurs ne vont pas un peu trop vite en besogne, en particulier si l’on se rappelle que fin 2014 les gérants se posaient encore des questions sur la capacité de l’Europe à afficher des rythmes de croissance économique plus soutenus, qui profiteraient aux profits des entreprises européennes, et françaises.
Depuis la fin de l’année dernière, un événement majeur s’est produit: la Banque centrale européenne a ouvert les vannes du « Quantitative Easing », acceptant de s’engager dans le rachat d’obligations souveraines et quasi-souveraines.
Comme cela a été observé dans d’autres régions du monde - en particulier aux Etats-Unis et au Japon - ces mesures d’assouplissement quantitatif ont eu un impact positif et marqué sur les indices boursiers.
De nombreux courtiers le rappellent, l’effet direct du « QE » est une appréciation des multiples de valorisation. L’impact sur l’économie réelle est plus diffus et difficile à mesure, même s’il peut jouer, avec plusieurs mois de retard, sur le cycle de crédit bancaire.
En Europe, et en France en particulier, un autre élément commence à jouer: la baisse de l’euro. Les stratégistes de Société Générale rappelaient il y a peu qu’une baisse de 10% de l’euro ajoute 9 points de pourcentage à la croissance des résultats des entreprises françaises contre 7% pour celles de la zone euro.
Selon les données de Morningstar, les sociétés cotées à Paris suivies par nos analystes actions se traitent en moyenne avec une prime de 9% par rapport à leur valeur intrinsèque. Les rares opportunités d’investissement dans l’univers couvert par nos analystes sont dans les secteurs de l’énergie ou de l’industrie.
Mais il s’agit souvent de sociétés qui ont vu leurs résultats déprimés par la chute du cours du pétrole ou par une conjoncture morose en Europe et qui ont annoncé pour la plupart des mesures de restructuration qui alimenteront une nouvelle phase de croissance de leurs résultats.
Dans cet environnement, on ne peut que recommander une certaine prudence aux investisseurs, d’autant que les dernières données sur les flux montrent que les investissements en actions se font de plus en plus à travers des ETF et autres fonds indiciels, au détriment des gestions actives.
Cette tendance a pris de l’ampleur ces dernières années et pourrait se poursuivre si l’optimisme s’installe durablement dans l’esprit des investisseurs.
Ce qui constitue a priori une bonne nouvelle à court terme doit toutefois rappeler combien ce type d’investissement peut être aussi une source de volatilité, si les espoirs de reprise devaient être une nouvelle fois déçus ou si les projections de croissance bénéficiaire pour cette année et la suivante ne parvenaient pas à se matérialiser.