L’annonce de la transmission à Bouygues par Altice d’une offre de rachat de sa filiale Bouygues Telecom de 10 milliards d’euros fait flambler lundi les opérateurs français de télécommunications.
A ce stade, Altice a confirmé avoir transmis une offre. Bouygues a confirmé l'avoir reçue. Et Iliad a confirmé « être entré en négociations exclusives avec Numericable-SFR pour l’achat d’un portefeuille d’actifs » dans le cadre de l’offre d’Altice.
Une heure après l’ouverture de la Bourse de Paris, Bouygues gagnait 14,7%, Numéricable-SFR 12,5%, Altice 13,6%, Iliad 10,3% et Orange 7,2%.
Pour de nombreux analystes et observateurs, la dernière étape de consolidation du marché français des télécommunications est en bonne voie de se concrétiser, même s’il reste un certain nombre d’inconnues à ce stade.
A voir l'évolution des cours de Bourse, le marché considère que ce rachat est une opération gagnante pour tout le monde.
Pour Exane BNP Paribas, « l’offre évoquée est susceptible de réussir », considérant le prix élevé proposé pour « un actif qui a encore beaucoup à prouver » et le fait que les risques juridiques devraient être mitigés par les accords négociés en parallèle avec Iliad (cessions d’actifs) et Orange (transert de personnel).
Oddo Securities estime que le « timing est bon pour Numericable-SFR ». « Drahi jouit d’un gros crédit, après avoir montré lors de la publication du premier trimestre sa capacité à générer des synergies plus rapides et plus fortes que prévu et donc crédibilité les synergies potentielles avec Bouygues Tel » écrivent-ils dans une note publiée lundi 22 juin.
Le courtier évalue entre 10 et 13 milliards d’euros la valeur des synergies potentielles, sur la base d’un programme de 1,5 milliard d’euros par an (1 milliard d’économies de coûts, 310 millions de synergies de revenus et 150 millions de synergies sur les investissements).
Pour Natixis Securities, l’offre est en tout cas du pain béni pour Bouygues, dont le cours de Bourse était sous pression (+2,8% en 12 mois contre +4,3% pour l’EuroStoxx50).
« Indépendamment de l’issue de l’offre, qui est encore loin d’aboutir (le gouvernement pourrait mettre des bâtons dans les roues d’une telle consolidation sectorielle ?, le groupe Bouygues pourrait dans un premier temps refuser pour faire monter les enchères ?), nous pensons que le marché va intégrer ces 10 Md€ (ou plus ?) comme fair value de Bouygues Telecom. Or, il valorisait jusque là Bouygues Telecom aux alentours de 5 milliards d'euros (nous étions à 5,6 milliards d'euros). La différence avec notre précédente valorisation crée un delta de 11 euros par action (après décote de holding de 10%) », écrivent les analystes de la banque dans une note diffusée ce lundi (les passages en gras sont surlignés par les analystes, NDLR).
Pour Patrick Drahi, il reste donc au moins deux défis de taille à relever: convaincre Martin Bouygues, dont Bouygues Télécom est le "bébé", que le prix offert pour sa filiale est raisonnable et faire passer la pilule d'une consolidation de l'industrie aux autorités domestiques et européennes - un sujet qui semble de plus en plus sensible même si d'autres marchés (Allemagne, Irlande, Espagne, Royaume-Uni) ont opéré leur consolidation.