Après le regain de volatilité sur les marchés financiers et les dernières statistiques sur l’emploi américain, les avis sont très partagés sur l’utilité d’une hausse des taux directeurs de la Fed dès sa réunion des 16-17 septembre (la prochaine décision pouvant intervenir en décembre).
Certains économistes plaident pour la patience, estimant que la reprise américaine n’est pas suffisamment forte pour supporter une hausse des taux, et que cette dernière aurait une onde de choc mondiale, en particulier sur les économies émergentes dont les devises sont déjà fragilisées par le ralentissement économique de la Chine.
D’autres pensent qu’il est urgent d’agir, car l’économie américaine peut supporter une première hausse modérée des taux, au regard d’un taux de chômage particulièrement bas et d’indicateurs d’activité qui se sont récemment raffermis.
Les marchés n’attribuent à ce stade qu’une probabilité de 35% à une hausse des taux – mais celle-ci était de près de 55% début août, juste avant que les marchés financiers ne corrigent brutalement après la décision surprise de la Banque Populaire de Chine de laisser sa devise se déprécier par rapport au dollar.
Fin 2013, peu avant sa venue à la tête de la Fed, nous avions évoqué, à partir du travail des économistes de Morgan Stanley, les indicateurs importants qui pourraient guider l’action de la Fed. Nous mettons à jour pour de ces indicateurs pour éclairer les investisseurs qui attendent beaucoup de la prochaine réunion du comité de politique monétaire de la banque centrale américaine.
L’emploi toujours prioritaire
Le marché de l’emploi connaît une certaine embellie, si l’on en juge par l’évolution du taux de chômage, des créations d’emplois ou d’ouvertures de postes.
Chômage
L’évolution du taux de chômage est également très favorable
Emploi
Ouvertures de postes
Le taux d’offres de postes est un indicateur intéressant qui permet d’évaluer la « fluidité » du marché du travail.
Si les deux indicateurs évoluent dans le même sens, cela signifie qu’un nombre croissant d’emploi ne trouve pas preneur faute d’adéquation entre l’offre et la demande.
En revanche, si l’on suit l’évolution du taux d’activité des 15-64 ans, la situation est toujours préoccupante, puisque ce dernier est encore loin d’avoir retrouvé ses niveaux d’avant-crise.
Taux d’activité
L’explication réside notamment dans le départ de travailleurs à la retraite.
Inflation
Avec le plein emploi, l’inflation est l’autre élément clef dans la conduite de la politique monétaire de la Fed et depuis la crise, c’est sans doute l’élément le plus compliqué à gérer, en dépit de l’amélioration du marché du travail.
Le rythme d’évolution des prix (graphique) est en effet atone, avec une évolution qui pointe plutôt vers la désinflation que vers un regain de hausse des prix.
Cette évolution contraste pourtant avec la légère reprise des hausses de salaires, qui illustre (en partie seulement) la baisse du taux de chômage.
L’explication la plus communément avancée est la chute du cours des matières premières et l’augmentation significative de la production d’énergie (pétrole, gaz) sur le sol américain, qui ont rendu le pays moins dépendant des importations d’énergie.
On est toutefois encore loin des rythmes de progression que l’on pouvait observer avant la crise, même si le taux de chômage s’est nettement contracté.
Cette situation est paradoxale. Elle explique aussi pourquoi les marchés ont du mal à apprécier avec certitude comment la Fed conduira sa politique et si elle dispose de suffisamment de marges de manœuvre. Bref, le marché semble avoir du mal à se convaincre que l’économie américaine est suffisamment solide pour digérer une hausse des taux. Et la Fed semble avoir les mêmes interrogations.