L’environnement économique actuel constitue un défi pour la crédibilité des banques centrales, ont estimé mardi 8 septembre les économistes présents à la table-ronde d’ouverture de la Morningstar Investment Conference à Paris.
Sept ans après le début de la crise financière, les politiques monétaires sont encore le principal outil de soutien à l’activité et aux marchés financiers, les marges de manœuvre des Etats étant relativement limitées et l’endettement des agents économiques demeurant à des niveaux élevés.
Véronique Riches-Flores, présidente de RF Research, estime que si la situation économique s’améliore dans la zone euro, « ce qui se passe en Chine est loin d’être anecdotique », justifiant le discours prudent de Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, lors de sa dernière conférence de presse.
L’annonce d’une intervention plus longue que prévu de la BCE sur les marchés obligataires, connue sous le nom de « Quantitative Easing », est justifiée par la remontée des taux longs réels, a-t-elle ajouté.
Pour Anton Brender, chef économiste de Candriam, « Draghi un comportement très volontaire », tout en ajoutant qu’il « n’y a que la BCE qui peut stimuler [l’activité économique], même si elle n’a pas beaucoup de marges de manœuvre. » A ce stade, a-t-il précisé, l’action de la BCE a surtout eu un impact sur l’euro, ce qui a soutenu la croissance par le canal du commerce extérieur.
Véronique Riches-Flores a ajouté de son côté que si l’inflation s’est stabilisée, « elle est trop faible pour accompagner une reprise des profits des entreprises » en Europe.
La situation américaine, et la décision très attendue de la Fed sur un début de normalisation de sa politique monétaire, a provoqué plus de débat entre les deux économistes.
Véronique Riches-Flores a estimé que la Fed commettrait une erreur si elle remontait ses taux, même modestement, ce mois-ci. Anton Brender a estimé au contraire qu’il fallait que la Fed monte ses taux, faute de quoi s’ouvrirait une nouvelle période de volatilité pour les marchés.
« Le marché du travail est revenu à un niveau normal. Ce qui n’est pas normal, ce sont les taux zéro », a-t-il déclaré.
Le cas de la Chine a également provoqué un débat, notamment au sujet de la dévaluation du yuan. Selon Véronique Riches-Flores, les autorités chinoises ont géré des bulles successives (immobilier, Bourse) pour soutenir l’activité depuis plusieurs années.
L’annonce de la dévaluation du yuan le 11 août dernier, qui a provoqué une violente correction boursière, ne fait qu’acter l’échec à ce stade de la transition du modèle économique chinois, centré sur les exportations, vers une croissance plus autocentrée sur la demande intérieure.
Anton Brender a lui estimé que « la Chine n’a pas fait de dévaluation », car le yuan « n’a pas arrêté de s’apprécier et est actuellement surévalué. »
La Chine et les Etats-Unis sont les seuls pays qui n’ont pas laissé leur devise se déprécier récemment, alors que de nombreux pays d’Asie et la zone euro ont laissé filer leur monnaie.
La question d’une « guerre des changes » est donc posée, mais pour Anton Brender, à ce stade, elle n’est pas d’actualité.