Cet article fait partie de la série "Perspective", qui regroupe des contributions externes. Le texte suivant a été rédigé par Bernard Aybran, directeur de la multigestion chez Invesco Asset Management.
Malgré une dernière séance fortement haussière, le troisième trimestre se termine pour la plupart des marchés actions sur des performances significativement négatives.
Après un début d’année euphorique, de nombreux grands marchés sont revenus à zéro sur l’année, voire significativement en territoire négatif : +0,5% pour l’Europe, -6,7% pour les Etats-Unis et -10,4% pour les émergents.
C’est que les difficultés semblent s’accumuler : du point de vue macro, du côté des bénéfices des sociétés et du fait du comportement des investisseurs.
Alors que les inquiétudes étaient concentrées sur la Chine, dans le courant de l’été, elles se sont répandues à l’ensemble de l’univers émergent, mettant en cause le rythme de croissance de l’économie mondiale dans son ensemble.
Cette tendance a conduit le Fonds Monétaire International à multiplier ses appels aux Banques Centrales occidentales, au premier rang desquelles la Réserve Fédérale des Etats-Unis : il leur a rappelé que leur politique monétaire pourrait avoir des conséquences sur les économies émergentes, lesquelles voient leur dette croître significativement depuis des années.
Ainsi, pour les seules sociétés non financières, le niveau d’endettement a été multiplié par plus de cinq sur les dix dernières années, avoisinant les 21 000 milliards de dollars. Le Conseil pour la Stabilité Financière (ou FSB) a récemment alerté que « la récente augmentation des niveaux de dette […] a accru la sensibilité des sociétés non financières aux chocs macro-économiques et financiers ». Bien loin des économies émergentes, nombre de statistiques américaines récentes pointent également vers un ralentissement de l’activité.
Dans ce contexte, la saison des résultats qui s’ouvrira dans les prochaines semaines aux Etats-Unis s’annonce importante.
D’une part, parce que le consensus des analystes s’attend à la première baisse, en valeur absolue, des bénéfices par action des sociétés cotées aux Etats-Unis.
Cette baisse serait la conséquence logique de l’orientation des chiffres d’affaires, qui sont attendus en baisse pour le troisième trimestre consécutif.
Jusqu’alors, les bénéfices par action ont pu être soutenus par des rachats d’actions toujours plus importants : c’est aujourd’hui plus de la moitié des bénéfices d’exploitation qui sont consacrés aux rachats d’actions.
Au-delà des Etats-Unis, les chiffres d’affaires 2015 sont attendus en baisse, tant en Europe que sur les marchés émergents. Se distinguent assez nettement la zone euro et le Japon où, avec des chiffres d’affaires en légère croissance, ce sont des hausses de bénéfices à deux chiffres qui sont attendues cette année.
En l’espace d’un trimestre, les capitalisations boursières mondiales ont perdu plus de 10.000 milliards de dollars, ce qui les ramène à 60.000 milliards, leur niveau de septembre 2013, en baisse de 15% depuis avril dernier.
Pourtant, dans ce contexte, les fonds d’actions européennes et japonaises semblent avoir bénéficié de collectes significatives, à respectivement 31 et 27 milliards de dollars.
A plus long terme, l’une des conséquences des sorties de capitaux des économies émergentes se matérialise sur les marchés financiers : le bilan des Banques Centrales émergentes se serait contracté sur chacun des mois du troisième trimestre.
Qu’il s’agisse de défendre leur devise nationale ou de tirer les conséquences de prix du pétrole durablement plus bas, elles doivent désormais pour bon nombre d’entre elles puiser dans les actifs accumulés pendant des années, ce qui correspond d’un point de vue monétaire à une destruction de monnaie, ce que d’aucuns nomment un « resserrement quantitatif ».
Les données sur ces mouvements restent assez vagues. Toutefois, il semblerait qu’une bonne part des ventes aient porté sur des actions émergentes et de la dette en dollars. Les flux sortants sur les actions européennes pourraient donc encore être à venir.
Durant le mois de septembre, les portefeuilles multigérants Invesco ont continué à évoluer selon les tendances enclenchées au mois d’août. D’une manière générale, le niveau de risque a été réduit, via plusieurs types de mouvements selon les mandats.
Là où des expositions devises existent, elles ont généralement été réduites, afin de prendre en compte le statut de l’euro, qui s’apprécie désormais dans les périodes de tension. Les investissements en produits de taux ont été renforcés dans leur composante emprunts d’Etat, euro et dollars, au détriment de l’exposition crédit. Les investissements actions ont été allégés, principalement sur les places européennes, qui étaient prédominantes jusqu’alors.