« On connaît le ‘new normal’ des pays développés. En revanche, on n’a aucune visibilité sur ce que sera ne ‘new normal’ du monde émergent. » Pour Pascal Blanqué, CIO d’Amundi AM, la volatilité du prix des actifs sur les marchés, en particulier des devises ou des matières premières, reflètent l’ajustement en cours des anticipations de long terme sur la croissance du monde émergent.
Le modèle passé, où la croissance était centrée sur les exportations et l’investissement et financée massivement par le crédit, ne se reproduira vraisemblablement plu.
La sortie de ce modèle a provoqué une grande volatilité sur les devises émergentes et les investisseurs doivent aujourd’hui trouver le niveau de prime de risque suffisant pour contrebalancer le risque de changes dans cet univers.
A ce premier défi, s’ajoute celui de sélectionner les pays qui disposent d’un réel potentiel de croissance. Le cas chinois est de ce point de vue emblématique. En l’espace de quelques mois, les hypothèses de croissance de la deuxième économie mondiale ont été revues à la baisse.
Cela s’est traduit par une correction majeure sur les prix des matières premières. Le gros de cette baisse est déjà passé, mais il pourrait encore y avoir une correction de 10%-20%, en se fondant sur une hypothèse de croissance de 6% pour la Chine dans les années à venir, a expliqué Sébastien Drut, stratégiste chez Amundi.
Dans l’univers des devises émergentes, Amundi privilégie plutôt la roupie indienne, les devises d’Europe centrale et orientale (hors Russie), qui profitent toutes de la baisse du prix des matières premières et de l’ancrage à la zone euro pour les devises européennes.
A l’inverse, le gérant d’actifs évite les devises de pays dont les fondamentaux se sont détériorés - réal brésilien, pour le risque politique, dollar singapourien ou won coréen pour des questions de valorisation.
Au sein des actions émergentes, la capitulation des investisseurs semble proche, a estimé pour sa part Romain Boscher, responsable des gestions actions d’Amundi. Mais face à l’attractivité de la valorisation, le gérant s’est montré prudent en raison des flux toujours sortants et du risque de change.
Même constat dans l’univers de la dette émergente. Pour Eric Brard, directeur des gestions taux, « le point d’entrée n’est pas encore là. » « Les flux créent de la volatilité actuellement. Nous adoptons un positionnement prudent dans nos portefeuilles », a-t-il expliqué.
« Les marchés ont besoin d’un peu plus de visibilité sur la croissance chinoise et de beaucoup plus de visibilité sur la politique de la Fed », a conclu Pascal Blanqué. En ne remontant pas ses taux selon le calendrier initialement communiqué au marché, la banque centrale américaine a laissé entendre aux investisseurs qu’ils ont peut-être raison de s’inquiéter de l’environnement économique actuel, justifiant une mise à l’écart des actifs émergents des portefeuilles.