C’est une constante depuis le début de la crise financière. Les banques centrales ont joué et jouent encore un rôle central dans l’évolution des marchés financiers.
Dans un premier temps, leur intervention s’est révélée cruciale pour écarter toute crainte de risque systémique après la faillite de la banque américaine Lehman Brothers en septembre 2008, puis pour tenter de relancer le cycle du crédit.
Mesures non-conventionnelles
Pour ce faire, elles ont à la fois réduit leurs taux directeurs et surtout employé des mesures dites non conventionnelles (les fameux « QE ») en acquérant massivement des titres souverains pour réduire le coût de l’argent et ainsi contribuer à la stabilité des prix et à la relance de l’économie.
Cet objectif a été difficilement atteint, voire même pour certains observateurs, pas du tout. Pendant que la crise financière éclatait, le sauvetage des banques a conduit à un transfert de dette du système bancaire vers le secteur public.
Les Etats développés y ont répondre en mettant en place des politiques d’austérité budgétaire, notamment en Europe, lesquelles ont fortement pesé sur la dynamique de croissance de leurs économies et ralenti leur processus de désendettement, avec pour les plus fragiles, la mise en place de plans de soutien spécifiques (Portugal, Grèce, Italie).
Le niveau d’endettement des pays développés a donc peu reculé. Pour éviter que l’augmentation de la dette publique ne casse totalement tout espoir de reprise et ne replonge les marchés financiers dans de nouvelles phases de paniques comparables à 2008, les banques centrales ont dû intervenir de manière répétée – que ce soit au Japon à partir de 2012 avec les « Abenomics » ou en Europe avec les interventions verbales de Mario Draghi (à l’été 2012) ou avec la mise en place du « QE », annoncé courant 2014 et mis en place à partir du premier trimestre 2015.
Source : Factset, Morningstar.
Au final, l’augmentation du bilan des banques centrales (graphique) a surtout contribué à une augmentation du prix des actifs – recul de la prime de risque sur les actions mondiales, baisse des rendements obligataires souverains à des niveaux historiquement faibles.
Divergence
L’année 2015 marque toutefois un tournant avec pour la première fois un possible début de divergence entre la politique de la Fed et les banques centrales de la zone euro (BCE) et du Japon (BoJ). La première devrait démarrer un cycle de resserrement monétaire qui pourrait débuter cette semaine, avec une première hausse de 25 points de base de son taux directeurs.
La BCE et la BoJ mènent de leur côté une politique accommodante et pourraient encore l’amplifier si la croissance économique et l’inflation ne se raffermissent pas.
De l’avis de certains observateurs, cette situation serait inédite dans l’histoire moderne et les conséquences sans doute inattendues pour les investisseurs, les obligeant à se montrer plus tactiques dans la gestion de leur allocation.
Certains se demandent même si la Fed ne risque pas de commettre une erreur de politique monétaire en remontant ses taux directeurs au moment où la croissance américaine arrive sans doute à un pic – mais cette thèse fait l’objet de débats, d’autres considérant que la croissance est suffisamment solide pour supporter une hausse des taux.
Lutte d’influence
Une telle erreur de politique, si elle devait se confirmer, aurait d’autres conséquences. En effet, jusqu’ici les banques centrales étaient les seules à disposer de vraies marges de manœuvre en matière de politique économique. Les Etats étaient surtout confrontés à la réduction de leur endettement.
Or, de plus en plus monte dans le débat public une remise en question de ces institutions dont les dirigeants ne sont pas sanctionnés par un vote populaire et qui bénéficient d’une grande indépendance à l’égard du pouvoir politique. C’est le cas aux Etats-Unis où l’actuelle présidente de la Fed fait l’objet d’une pression croissante du Congrès.
Cela pourrait à terme survenir dans d’autres régions du monde, et en Europe, si la BCE ne parvenait pas à atteindre son objectif d’une inflation à 2%.