Dépréciation du yuan : un peu ou beaucoup ?

Une dépréciation modeste ne servira pas à grandchose. Une dépréciation plus massive est une menace pour l’économie mondiale selon Francisco Torralba.

Francisco Torralba 08.02.2016
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Un certain nombre d’analystes cherchent à se rassurer en estimant que l’imbrication de la Chine dans le système financier international est limitée, et que son impact sur les pays développés est limité. Pourtant, l’onde de choc du ralentissement chinois est bien en train de se faire sentir, à travers le canal de transmission que sont les devises, les taux de change, les flux de capitaux et le sentiment de marché.

Depuis 2014, le mouvement de dépréciation du yuan chinois est enclenché. On estime que depuis la mi-2014, 930 milliards de dollars de capitaux sont sortis du pays – les investisseurs chinois cherchant des opportunités hors de Chine, au moment où le ralentissement économique et les surcapacités de production dépriment la rentabilité du capital. Cette situation n’est pas prête de changer à court terme.

La Banque populaire de Chine (PBOC) essaie de soutenir sa devise en vendant ses réserves de change. Même si elle détient un « trésor de guerre » significatif (plus de 3,3 milliards de dollars) et que le pays affiche un excédent commercial (600 milliards), la banque centrale chinoise ne tiendra pas longtemps.

En fait, nous estimons que si les sorties de capitaux devaient passer le cap des 100 milliards de dollars, la PBOC pourrait bien décider de laisser se déprécier sa devise plus vite.

Il y a donc deux scénarios : une dépréciation mesurée ou une dépréciation plus massive. La première ne devrait guère aider le pays. La seconde constituerait une menace pour l’économie mondiale.

La Chine est en compétition avec de nombreux pays d’Asie mais également des pays développés dont la devise s’est déjà fortement dépréciée. Pour combler cet écart, la devise chinoise va devoir se déprécier fortement.

Un tel scénario présente deux dangers. Tout d’abord, celui d’une déflation globale. Une dépréciation majeure enverrait une onde de choc dans le monde entier en exportant la désinflation. Cela sonnerait l’alarme parmi les autres banques centrales.

Ensuite, l’autre danger serait que la décision de la Chine ne déclenche une guerre des changes entre pays émergents.

A ce stade, la PBOC a mis en place le cadre d’une dévaluation progressive de sa devise, laquelle devrait davantage refléter les fondamentaux économiques. Cela signifie que la banque centrale devrait se comporter comme ses consoeurs occidentales, utilisant les taux d’intérêt pour piloter l’activité économiques, et abandonner, au moins officiellement, l’administration du taux de change. Cela requerra que le public (chinois et international) aient confiance dans les autorités de Pékin : pas d’intervention sur les changes, pas de contrôle des capitaux, et pas de discrimination entre investisseurs domestiques et étrangers.

 

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A propos de l'auteur

Francisco Torralba

Francisco Torralba  est économiste senior au sein de Morningstar Investment Management.