Quels sont les chemins parcourus par ceux qui décident d'introduire des critères ESG dans leur portefeuille financier ? Pour le savoir, nous avons examiné comment les opérateurs européens expriment leur désir d'investissement socialement responsable à partir de notre outil Morningstar Direct.
Pour commencer, nous avons pris les fonds domiciliés en Europe appartenant aux trois catégories Actions Internationales à grandes capitalisations (« value », mixte et croissance). Nous avons ensuite retenu les fonds identifiés comme « socialement responsables ». Enfin, nous avons distingué les instruments actifs des passifs.
A notre grande surprise, la plupart des plus grands fonds ESG suivent des stratégies passives, comme les norvégiens KLP AksjeGlobal, Handelsbanken Global Index Criteria et SEB Ethical Global Index.
À fin août 2016, les actifs gérés de façon durable en Europe s’élèvent à 37 milliards d'euros, environ 8% du total des trois catégories actions internationales. Sur ces 37 milliards, 45% sont gérés passivement, ce qui représente une part de marché bien au-dessus de la moyenne : la gestion passive, en fait, ne pèse que 15% du total des actifs investis dans les catégories « actions internationales ». Les investisseurs ESG embrassent donc la gestion passive dans une proportion beaucoup plus grande que les autres investisseurs.
Certains de ces trackers, tels que KLP, gèrent tous leurs fonds par le biais de filtres négatifs et pratiquent un actionnariat actif afin d'améliorer les pratiques ESG au sein des entreprises dans lesquelles ils investissent. KLP a récemment annoncé qu'il allait liquider de ses portefeuilles toutes les sociétés actives dans la production et la consommation de charbon.
Parmi les fonds ESG gérés activement, le Robeco Fund, domicilié aux Pays-Bas auquel Morningstar attribue une note qualitative « Bronze », gère 2,8 milliards d'euros d’actifs, ce qui le place parmi les plus grands fonds socialement responsables en Europe. Le fonds, cependant, a subi d’importantes sorties au cours des dernières années, et les rachats nets constatés ces 12 derniers mois sont parmi les plus élevés de l’univers ESG (439 millions d'euros entre août 2015 et août 2016). Des performances décevantes peuvent être le facteur qui explique cette décollecte.
ESG et trackers : meilleurs amis ?
Est-il donc logique que les investisseurs intéressés par les questions ESG soient plus susceptibles d’utiliser des instruments passifs ? Le directeur de la recherche sur les fonds passifs chez Morningstar, Ben Johnson, a récemment écrit dans le magazine Morningstar ETFInvestor :
« Les produits passifs, en particulier les ETF, se prêtent bien aux sélections positives ou négatives qui sont à la base de nombreuses stratégies socialement responsables. Cependant, ces stratégies ont historiquement été gérées de manière très personnalisée, dans le cadre des mandats spécifiques, principalement institutionnels. Récemment, ces mêmes investisseurs institutionnels ont signé des partenariats avec des émetteurs d’ETF pour concevoir et lancer des produits spécifiques qui tracent des indices de type ESG. »
Les tendances démographiques sont un autre facteur qui entraîne la création de nouveaux ETF socialement responsables. Selon une enquête menée par Morgan Stanley en 2015, 84% des millennials (la génération qui regroupe les personnes nées entre le milieu des années 1980 et la fin des années 1990, Ndlr) sont intéressés par les questions environnementales, sociales et de gouvernance.
Une étude réalisée par Charles Schwab, également publiée en 2015, montre que les ETF pèsent en moyenne 41% des portefeuilles des millennials. En plus, 61% d’entre eux prévoient d’augmenter leurs investissements dans les ETF dans l'avenir. Avec la croissance des millennials, je pense qu’il est raisonnable de s’attendre à ce qu'une partie de plus en plus importante des investisseurs utilise les ETF pour obtenir une exposition aux investissements ESG. »
Investissements passifs pour des investisseurs actifs
Donald B. Kleim, professeur à la Wharton School, a publié une recherche qui suggère que les véhicules passifs exercent une plus grande pression sur les entreprises par rapport aux véhicules actifs : « les fonds passifs influent sur les choix de gouvernance des sociétés dans lesquelles ils investissent, ce qui conduit à la présence d’administrateurs indépendants, moins de barrières à l'entrée et de meilleurs droits de vote. Les investisseurs passifs semblent exercer plus d'influence à travers leur vote et l'investissement passif est également associé à une meilleure performance sur le long terme. »
De bonnes raisons de voir les stratégies passives durables croître
Il y a beaucoup de bonnes raisons pour lesquelles les véhicules passifs investissent suivant les critères ESG. Il n’est donc pas surprenant que les investisseurs les utilisent.
Non seulement les trackers représentent déjà une partie importante de l’investissement durable, mais, à leur tour, les fonds ESG gagnent du terrain dans l'investissement dans les actions internationales.