Figure 1 - Perspectives à long terme par classes d'actifs
Source: Morningstar Investment Management Europe
Environnement
La corrélation entre la performance des marchés financiers et l’instabilité politique peut au mieux être qualifiée de ténue, l’année 2016 en est une bonne illustration !
Cette année David Cameron (Angleterre), Matteo Renzi (Italie), Dilma Rousseff (Brésil) ou encore Park Geun-hye (Corée du Sud) ont été destitués, contre toute attente Donald Trump succèdera à Barack Obama aux Etats-Unis. Ces changements politiques n’ont pas entravé les performances des marchés : les marchés actions ont progressé de 13,4% au global (FTSE All World NR EUR au 20/12) et les marchés obligataires de 5,6% (BBgBarc Global Aggregate en EUR au 20/12).
Les actions américaines (+18,7%) et émergentes (+15,9%) figurent parmi les plus fortes hausses, tout comme la dette émergente (+15%) et la dette à haut rendement (+18,7%).
L’année 2016 nous a aussi montré qu’il était vain d’essayer de faire des pronostics sur des sujets d’ordre politique, encore moins de tenter de les intégrer dans des prévisions de marché. Tout en prenant en compte ces risques en exigeant une marge de sureté supplémentaire à nos attentes en termes de rendement, nous conservons une vision à long terme et continuons d’ancrer nos analyses et nos allocations d’actifs sur les fondamentaux.
Marchés actions: des opportunités géographiques et sectorielles à exploiter
Les rendements à long terme prévus sur l’ensemble des classes d’actifs nous semblent au mieux modérément attractifs. Nous conservons une préférence pour les actions par rapport aux obligations mais dans un environnement incertain nous augmentons la part de liquidités au sein de nos portefeuilles. Ce faisant nous nous laissons la possibilité de saisir les opportunités d’investissements plus attractives qui pourraient se présenter dans un contexte de marché qui restera très volatil.
Au sein des actions nous privilégions toujours les marchés émergents, l’Europe et le Japon au détriment des Etats-Unis.
Figure 2 - Evolution des rendements réels annualisés sur un horizon de 10 ans (en devise locale)
Source: Morningstar Investment Management Europe
Il nous semble que les perspectives de croissance et le niveau de valorisation des actions américaines traduisent un excès d’optimisme de la part des investisseurs.
Le fort rebond que nous avons connu ces deux derniers mois est selon nous cyclique plutôt que structurel. Le changement de régime politique intervenu aux Etats-Unis n’est pas de nature à remettre en cause le faible niveau de productivité ou le déclin démographique qui impactent directement le potentiel de croissance et les niveaux de taux d’intérêt à long terme du pays. La remontée de l’inflation conduira par ailleurs la Réserve Fédérale à continuer d’augmenter ses taux en 2017.
Malgré une économie et des entreprises qui restent très saines, les niveaux de valorisation auxquels s’échangent les actions américaines contraignent fortement leur potentiel de rendement futur.
A l’opposé les marchés émergents se distinguent comme l’une des rares classes d’actifs offrant un niveau de valorisation et un potentiel de rendement attractifs et cela malgré les risques qui pèsent sur la zone.
Le ralentissement de la croissance en Chine, le niveau d’endettement des entreprises publiques du pays et leur impact potentiel sur le reste du monde constituent des sources importantes d’inquiétude dans un contexte où la croissance du PIB mondial reste faible : 2,4% en 2016 et 2,8% en 2017 selon les attentes de la Banque Mondiale. Le 19ième congrès du parti communiste chinois se tiendra par ailleurs au deuxième semestre 2017, ce qui pourrait générer des tensions avec les Etats-Unis compte tenu de la politique protectionniste et de la rhétorique antichinoise jusqu’ici tenue par de Donald Trump.
Il est indispensable d’intégrer l’ensemble de ces risques et de mesurer la perte potentielle qu’ils pourraient engendrer. Nous estimons toutefois que la croissance des bénéfices des entreprises de la zone et leur niveau actuel de valorisation font des actions émergentes une opportunité d’investissement intéressante à long terme, qu’il serait imprudent d’ignorer.
Malgré une bonne performance et la baisse logique du rendement attendu sur les actions japonaises, nous maintenons notre exposition inchangée à ce stade. Leur valorisation reste relativement attractive et la communauté des investisseurs demeure sous-pondérée, conférant aux actions japonaises une source supplémentaire de performance.
Il en va de même pour les actions européennes, lesquelles ont cru de 4,5% en 2016 malgré une absence réelle d’amélioration de leurs fondamentaux.
La communauté financière réduit bien souvent son analyse à une zone géographique, appréhendée de façon homogène et dans sa globalité, sans attacher suffisamment d’importance aux caractéristiques sectorielles propres à chaque zone.
Or le nombre et l’ampleur des mouvements de rotation sectorielle intervenus en 2016 et l’impact qu’ils ont eu sur certaines gestions montrent à quel point l’allocation sectorielle est importante.
Sur l’année (données au 20 décembre 2016 en euros) le secteur de l’énergie en Europe gagnait plus de 27%, celui des matériaux de base plus de 21%, alors que les télécoms et la santé perdaient respectivement 12% et 8,6%. Si les financières ont expliqué à elles seules une grande partie de la baisse des indices européens en début d’année, elles se placent parmi les plus fortes hausses au cours des 3 derniers mois.
Figure 3 - Performances des indices sectoriels européens
Source: Morningstar Investment Management Europe
Malgré un rebond attendu du retour sur capitaux investis des entreprises européennes eu égard au stade actuel du cycle économique, les actions de la zone dans leur globalité ne nous semblent pas bon marché. Pour autant, certaines poches nous semblent intéressantes, telles que les financières ou encore l’énergie, opportunités que nous continuons d’exploiter dans nos portefeuilles.
Marchés obligataires: la divergence des politiques monétaires s'amplifie
En 2016, la force de frappe des banques centrales a plongé plus d’un tiers des rendements des obligations souveraines en territoire négatif et, à l’encontre de toute logique économique, les flux sur la classe d’actifs sont restés positifs. Or en achetant des obligations à taux négatifs, la seule façon de générer un rendement positif est de les revendre à un taux encore plus négatif à un autre investisseur, ce qui de notre point de vue est un pari dangereux.
La bonne santé de l’économie américaine, la remontée de l’inflation ainsi que les perspectives de resserrement monétaire par la Réserve Fédérale Américaine ont cependant provoqué un fort rebond des taux américains au cours du dernier trimestre de l’année.
Les pertes essuyées sur les investissements obligataires ont laissé un avant-gout amer de ce qui pourrait se passer si la BCE ou la Banque du Japon venaient à inverser ou simplement arrêter leur programme d’assouplissement monétaire. Selon nous il reste encore l’équivalent de 6000-8000 milliards de dollars d’obligations dont les rendements sont négatifs et pour lesquelles une hausse des taux entrainerait une perte permanente de capital pour l’investisseur.
Figure 4 - Courbe des taux souverains allemands
Source: Morningstar Investment Management Europe
Nous avons donc de nouveau réduit notre exposition sur les taux, en abaissant en particulier la duration de nos portefeuilles via une augmentation de nos actifs monétaires.
Pour autant, nous estimons que la dette émergente continue de présenter un intérêt certain. La dette et les devises émergentes ont exagérément souffert de l’élection de Donald Trump et des conséquences négatives que cela pourrait avoir sur les économies émergentes (Chine en particulier).
En novembre les indices de dette émergente en devise locale ont perdu près de 7% dont 5 points de pourcentage sont attribuables à la seule baisse des devises émergentes. L’indice de dette libellée en dollar a perdu 4,6%.
Il nous semble important de garder à l’esprit que les fondamentaux économiques des pays émergents sont bien meilleurs qu’ils ne l’étaient lors de la crise émergente des années 90. En outre, la Chine, facteur de risque qu’il faudra surveiller de près l’an prochain, ne représente qu’un poids négligeable des indices de dette locale ou en devise dure (4% environ des indices JPM GBI-EM ou JPM EMBI).
Nous nous attachons plutôt à déterminer si la classe d’actifs est intrinsèquement attractive, c’est-à-dire si le rendement qu’elle offre est suffisant pour compenser la perte en capital potentiel liée au risque de défaut, de liquidité, d’inflation et de change.
Selon nos estimations le potentiel de rendement à long terme offert par la dette émergente, et tout particulièrement la dette locale suite à la baisse des devises émergentes et la détérioration du sentiment à l’égard de la classe d’actifs, est attractif et bien supérieur à celui de la dette émise par les pays du G5.
En ce qui concerne la dette d’entreprise, les fondamentaux restent bien orientés : les taux de défaut attendus sont toujours très bas et les entreprises affichent des bilans plutôt sains dans l’ensemble. Néanmoins, la très bonne performance de la classe d’actifs, en particulier sur le segment du haut-rendement (notations inférieures à BBB-) sur l’année ainsi que la perspective d’une remontée des taux, nous amène à prendre des profits.
A l’abord de 2017, l’environnement macro-économique demeure complexe et le risque géopolitique tout aussi élevé qu’en 2016. La volatilité restera donc élevée sur les marchés. Tout comme en 2016, il demeure primordial d’éviter d’être pris à revers par les changements de tendances sur les marchés.
Pour ce faire nous continuerons d’adopter une vision à long terme et une analyse pragmatique ancrée sur les fondamentaux des classes d’actifs. Nous serons ainsi en mesure de profiter des opportunités que pourraient offrir d’éventuels changements structurels sur les marchés.
Tout en privilégiant les classes d’actifs fondamentalement décotées, nous maintenons un degré élevé de diversification au sein de nos portefeuilles et un volant important de liquidités.