La hausse des taux d’intérêt pénalise de nombreux investissements. Cette hausse force une augmentation des rendements attendus des actifs, avec pour contrepartie une baisse des prix.
Il est plus difficile d’évaluer la sensibilité aux taux d’intérêt des actions que pour les obligations, car les actions ne délivrent pas de cash-flows fixes. Mais certaines actions sont plus sensibles aux taux d’intérêt que d’autres. C’est le cas des titres à fort rendement.
C’est assez intuitif : lorsque les taux sont bas, les investisseurs privilégient les titres à fort rendement pour compenser la perte de revenu et ils reviennent vers des titres à rendement plus bas lorsque les taux remontent. L’analyse des cash-flows permet toutefois de préciser cette analyse.
Les titres à fort rendement ont historiquement sous-performé les titres à faible rendement ou ne versant pas de dividende lorsque les taux d’intérêt remontent. A partir de la base de données French sur les actions entre 1953 et 2016, nous avons analysé la performances de quatre catégories d’actions : celles qui ne versent pas de dividende, les 30% qui versent le dividende le plus faible, les 30% qui versent le dividende le plus élevé et les 40% qui versent un dividende moyen.
Nous avons aussi conduit une analyse de régression avec la prime de risque du marché actions et l’évolution du rendements à 10 ans des bons du Trésor.
Lorsque les coefficients de corrélation, présentés dans le tableau suivant, sont positifs, ils indiquent une évolution dans le même sens entre deux variables et une relation inversé en cas de coefficient négatif. Il est intéressant de noter que les titres ne versant pas de dividende évoluent dans la même direction que le marché et que les taux d’intérêt, tandis que les titres à rendement élevé évoluent en sens opposé.
Pour interpréter ces résultats, il faut se rappeler que les taux d’intérêt n’évoluent pas dans le vide. Ils reflètent l’environnement économique général et s’apprécient quand la croissance se raffermit et que l’inflation augmente. Les entreprises les moins sensibles au cycle génèrent souvent moins de trésorerie dans les phases d’expansion économique en raison de l’augmentation des taux d’intérêt. Mais elles résistent mieux dans les phases de ralentissement et lorsque les taux diminuent.
Les titres à fort rendement ont tendance à présenter des flux de trésorerie plus stables que les titres à faible rendement pour deux raisons : ces entreprises opèrent dans des secteurs matures et ne s’engagent pas dans la distribution de dividendes conséquents si elles n’ont pas de visibilité sur leurs flux de trésorerie au cours d’un cycle. Au regard d’une moindre croissance des cash-flows pour contrecarrer l’impact de la hausse des taux d’intérêt, ces titres se comportent plus comme des obligations et sont donc plus affectés par leur augmentation. A l’inverse, la stabilité de leurs cash-flows les protège en période de baisse des taux.
Les secteurs les plus défensifs devraient donc sous-performer quand les taux d’intérêt s’apprécient et surperformer quand ils baissent. C’est ce que montre le tableau suivant.
La santé, le tabac, les biens non-durables, les télécommunications, les financières et les services collectifs ont tendance à évoluer en sens inverse des taux d’intérêt.
Les services collectifs sont un bon exemple de cette relation inversée. Le régulateur tend à limiter l’évolution des prix des producteurs d’énergie et ne procèdent à des ajustements qu’avec retard, le plus souvent lorsque la hausse des taux a érodé la rentabilité du secteur.
L’analyse des performances sectorielles entre octobre 1989 et novembre 2016 montre une sous-performance de la santé, des services collectifs (« utilities ») et de la consommation défensive quand les taux montent et une surperformance quand ils baissent. La technologie et les matériaux évoluent en sens inverse. Cela montre que les entreprises dont les cash-flows sont plus sensibles à la vigueur du cycle économique tendent à surperformer dans un environnement de hausse des taux d’intérêt et à sous-performer quand les taux reculent.
Ceci peut expliquer pourquoi les petites valeurs sont moins sensibles aux changements d’environnement de taux d’intérêt que les grandes valeurs. C’est ce que montre le tableau suivant.
Le fait de pouvoir réduire la sensibilité de votre portefeuille actions aux taux d’intérêt en évitant les titres à fort rendement et les secteurs défensifs ne veut pas dire que vous devez obligatoirement le faire. Ces secteurs sont souvent constitués de titres de qualité qui sont moins volatils que le reste du marché.
Une stratégie de faible volatilité peut sous-performer dans un environnement de remontée des taux d’intérêt, car les cash-flows de ces sociétés ne progressent pas aussi vite que la croissance économique, et offrent donc un moindre coussin pour amortir l’effet négatif de la hausse des taux.
Mais sur longue période, les titres à faible volatilité ont aussi eu tendance à offrir un meilleur couple risque-rendement sur la totalité d’un cycle de marché. Les investisseurs qui cherchent des titres à faible rendement pour profiter de l’effet positif de la hausse des taux pourraient enregistrer des performances plus décevantes sur longue période.