Les élections présidentielles françaises sont au cœur des préoccupations des marchés. La mesure des enjeux liés à un éventuel Frexit en comparaison à une simple continuité politique est importante. Au terme des résultats du premier tour, l’élection présidentielle se joue désormais entre un candidat pro-euro et une candidate prônant potentiellement la fin de la monnaie unique.
Lundi, les investisseurs ont marqué leur soulagement au regard de l’avancée d’Emmanuel Macron au terme du premier tour de l’élection présidentielle. Toutefois, 41% des suffrages exprimés se sont portés sur des candidats qui prônent une sortie de la zone euro.
En outre, une fois que le nom du prochain président français sera connu, sa capacité à disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale et à conduire ainsi la politique pour laquelle il a été élu dépendra de l’issue des élections législatives qui se tiendront en juin.
Il est donc intéressant de mesurer l’éventuel impact des événements politiques en cours sur notre évaluation des fondamentaux des différentes classes d’actifs.
L’expérience montre que les investisseurs accordent trop de place aux résultats des élections. Cela peut constituer une source de volatilité sur les marchés mais aussi créer des opportunités d’investissement. L’élection française ne fait pas exception comme l’illustre la réaction des marchés avant et après le résultat du premier tour.
Plusieurs attitudes sont possibles.
1. Prévoir et parier. Essayer de prévoir le résultat et prendre position en conséquence. Cette stratégie peut produire des résultats satisfaisants si elle est menée avec succès, mais elle est plus souvent source de déconvenues tant il est difficile de prévoir des éléments aussi incertains que les résultats d’une élection (le cas du « Brexit » ou l’élection de Donald Trump sont des exemples récents).
2. Se protéger avant tout. Ne pas intervenir et attendre est une autre approche possible. Cela peut conduire certains investisseurs à détenir des liquidités de manière quasi-permanente. Cette posture porte à conséquence, ne serait-ce que parce que l’inflation érode la valeur du capital non investi. Mieux vaut être exposé aux marchés quitte à supporter un peu de volatilité à court terme.
3. Tenir ses positions. Une stratégie de « buy and hold » intègre le fait qu’il est impossible de prévoir l’issue des élections, et s’inscrit dans une démarche de long terme. Cette stratégie surpasse les deux précédentes. Elle présente l’avantage de réduire les coûts grâce à un taux de rotation des portefeuilles plus faible et d’être moins taxée. Cette approche est payante sur le long terme, mais les investisseurs ont du mal à la mettre en pratique. En effet, les investisseurs ont tendance à se laisser influencer par les soubresauts des marchés et manquent de patience les conduisant de fait à intervenir au mauvais moment.
4. Les fondamentaux avant tout. Cette approche consiste à évaluer l’impact des résultats de l’élection sur la juste valeur des classes d’actifs et de suivre la différence entre les prix de marché et leur valeur intrinsèque. Cela présuppose que l’on puisse appliquer un raisonnement rationnel et surtout que l’on maintienne une grande discipline. Les investisseurs appliquant cette démarche sont d’avis qu’une élection produit rarement des changements majeurs dans l’évaluation des fondamentaux. Cette approche présente l’avantage de mesurer si le prix d’un actif s’écarte de manière significative de sa valeur intrinsèque et si cet écart est suffisant pour présenter une opportunité d’investissement. L’idée ici est de prendre en compte différents scénarios et d’intégrer une marge de sûreté suffisante pour intégrer l’impact à long terme des programmes sur les fondamentaux.
Impact sur les fondamentaux de l’élection française
Dans l’éventualité d’une victoire d’Emmanuel Macron, nous pensons que notre analyse fondamentale devrait peu évoluer. Son programme est relativement pragmatique, avec une politique centrée sur la réduction des déficits publics, le soutien à la croissance et à l’emploi. Selon ce scénario, nous ne voyons pas de raisons de modifier nos estimations sur la profitabilité à long terme des entreprises, leur taux de distribution des dividendes ou nos multiples de valorisation.
A l’opposé, une victoire de Marine Le Pen pourrait se traduire par une grande variété de scénarios. L’une des modifications les plus importantes à effectuer sur les fondamentaux des classes d’actifs concerne le marché obligataire. Compte tenu de son programme nous anticiperions alors un écartement significatif et durable entre le rendement des obligations françaises et celles émises par d’autres pays notamment l’Allemagne.. Une dégradation de la note de crédit de la France ne pourrait en effet être écartée ce qui devra alors être reflété dans notre estimation du juste spread de crédit à long terme à appliquer aux obligations francaises .. Cet élément devrait alors être pris en compte dans la marge de sûreté que nous demandons pour investir sur cette classe d’actifs.
Dans l’éventualité d’une victoire de Marine Le Pen, les marchés risquent d’avoir du mal à estimer les effets d’un scénario de type « Frexit » sur le marché des changes, et ses conséquences sur les flux de trésorerie générés par les entreprises européennes. Environ 80% du chiffre d’affaires des entreprises françaises est réalisé à l’international, et la majorité est libellée en euros. Les devises restent une source de volatilité importante, mais nous préférons voir ces variations de cours comme une source d’opportunité plutôt qu’une menace.
Sur le long terme, l’évolution des devises suit les taux de change effectifs réels et la « juste valeur » de l’euro sera un élément central de l’analyse. L’euro devrait peu bouger suite à une victoire d’Emmanuel Macron. En revanche, une victoire de son opposante pourrait engager la France dans une sortie de la zone euro (en supposant qu’un référendum confirme ce choix), ce qui nous amènerait à revoir nos hypothèses de juste valeur pour les devises européennes.
Notre évaluation
L’issue des événements politiques est souvent binaire et imprévisible. Nous conservons donc nos estimations déjà très conservatrices de la juste valeur à long terme des classes d’actifs tout en maintenant un degré de diversification important au sein de nos portefeuilles. Notre cadre d’analyse exige de notre part une grande discipline qui nous aide – et nous a conduit à être positionnés de manière prudente. Plus spécifiquement, le prix des obligations et des actions européennes est bien supérieur à nos estimations de juste valeur. Nous continuons de voir des poches d’opportunités dans certains pays et secteurs européens et l’élection française ne devrait pas nous conduire à revoir nos positions à moins que des variations de prix significatives fassent émerger de nouvelles opportunités contrariantes. Il en va de même concernant notre estimation de la juste valeur de l’euro. Le degré d’attractivité de cette devise relativement aux autres devises que nous analysons reste modéré. Par ailleurs sur une base ajustée du risque, l’euro ne nous semble pas particulièrement intéressant. .
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