Depuis 2007, les investisseurs européens ont largement privilégié le style de gestion « Growth » (croissance) au détriment des fonds « value ».
L’analyse des données Morningstar sur les fonds de grandes capitalisations investis dans quatre zones géographiques (monde, Europe, Royaume-Uni, Etats-Unis) fait apparaître une certaine volatilité de la collecte vers le style « Value » alors que le style « Growth » montre plus de constance entre 2007 et 2013 avant d’évoluer dans le rouge en 2014 et en 2016.
Ainsi alors qu’en 2008, année de la crise financière globale marquée par la faillite de Lehman Brothers, le style « Value » subissait une décollecte de 3,5 milliards d’euros, le style « Growth » recueillait 2 milliards d’euros.
L’analyse par zones géographiques montre que ce sont les fonds spécialisés dans les actions mondiales et américaines qui ont collecté le plus fortement (respectivement 1,4 et 2 milliards d’euros) contrebalançant les sorties des fonds d’actions européennes (1 milliard) et britanniques (335 millions).
Du côté du style « Value », l’année 2008 est marquée notamment par 4 milliards de sorties de capitaux des fonds actions européennes et de 789 millions de sorties des fonds d’actions mondiales, quand les fonds actions britanniques et américaines ont reçu respectivement 367 et 994 millions d’euros de capitaux.
Evolution des flux vers les styles Croissance et Value en Europe (2007-2016)
Source : Morningstar Direct
Plus récemment, l’année 2016 semble marquer un changement de fortune pour les fonds « Value », puisque ces derniers n’ont subi « que » 1 milliard d’euros de sorties, concentrées sur les actions européennes et britanniques (524 et 415 millions d’euros respectivement) quand le style « Croissance » a enregistré 10,5 milliards de sorties, principalement sur les actions américaines (6,9 milliards) et mondiales (1,9 milliard), mais aussi européennes (1,3 milliard).
Ce revirement de tendance, qui doit encore se confirmer en 2017, semble refléter le mouvement de rotation sectoriel observé sur les marchés financiers à partir de l’été 2016.
La remontée des taux d’intérêt et la bonne tenue de la croissance économique ont enclenché une réappréciation des valeurs cycliques (industrie, financières) au détriment des valeurs plus défensives. Ces dernières, après plusieurs années de surperformance, affichaient en effet des primes de valorisation historiquement élevées.
Source : Morgan Stanley
Le début de l’année 2017 semble poursuivre ce que l’on a observé en 2016, avec un bémol : si les fonds privilégiant le style « Croissance » souffrent (3,5 milliards de décollecte en quatre mois), le style « Value » est lui aussi délaissé (735 millions de décollecte).
Cette tendance à la décollecte dans les gestions actives contraste avec l’évolution des flux dans la gestion passive. Les ETF « Value » et « Growth » dont les flux sont suivis par Morningstar depuis 2008 montrent une nette préférence des investisseurs pour les indices « Value », avec des collectes particulièrement bien orientées depuis l’an dernier (graphique).
Source : Morningstar Direct
Cette préférence pour la gestion passive s’inscrit dans une tendance de fond. Les gérants actifs ayant de plus en plus de mal à justifier des frais de gestion parfois excessifs au regard de performances souvent décevantes. Ceci conduit un nombre croissant d’investisseurs à privilégier l’investissement dans des indices ou des stratégies de type « stratégique béta » pour capter des facteurs de performance spécifiques, tel que le style de gestion.
Ce mouvement ne semble pas près de s’arrêter et pourrait contribuer à la performance décevante de la collecte des gérants actifs ayant un biais value ou growth en Europe, même si le style « value » revient sur le devant de la scène, mais par ce qui est encore la petite porte.