L’engouement pour la gestion ESG est notoire, mais il est plus le fait de l’industrie qui tente de capter des encours sur une thématique à la mode qu’aux besoins des investisseurs. Car dans des marchés difficiles, la thématique ESG a fait beaucoup moins bien que par le passé.
En effet, après une nette accélération de la collecte en 2017, 2018 fait un peu office d’année sans : la collecte atteint 8,1 milliards d’euros. C’est bien, mais comparé aux 34,3 milliards de 2017, aux 30,3 milliards de 2016 ou aux 20,4 milliards de 2015, c’est très peu, en particulier au cours d’une année où l’on n’a jamais autant entendu parler d’enjeux liés au changement climatique et à la transition énergétique.
Cette chute de la collecte intervient alors que le nombre de fonds « ESG » lancé ne cesse de croître (graphique).
Source : Morningstar Direct
Fin 2018, on dénombrait 1134 fonds agréés à la vente en France (base : part la plus ancienne), avec 83 lancements pour la seule année 2018 – un record.
Source : Morningstar Direct
Cette innovation forcenée pour convertir leur gamme ou lancer des produits qui répondent à la demande – parfois bien réelle – des investisseurs pour des produits plus respectueux de l’environnement, des relations sociales ou promouvant une meilleure gouvernance des entreprises, s’est trouvée confrontée à une conjoncture défavorable (baisse des marchés financiers en 2018).
2018 a vu les lignes bouger de manière significative entre sociétés de gestion si l’on se focalise sur la collecte.
Pour les fonds qui se revendiquent comme « socialement responsables » agréés à la vente en France (sachant que leur collecte n’est pas uniquement hexagonale), la palme de la collecte est revenue l’an dernier à Morgan Stanley (3,2 milliards de collecte), devant BNP Paribas (2,7 milliards), Vontobel (1,7 milliard), Comgest (1,08 milliard) et Degroof Petercam (1 milliard).
A l’inverse, ceux qui ont le plus perdu sont Nordea (-3,6 milliards d’euros), JPMorgan (-1,8 milliard), Ecofi (-1,6 milliard), AXA (-1,17 milliard), Schroders (-808 millions) et Robeco (-800 millions).
A noter la percée en France de First State, qui est passé d’une décollecte de 1,47 milliard d’euros en 2017 à une collecte de 326 millions l’an dernier et d’OFI qui est également passé d’une décollecte de 799 millions d’euros à une collecte de 647 millions.
Robeco a pour sa part fait le chemin inverse, passant d’une collecte de 3,19 milliards en 2017 à une décollecte de 800 millions en 2018, devant Nordea passé d’une collecte de 231 millions en 2017 à une décollecte de 3,6 milliards en 2018.
Il faut noter que ces changements de direction sont parfois le fait de quelques fonds. La performance des équipes de gestion n’a généralement pas la seule raison qui explique ces changements de fortune : la taille du fonds au regard de la stratégie conduite, l’évolution des marchés déjà évoquée, les changements qui peuvent intervenir dans une équipe de gestion ou d’autres éléments (fermeture d’un fonds) peuvent aussi contribuer à de telles variations de la collecte.
2018 a surtout confirmé que l’investissement responsable prend de plus en plus de place dans l’univers de la gestion collective. Au regard des fonds commercialisés en France, cette approche représente aujourd’hui 441 milliards d’euros – un montant loin d’être négligeable et qui permet de comprendre l’engouement des sociétés de gestion.