Reconnaissons-le d’entrée de jeu. A voir l’historique des 20 dernières années (graphique), il est difficile de voir comment les marchés actions européens vont pouvoir faire mieux que le marché américain sur une longue période.
Source : Morningstar Direct
Pourtant, aux dires de certains brokers (fin mai), il a suffi que les indices européens ne sous-performent ( !) que de 1% depuis le début de l’année pour que certains se demandent si l’on ne va pas assister à un revirement de tendance…
Or depuis, l’écart s’est de nouveau creusé : l’indice Morningstar Europe affiche un gain annuel de 12% contre 17,8% pour l’indice Morningstar US Market.
Les raisons de la sous-performance de l’Europe ont déjà été largement exposées ici : des biais sectoriels marqués (plutôt « value » en Europe, plutôt « croissance » aux Etats-Unis avec le poids prépondérant du secteur technologique – cf graphiques infra), un rebond des profits bien plus rapide aux Etats-Unis qu’en Europe après la crise financière de 2008, une rentabilité des entreprises américaines structurellement supérieure (grâce à une croissance plus dynamique notamment), et bien sûr le recours au levier pour financer des rachats d’actions outre-Atlantique, lequel a grandement contribué à la surperformance des actions américaines.
L’Europe se traite aujourd’hui avec une décote de 17% par rapport au marché américain, mais la moitié de cette décote serait due aux biais sectoriels. En outre, si l’on considère le ratio du P/E à la croissance attendu des résultats (PEG), l’Europe se traite plutôt avec une prime de valorisation.
Si l’on prend une vue plus macro, les tensions commerciales avec la Chine et l’accumulation de déficits jumeaux (déficit public et de la balance commerciale) devraient contribuer à un ralentissement beaucoup plus fort de l’économie américaine qu’en zone euro, tandis que l’inflation devrait se stabiliser à un niveau relativement élevé outre-Atlantique.
Source : Goldman Sachs
Dans ce contexte, l’Europe peut-elle réellement rebondir et profiter de l’environnement d’incertitude actuel ?
Une étude Goldman Sachs publiée fin mai dernier tend à montrer que les actions européennes sont relativement exposées au commerce mondial (graphique), et donc qu’elles ne sortiraient pas plus indemnes que les actions américaines d’une escalade de la guerre commerciale actuelle.
Source : Goldman Sachs
L’environnement qui serait le plus favorable aux actions européennes serait en fait celui d’une croissance plus rapide de l’économie, peu inflationniste avec une disparition ou une réduction très sensible du risque politique (Brexit), et un environnement réglementaire plus favorable aux entreprises, et en particulier aux secteurs les plus fortement régulés (services financiers, télécommunications, services collectifs).
Le secteur bancaire, en particulier, serait l’un des moteurs centraux d’une surperformance des actions européennes. Pour que cela arrive, il faudra avant tout que les taux d’intérêt remontent de manière plus durable (cf notre analyse du secteur publiée fin 2018).
Et même si surperformance il devait y avoir, l'histoire montre que ces phases sont généralement de courte durée (graphique).
Source: Goldman Sachs
Or à voir l’environnement actuel, les politiques monétaires toujours très accommodantes et le stock de dette offrant un rendement négatif (11,2 billions d’euros selon le dernier pointage de JPMorgan), un tel scénario semble encore lointain.
Source : JPMorgan
Exposition sectoriel des marchés actions européen et américain
Source : Morningstar Direct