L’environnement de marché actuel vous rend nerveux ? Vous n’êtes pas le seul.
Outre les pertes humaines dues à la pandémie de Covid-19, les incertitudes financières sont légion. Le 31 mars, le marché affichait une baisse de 23,5% par rapport à son sommet du 20 février ; la volatilité a quant à elle atteint des niveaux sans précédent depuis la crise financière mondiale.
Les perspectives économiques sont tout aussi incertaines, certains experts tablant sur un recul modéré du produit intérieur brut, tandis que d'autres prédisent des récessions bien plus catastrophiques.
Privés de tout repère, les investisseurs fébriles pourraient être tentés d'abandonner leurs placements et de chercher refuge dans les liquidités. Céder ainsi le contrôle à leurs émotions serait probablement une erreur.
Plutôt que de prendre des décisions radicales et précipitées, ils gagneraient à réduire le risque de leur portefeuille en s’en tenant à quelques mesures simples :
1. suivre leur plan d’investissement (ou en établir un) ;
2. vérifier les sources de risque au sein de leur portefeuille ;
3. maîtriser ce qui peut l’être.
Suivre son plan d’investissement (ou en établir un)
Un plan à long terme contribue de manière décisive à améliorer vos chances de réussite dans la durée. Si, avant la crise, votre allocation cible associait déjà actions, obligations et liquidités, il n’y a pas de raison de procéder à des changements majeurs sur la base des événements récents.
(Une exception toutefois : si vous craignez pour votre emploi à court terme, il pourrait être utile de prévoir un volant de liquidités légèrement supérieur à la normale, susceptible de couvrir vos dépenses sur 12 mois plutôt que les 6 habituellement recommandés.)
Globalement, votre mix devrait refléter vos objectifs et besoins personnels (y compris votre horizon d’investissement, votre tolérance au risque, etc.) plutôt que les anticipations à court terme du marché.
Même les investisseurs institutionnels qui tentent de mettre en œuvre des allocations d'actifs tactiques (en naviguant entre les actions et les obligations selon l'évolution de leurs perspectives économiques ou d'autres facteurs) échouent quasiment tous à en faire une stratégie efficace.
Le risque de vendre alors que les actions ont déjà perdu du terrain se traduit par des rendements inférieurs et la possibilité de rater la reprise lorsqu’elle se produira.
Or, nous avons déjà assisté à quelques séances plus favorables depuis le point bas à court terme du marché le 23 mars. Passer à côté ne serait-ce que de quelques séances positives peut nuire considérablement aux rendements dans la durée.
Pour conserver une allocation d'actifs conforme à votre plan, vous pourriez même devoir rééquilibrer votre portefeuille en faveur des actions, à présent que la valeur de celles-ci a chuté.
Dans l’hypothèse où vous aviez commencé l’année avec un mix actions/obligations de 60/40, la répartition est probablement plus proche de 55/45 à ce stade.
Nous conseillons généralement aux investisseurs de rééquilibrer leur portefeuille au moins une fois par an, ou bien lorsqu’une classe d'actifs s’est nettement écartée, à la hausse ou à la baisse, du niveau cible. Un écart de plus de 5 % par rapport au niveau cible constitue un bon repère pour rééquilibrer son portefeuille.
Cela est bien sûr plus facile à dire qu’à faire, mais la plupart des recherches universitaires concluent que le rééquilibrage d'un portefeuille tend à réduire le niveau de risque dans la durée, et peut aussi améliorer les rendements en contraignant l’investisseur à acheter bon marché et vendre à prix élevé après une nette évolution du marché.
Effectuer un suivi des sources majeures de risque
Grâce au Gestionnaire de portefeuille Morningstar, vous pouvez obtenir une vue détaillée de la diversification et du profil de risque de votre portefeuille en utilisant l’outil X-Ray qui analyse la concentration des actions, l’exposition sectorielle, la qualité de crédit et le risque de taux d’intérêt. Voici comment aborder ces facteurs de risque potentiels.
Concentration des positions sur les actions
En règle générale, toute exposition à une action particulière devrait représenter moins de 10 % de l’ensemble de vos actifs, notamment s’il s'agit d’une action émise par votre employeur.
Si une partie de votre rémunération se compose de stocks options ou d'actions gratuites, votre exposition aux actions a pu fortement augmenter au fil du temps. Il peut alors être difficile d’en réduire l'ampleur sans réaliser d’importantes plus-values imposables.
Un aspect positif de la récente chute des marchés est que toute plus-value latente antérieure à ce repli a probablement diminué.
C’est là l’occasion d’alléger vos positions à moindres frais d'un point de vue fiscal. Vous pouvez aussi opter pour une réalisation échelonnée de vos plus-values de façon à éviter de vous retrouver dans une tranche d'imposition supérieure. (Consultez un conseiller fiscal pour obtenir davantage de précisions sur votre situation personnelle.)
Concentration de l’exposition sectorielle
Il vaut également la peine de vérifier l’exposition sectorielle de votre portefeuille afin de vous assurer de l’absence de tout excès.
Vous pouvez aussi comparer chacune de vos pondérations sectorielles à celle d’un indice de référence du marché.
S’il s'avère que votre exposition à un secteur est bien supérieure ou inférieure à celle de l’indice, réfléchissez à l’ajuster.
La récente chute des marchés a vu des secteurs comme l’énergie et la finance décrocher fortement, tandis que les valeurs défensives de la santé, des technologies et de la consommation ont un peu mieux résisté.
Qualité de crédit
La qualité de crédit représente un autre risque potentiel qu’il convient de surveiller s'agissant des positions en obligations. L’inquiétude des investisseurs quant à l'impact économique de la crise du coronavirus a nettement pénalisé les obligations à haut rendement.
La baisse des prix de ces titres a été amplifiée par des problèmes de liquidité, les gérants de fonds d’obligations à haut rendement ayant été contraints de vendre à prix cassés pour pouvoir satisfaire les demandes de rachat des investisseurs.
Dans ce contexte, le fonds moyen d’obligations à haut rendement a perdu 12,7% au premier trimestre 2020. Les obligations municipales de moindre qualité ont également été très affectées.
L’avantage de ces pertes est que les écarts de crédit ont augmenté, ce qui signifie que les investisseurs sont mieux rémunérés pour le risque de crédit qu’ils encourent.
Toutefois, les obligations à haut rendement sont traditionnellement plus volatiles que d'autres titres à revenu fixe, et accusent généralement des pertes supérieures durant les phases de ralentissement économique.
En cas de récession sévère et/ou prolongée, la qualité de crédit des obligations d’entreprise continuerait de se dégrader, ce qui, à son tour, renforcerait le risque de défaut de ces titres.
Les investisseurs réfractaires au risque auraient probablement intérêt à privilégier les obligations de catégorie « investment grade », qu’il s'agisse d’obligations d’entreprise, de bons du Trésor ou de titres adossés à des emprunts hypothécaires.
Risque de taux d’intérêt
Après les récentes baisses de taux de la Réserve fédérale, les taux d’intérêt sont encore plus faibles et les obligations d'échéance longue ont connu une reprise.
La catégorie Morningstar des fonds d’emprunts d’État à long terme a ainsi enregistré une performance totale de 20,5% au premier trimestre 2020.
Néanmoins, la sensibilité aux taux d’intérêt fonctionne dans les deux sens. Les obligations d’État à long terme ont subi des pertes trimestrielles de 13% ou plus en phase de redressement des taux d’intérêt.
Cette volatilité en fait des instruments difficiles à manier dans les portefeuilles. Même si les taux d’intérêt ne sont probablement pas près d'augmenter, la plupart des investisseurs préféreront sans doute se concentrer sur des fonds d'obligations à court et moyen terme dans le cadre de leurs positions en instruments à revenu fixe.
Maîtriser ce qui peut l’être
Dans le contexte actuel d’incertitudes généralisées, il est facile de se laisser emporter dans une spirale sans fin de conjectures : et si le taux de mortalité était supérieur à ce prédisent les experts ?
Et si l'économie restait à la peine durant des années ? Et si le marché mettait très longtemps à se rétablir ?
La liste est longue, et s’il s'agit de questions importantes, personne n'a pour l’instant de réponse à aucune d’entre elles.
Plutôt que de vous laisser submerger par l'angoisse financière, il vaut mieux réfléchir à ce sur quoi vous pouvez exercer un contrôle.
Il existe un certain nombre de mesures faciles à prendre – par exemple, augmenter les contributions à votre plan d'épargne retraite, ou bien limiter provisoirement vos retraits si vous êtes déjà à la retraite – et qui peuvent améliorer votre situation à long terme tout en vous donnant l'impression d’être davantage maître des événements.
Conclusion
Lorsque l’incertitude règne, l’envie d'agir peut être forte. Cette propension à l’action s’intensifie en période de chute des marchés, les investisseurs étant tentés de modifier radicalement leur portefeuille pour limiter les pertes.
Dans la période très incertaine que nous connaissons actuellement, il est toutefois préférable d'avancer à pas mesurés que de prendre de grandes décisions qui risquent de se révéler contreproductives.