Après un rebond rebond aussi rapide et significatif que la chute, de quoi les actions européennes ont-elles besoin pour continuer sur leur lancée ? N'y a-t-il pas de risque d'une correction à court terme si les moteurs de la hausse devaient s'épuiser ?
Certains observateurs considèrent du coup que la poursuite de la hausse dépendra davantage de facteurs techniques (évolution des indicateurs avancés type PMI, déclarations de la BCE et de la Fed, plan de relance européen, flux vers les actions européennes) et surtout d'un arrêt de la détérioration des fondamentaux et de la confirmation d'un scénario de reprise en "V".
Ce scénario, très attendu, ne devrait se concrétiser qu'à partir du troisième trimestre de cette année.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y a plus d'opportunités en Europe - au contraire, le contexte devrait permettre aux meilleurs gérants actifs de faire la démonstration de leur capacité à créer de la valeur pour leurs clients et de justifier ainsi les frais, souvent élevés, qu'un certain nombre pratique.
Mais pour s'exposer à la classe d'actifs, il faut regarder du côté des facteurs plus "techniques", dont la lecture peut s'avérer plus difficile que celle des seuls fondamentaux.
Retour en arrière. Fin 2019, le multiple de valorisation du marché européen (P/E) était de 15,4x, et les analystes tablaient sur des profits à 12 mois de 27,20 euros, ce qui se reflétait dans le niveau de l'indice européen (Stoxx Europe 600), qui cotait alors 420 points environ.
En cinq semaines, le marché européen va plonger de 32%, le multiple de valorisation va tomber à 11,5x (-27%) et les prévisions de résultat à 12 mois vont être revues en baisse de 11%.
Evolution de l'indice Stoxx Europe 600 (bleu), estimations de bénéfice à 12 mois et valorisation (P/E)
Source : Factset, données au 12 juin 2020 (base hebdomadaire)
Les plans de soutiens à l'économie lancés dans les pays de l'Union européenne, l'expansion du bilan de la BCE et dernièrement le plan de relance européen, conjugués à la décrue de l'épidémie et au déconfinement progressif ont alimenté le vif rebond des marchés.
Alors que les estimations de résultats continuaient d'être revues à la baisse (autour de 19,50 euros actuellement), la hausse des actions européennes a entraîné une envolée du P/E du marché, aujourd'hui un écart-type au-dessus de sa moyenne historique.
Au cours actuel, les actions européennes semblent relativement proches de leur juste valeur, de l'avis de nombreux observateurs.
Le seul argument qui peut aujourd'hui pousser un investisseur à s'exposer à la classe d'actifs consiste à raisonner en "relatif", c'est-à-dire par rapport à ce que rapportent les obligations.
Le rendement à 10 ans des obligations en zone euro est de -0,3% environ, quand celui des actions est de 3,2%.
Un autre élément peut alimenter une poursuite de la hausse: les flux. Par le passé, le regain d'intérêt de la part des investisseurs étrangers, en particulier nord-américains, a joué un rôle non négligeable et parfois déterminant dans la surperformance de la classe d'actifs.
Les stratégistes d'UBS observaient dans une note en date du 15 juin que l'Europe ne représente plus que 19% du MSCI World contre 66% pour les Etats-Unis. Avant la crise financière de 2008, cette répartition était de 32% et 49% respectivement.
La dernière enquête de Bank of America Securities auprès des investisseurs institutionnels, publiée ce mardi 16 juin, montre un retour de l'Europe dans les portefeuilles.
Source : Bank of America Securities
La remontée des indicateurs avancés de production, qui a contribué, avec le reflux de l'épidémie de Covid-19, de catalyseur au rebond des actions européennes depuis fin mars, pourrait encore alimenter une hausse à un chiffre des Bourses européennes, si ces indicateurs passaient au-dessus du seuil de 50, qui indique une expansion de l'économie (ceux de juin seront publiés le 23).
Ces éléments seront-ils suffisants pour soutenir les marchés actions européens d'ici l'automne, au moment où les publications du troisième trimestre commenceront à tomber ?
Tout dépendra vraisemblablement de l'évolution de l'épidémie, de l'impact des mesures de relance et du facteur de soutien psychologique numéro un sur les marchés depuis la crise de 2008: l'action des banques centrales.