Le promoteur immobilier chinois Evergrande Group, en grande difficulté financière, va-t-il provoquer une risque systémique qui pourrait mettre à mal l’ensemble des marchés financiers de la planète ?
Cette question émerge depuis quelques jours, alors que les autorités chinoises semblent vouloir mettre au pas le secteur de la promotion immobilière et poursuivre une politique forçant les agents économiques à se désendetter, au prix d’un ralentissement assumé de la croissance économique.
Au-delà les conséquences de la crise de la COVID-19, qui a ressurgi avec le variant Delta, ou des pénuries de semi-conducteurs qui pèsent sur l’activité manufacturière, marché immobilier chinois s’est sensiblement contracté au cours des derniers mois.
Le cours des principaux promoteurs immobiliers est sous pression et la recherche de fonds sur les marchés financiers semble de plus en plus difficile à mener. Les émissions d’obligations du secteur ont chuté de 22% en juillet et de 70% en août (marché « onshore »), tandis que les prêts hypothécaires ont plongé de respectivement 35% et 24%.
« Les dernières nouvelles concernant Evergrand suggère probablement que l’activité immobilière pourrait continuer de se détériorer en l’absence d’une politique claire du gouvernement concernant la résolution des difficultés du promoteur », observent les économistes de Goldman Sachs, dans une note en date du 19 septembre.
Marchés sous pression
Tout ceci pèse sur la Bourse chinoise, et certains observateurs s’interrogent sur les répercussions au-delà de la Chine, à l'instar de la chute de la banque d'affaires Lehman Brothers en septembre 2008.
Pourquoi ? De par son poids sur le marché immobilier chinois et la taille de son endettement, une faillite d’Evergrande pourrait avoir des conséquences fâcheuses pour l’économie chinoise, mais pas ingérables.
Evergrande est à la fois d’une taille significative (2% du PIB chinois) et d’une grande complexité (plus de 200 filiales « offshore » et près de 2000 filiales « onshore » totalement ou partiellement contrôlées).
Toutefois, la société représente 4% des ventes immobilières en Chine, mais emploie 123.000 salariés et fait travailler 3,8 millions d’entreprises (sur une population active de plus de 400 millions de personnes).
Comparaison exagérée
Comparer le cas Evergrande avec la banque d'affaires américaine semble toutefois exagéré.
Lehman a été emportée par l'effondrement du marché immobilier mais également par une mauvaise gestion de son bilan.
En outre, la chute de la banque américaine a eu des répercussions mondiales parce que les prêts immobiliers de mauvaise qualité avaient été recombinés dans des instruments financiers vendus à travers le monde.
Du jour au lendemain, des investisseurs découvraient que certains des fonds dans lesquels ils étaient investis détenaient des produits exposés au marché immobilier américain.
La situation d'Evergrande ne semble pas de même nature à ce stade et ne concerne, a priori, que le système financier chinois.
Risque de contagion
Evergrande n’a donc pas de dimension systémique en soi. Mais le problème, dans ce genre de situation, vient d’un effet de contagion. Dans l’éventualité d’un défaut du promoteur, les conséquences sur l’ensemble du système financier chinois et l’économie réelle ne seraient pas nulles.
Les cours des principaux promoteurs, des banques et des compagnies d’assurance chinoises ont déjà fortement pâti de cette situation.
L’immobilier représente en effet 40% des actifs détenus par des ménages chinois et les relations avec le système bancaire sont profondes (40% des prêts consentis sont nantis par des biens immobiliers).
Dans le pire des scénario (poursuite de la chute du marché immobilier de 30% et recul des prix immobiliers jusqu’en 2022), l’impact sur l’économie chinois pourrait atteindre 410 points de base de PIB selon Goldman Sachs.
Communication attendue
Dans un contexte de plus en plus tendu, les autorités chinoises ne peuvent pas faire la sourde oreille.
Les investisseurs attendent une communication claire sur un plan permettant de contenir le risque Evergrande en cas de défaut, et permettre ainsi un retour de la confiance qui rassurerait ses employés, ses fournisseurs et clients, ainsi que le système bancaire et les compagnies d’assurance.
Pour Goldman Sachs, il y a une opportunité pour les autorités chinoises de desserrer un peu leur politique financière restrictive et éviter un recul trop marqué de la croissance au cours du quatrième trimestre.
S’offre également à elles la possibilité d’étendre la période qui permettrait une poursuite du désendettement des agents économiques.
Une volonté trop inflexible dans ce domaine pourrait mettre à mal la croissance économique du pays, alors que ce dernier a joué un rôle crucial dans la reprise de l’économie mondiale.
A défaut d’une action plus efficace, le problème de l’endettement de la Chine aura plus tendance à croître qu’à reculer.
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