EDF : l’offre de l’Etat est acceptable

L'Etat ne doit racheter effectivement que 5,9% du capital pour pouvoir opérer à un retrait de la Bourse.

Tancrede Fulop 19.07.2022
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Le gouvernement français a annoncé le 19 juillet qu'il lancerait une offre publique d'achat sur les actionnaires minoritaires d’EDF (« No Moat ») au prix de 12 euros par action, coupon compris.

L'offre sera lancée début septembre après le vote d'un projet de loi de finances dédié.

EDF a mis en place un comité ad hoc qui proposera un expert indépendant au conseil d'administration.

Sur la base des travaux de ce dernier, le comité émettra une recommandation sur l'intérêt de l'offre.

Selon la loi française, si l'investisseur qui lance l'OPA parvient à obtenir 90% des actions, les 10% d'actionnaires restants sont contraints d'apporter leurs actions au même prix.

Un enjeu limité

Cela signifie que le gouvernement n'aura besoin d'acquérir que 5,9 % des actions pour réussir, ce qui semble faisable.

En conséquence, nous relevons notre estimation de juste valeur à 12 euros.

Le cours de bourse d'EDF est en hausse de 15 % à 11,8 euros à l'heure où nous écrivons, suggérant un potentiel de hausse limité.

Le cas du gouvernement détenant plus de 80% des actions d'EDF tout en fixant les prix de l'électricité est unique en Europe, il n'y a donc pas de lecture croisée pour les autres fournisseurs d’énergie en Europe.

Offre attrayante

L'offre publique nous semble intéressante.

Le prix de 12 euros implique une hausse de 53% par rapport au cours de l'action du 5 juillet, la veille de l'annonce par la Première ministre française Elisabeth Borne de la volonté du gouvernement de racheter les actionnaires minoritaires.

Comme nous l'avons déjà écrit, nous avons implicitement inclus une prime de déremboursement dans notre précédente estimation de juste valeur de 8,80 euros en n'intégrant pas l'impact financier de la dernière réduction des perspectives de production nucléaire française 2022 communiquée en mai dernier.

Cependant, notre estimation de la juste valeur de 8,80 euros incluait l'impact financier des mesures sévères imposées par le gouvernement pour maîtriser les tarifs de l'électricité en 2022.

Pour éviter les conflits d'intérêts, il est juste d'exclure l'impact de ces mesures du prix de l'offre publique d'achat. Cela indique une estimation de la juste valeur de 8,90 euros, basée sur les prévisions financières de mai dernier et de 6,60 euros sur une base de marché.

L'offre publique implique une prime de 35% sur le premier et de 82% sur le second.

L'Etat français va dépenser 9,7 milliards d'euros pour racheter les actionnaires minoritaires et les détenteurs d'obligations convertibles.

Cela correspond aux 10 milliards d'euros rapportés par Reuters le 12 juillet.

Nous avons ensuite calculé que les 10 milliards d'euros impliqueraient une offre publique d'achat de 13,5 euros par action.

La décote des 12 EUR réels par rapport à notre estimation de 13,5 EUR s'explique par le fait que le prix de l'offre sera plus élevé pour les détenteurs d'obligations convertibles à 15,64 EUR afin de leur offrir la même prime que les actionnaires.

De même, le taux de conversion de ceux-ci sera amélioré.

Désalignement d’intérêts

La société n'a pas pu rester cotée en raison d'un désalignement des intérêts entre le gouvernement français et les actionnaires minoritaires.

Les mesures agressives du gouvernement français pour limiter les hausses tarifaires et la position vendeuse massive induite par les arrêts de production alors que les prix de l'électricité explosent, ont fortement affaibli EDF alors que les besoins d'investissement restent très élevés.

Si les prix à terme actuels de l'électricité persistent, la dette nette pourrait augmenter de 21 milliards d'euros pour atteindre 64 milliards d'euros fin 2022 selon nos estimations.

En conséquence, le ratio dette nette/EBITDA serait resté supérieur à 3 fois dans les années à venir alors que le groupe vise un niveau de 3 fois dès 2023.

Cela aurait ainsi obligé EDF à se tourner à nouveau vers le marché actions alors que la dernière augmentation de capital avait été réalisée en mai.

Cela aurait nécessité une décote importante à notre avis.

 

© Morningstar, 2022 - L'information contenue dans ce document est à vocation pédagogique et fournie à titre d'information UNIQUEMENT. Il n'a pas vocation et ne devrait pas être considéré comme une invitation ou un encouragement à acheter ou vendre les titres cités. Tout commentaire relève de l'opinion de son auteur et ne devrait pas être considéré comme une recommandation personnalisée. L'information de ce document ne devrait pas être l'unique source conduisant à prendre une décision d'investissement. Veillez à contacter un conseiller financier ou un professionnel de la finance avant de prendre toute décision d'investissement.

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A propos de l'auteur

Tancrede Fulop  est analyste actions chez Morningstar.