Les déboires de plusieurs promoteurs font chanceler l'immobilier chinois

Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour l'économie chinoise.

Agefi/Dow Jones 19.07.2023
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Crédit photo : AP

PARIS (Agefi-Dow Jones)--Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour l'économie chinoise. Des signes récents de faiblesse chez de grands promoteurs immobiliers font craindre une amplification de la crise du secteur, alors même que la croissance économique a décéléré en Chine au deuxième trimestre, sur fond de baisse de la confiance des consommateurs. Une peur de l'avenir déjà en partie liée à l'immobilier.

La plus forte inquiétude des investisseurs concerne Evergrande, l'ancien numéro un du secteur, qui voit son avenir compromis. La société a publié lundi, en retard, des résultats catastrophiques pour les deux dernières années. Le compte de résultat est ressorti négatif pour 2021 et 2022, avec une perte cumulée sur les deux exercices comptables de 582 milliards de yuans (72 milliards d'euros).

Son immense dette, qui lui a valu de faire défaut fin 2021, a grossi de 40 milliards de dollars l'année dernière et atteint désormais environ 340 milliards de dollars, selon ses comptes. Le groupe, qui suit un plan de restructuration, a précisé qu'il cherchait à organiser la semaine prochaine une rencontre avec ses créanciers. Si des discussions ont lieu, elles devront se faire sur la base de la bonne foi des dirigeants d'Evergrande. L'un des auditeurs du promoteur, Prism Hong Kong, a déclaré qu'il ne pouvait pas commenter les états financiers, car il n'était pas en mesure d'obtenir des éléments probants suffisants concernant la capacité du groupe à respecter ses obligations financières...

Evergrande n'est pas le seul promoteur à souffrir. L'un des derniers piliers du secteur, Dalian Wanda Group, se fissure à son tour. Sa filiale de gestion immobilière a récemment informé ses créanciers qu'elle cherchait 200 millions de dollars pour rembourser une obligation de 400 millions de dollars qui arrive à échéance dimanche 23 juillet, selon l'agence de presse Bloomberg. Le plus important promoteur d'immobilier commercial du pays, qui n'a jusqu'ici jamais montré le moindre signe de difficultés financières, avait été le premier à émettre des obligations en dollars depuis le défaut d'Evergrande fin 2021.

Dans le même temps, la cotation d'un titre obligataire de la société cotée Sino-Ocean Group Holding, en partie détenue par l'Etat, a été suspendue lundi en raison de risques de non-paiement. Le nominal, dû pour le 2 août prochain, représente 2 milliards de yuans. L'action a perdu un peu plus de 10% mardi à la Bourse de Hong Kong, avant de regagner 1,3% mercredi.

La pierre ne rassure plus les ménages chinois

Ces informations sont venues s'ajouter aux mauvais chiffres nationaux sur le secteur immobilier publiés ces derniers jours par le Bureau chinois des statistiques. Les investissements dans le développement immobilier ont chuté de 7,9% au premier semestre, et l'évolution des prix depuis le début de l'année dans la pierre, tant dans le résidentiel que dans le commercial, est en chute dans de nombreuses villes moyennes du pays. Les mégalopoles, comme Shanghaï et Beijing, sont pour l'instant épargnées par ce mouvement.

La mauvaise santé de l'immobilier risque donc de contrarier un peu plus les espoirs d'une croissance annuelle de l'économie à 5% en 2023, comme prévu par le gouvernement chinois. A côté des aides ciblées aux consommateurs et au secteur privé pour soutenir l'économie en général, l'Etat central va devoir trouver des mesures adéquates pour insuffler à nouveau de la confiance aux consommateurs et aux entreprises spécifiquement sur l'immobilier, tout en soulageant la trésorerie des promoteurs, et ce sans trop creuser sa dette.

"Le gouvernement pourrait déployer davantage de mesures de financement pour les grands promoteurs, afin d'éviter une crise systémique de la dette. Cependant, la stabilisation de la demande s'avère difficile, car les ménages ne perçoivent plus l'immobilier comme un investissement sûr", analyse Michelle Lam, économiste pour la Chine chez Société Générale CIB.

Pour parer cet amoindrissement de la confiance des acheteurs, les économistes estiment qu'une baisse des taux d'intérêt hypothécaires et du ratio réglementaire de l'apport sur le prix du bien seront aussi nécessaires pour enrayer le ralentissement des ventes. Du côté de l'offre, les promoteurs pourraient être aidés par une baisse modérée des taux directeurs de la Banque populaire de Chine (PBOC) en 2023 et/ou en 2024. Les banques, qui devraient enregistrer une hausse des créances douteuses, pourraient aussi obtenir un assouplissement du côté des ratios prudentiels.

"Si nous pensons qu'il est judicieux de ne pas résoudre les problèmes structurels avec une nouvelle bulle de crédit (sur le logement ou les infrastructures), être trop prudent risque également de provoquer davantage de pressions cycliques à la baisse qui pourraient plonger la Chine dans une déflation durable", prévient Michelle Lam.

-Jean-Loup Thiébaut, L'Agefi ed: VLV

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(END) Dow Jones Newswires

 

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A propos de l'auteur

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