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PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'annonce était attendue depuis longtemps.
Les acteurs traditionnels du titre restaurant se préparent à la fin du papier depuis 2014, date du décret instaurant l'ouverture du cadre réglementaire à la dématérialisation.
Actuellement, environ 40% des titres restaurant perdurent sous format papier, le reste est déjà dématérialisé, sous forme de carte de paiement ou d'application mobile. Le nombre de salariés bénéficiaires approche les 6 millions désormais.
Olivia Grégoire, la ministre chargée des PME, a donc fixé à "avant 2026" la fin du titre restaurant papier et la bascule complète vers la dématérialisation.
Pour Loïc Soubeyrand, fondateur et directeur général de Swile, qui inclut désormais Bimpli (ex-Apetiz de Natixis), "c'est le petit coup de pouce qui devrait convaincre les récalcitrants alors que la dématérialisation a été accélérée par la crise sanitaire et par le développement du télétravail", explique-t-il.
"Ces facteurs ont fait grandir le marché et nous sommes en bonne position pour tirer parti de la dynamique de croissance (environ 10% par an)", poursuit-il.
Un marché "disrupté"
Grâce au rapprochement avec Bimpli l'année dernière, Swile compte 75.000 clients et gère 3,1 milliards d'euros de flux par an sur un marché total estimé à 8,9 milliards d'euros.
C'est aussi l'acteur innovant qui, à son arrivée en 2018, a bouleversé les habitudes en apportant une solution carte et le traitement des transactions par les réseaux Visa et Mastercard, là où les acteurs traditionnels utilisaient, pour leurs transactions dématérialisées, le réseau privé Conecs, plus coûteux pour les restaurateurs.
Ces derniers devaient payer à la fois les commissions de traitement des tickets papier (réalisée par la Centrale de règlement des titres, ou CRT, dissoute en 2022) et les commissions d'acceptation carte.
Une charge trop lourde pour certains qui, pour une part, ont décidé de ne plus accepter les titres restaurant quelle que soit leur forme ou seulement les titres papier. D'autant plus que depuis la dissolution de la CRT, les restaurateurs devaient envoyer les titres papier à chaque émetteur pour obtenir le remboursement.
La gestion en était encore alourdie. Trop cher, trop compliqué à gérer, le titre papier devait s'éteindre, il ne manquait que la décision gouvernementale.
C'est chose faite et les restaurateurs s'en félicitent, anticipant sur les économies qui devraient ainsi être réalisées.
Des restaurateurs en colère
Mais cela ne résout pas tous les problèmes. La querelle entre restaurateurs et émetteurs de titres court depuis des années, ponctuée de condamnations par l'Autorité de la concurrence, en 2001 puis en 2019.
A cette date, les quatre opérateurs historiques Edenred, Sodexo, Natixis Intertitres et Groupe UP, ainsi que la CRT ont été condamnés à 415 millions d'euros d'amende au total pour entente et pour avoir empêché l'entrée de nouveaux acteurs. Un groupement de restaurateurs mène d'ailleurs une action judiciaire pour obtenir réparation.
La ministre Olivia Grégoire, qui attend un rapport de l'Autorité de la concurrence sur le fonctionnement de ce marché, a indiqué qu'elle déciderait ensuite de plafonner ou non les commissions, estimées entre 3% et 5% du montant des transactions.
Romain Vidal, le représentant des restaurateurs au sein de la Commission nationale des titres restaurant (CNTR) attend les résultats de cette étude avec impatience et souligne, dans BRA Tendances Restauration, que "les commissions sont toujours de plus en plus élevées à tel point que nous devons négocier en direct avec les émetteurs des commissions réduites pour les membres du Groupement hôtellerie restauration (GHR)".
Un modèle économique à revoir
Ce plafonnement prévu est-il une menace pour les opérateurs historiques ?
Possible, si l'on en croit la baisse des cours de Sodexo et d'Edenred lundi après la prise de parole de la ministre. Pourtant, ils sont désormais très favorables à la transition numérique et espèrent bien faire d'importantes économies avec la suppression du papier.
Ils justifient leur taux de commission par les services qu'ils développent pour stimuler l'attractivité des titres restaurant au bénéfice des restaurateurs.
Alors que certains nouveaux entrants ont parfois opté pour des modèles économiques différents.
Comme Worklife, récemment acquis par le Crédit Agricole, qui n'impose aucune commission aux restaurateurs, mais facture ses services (multiples - le titre restaurant n'est qu'un service basique) aux entreprises. Le plafonnement des commissions, s'il était décidé, aurait un impact plus limité sur eux.
En attendant cette décision, d'autres épisodes jalonneront encore l'évolution du titre restaurant.
La Commission nationale du titre restaurant, qui doit laisser la place à une nouvelle instance, a formulé plusieurs propositions au gouvernement, comme la possibilité pour l'employeur de prendre en charge jusqu'à 75% du montant du titre restaurant, contre 60% aujourd'hui ou encore l'élargissement des bénéficiaires aux indépendants et professions libérales.
-Alexandra Oubrier, L'Agefi ed: VLV
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