Le retour des IPO pourrait animer les marchés de capitaux en 2024

Plusieurs beaux noms sur la ligne de départ.

Agefi/Dow Jones 08.01.2024
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Crédit photo: AP

Paris (Agefi-Dow Jones)--L'œil frise. Et le sourire est là. "Cela fait des années qu'on n'a pas constaté, dès décembre, un tel potentiel de nouveaux candidats à une introduction en Bourse" (IPO), souligne un banquier parisien. Pour ce responsable du marché primaire actions (ECM) d'une grande banque française, le millésime 2024 a déjà la couleur des belles promesses. Et il n'est pas le seul à le penser.

"Avec le regain d'appétit au risque de la part des investisseurs, les paramètres techniques qui devraient permettre un redémarrage serein des introductions en Bourse sont là : une volatilité basse, des valorisations mieux comprises par le marché et surtout rationalisées par rapport aux prévisions de bénéfices", détaille Jérôme Renard, responsable des marchés de capitaux Europe chez Bank of America. "Une nuance toutefois : les investisseurs seront très attentifs aux résultats prévisionnels des entreprises alors qu'on attend certains ralentissements. Toutefois, en l'état, cela ne nous parait pas de nature à constituer un frein au redémarrage des introductions en Bourse", poursuit-il.

"Plusieurs projets d'IPO sont bien ancrés pour 2024, d'où un certain optimisme sur ce terrain après une année 2023 très sélective", convient Loïc Chenevier, responsable SECM France et Benelux chez Natixis CIB.

Plusieurs beaux noms sur la ligne de départ

"Les candidats sont là, à travers l'Europe. A ce titre, les premières opérations seront importantes", poursuit Jérôme Renard chez Bank of America. Côté français, plusieurs dossiers sont déjà officiels, avec un calendrier balisé.

Dès les premières semaines de 2024, tous les investisseurs seront tournés vers Pluxee, l'activité de titres de paiement de Sodexo qui doit être scindée. Si les actionnaires du groupe de restauration collective donnent leur feu vert lors de l'assemblée générale du 30 janvier, Pluxee fera ses premiers pas boursiers le 1 février. Aucune levée de fonds ne sera associée à son entrée en Bourse, mais la place s'accorde sur la valeur d'exemple et l'effet d'entraînement pour le marché. Le succès de l'opération comparable la plus récente, à savoir la séparation de Solvay et Syensqo, où la somme des capitalisations des deux chimistes est désormais supérieure à celle du seul groupe belge, incite à l'optimisme.

Le printemps des IPO devrait aussi passer par la cotation d'Ampere, la filiale dédiée aux véhicules électriques et aux logiciels de Renault. "Ce sera pour avril ou juin", veut croire un banquier engagé sur l'opération. Le groupe au losange sait qu'il joue gros avec cette opération qui doit s'accompagner d'une levée de capital. Or, le constructeur dirigé par Luca de Meo s'est laissé "piéger" par des attentes élevées avec l'évocation initialement d'une capitalisation de l'ordre de 10 milliards d'euros pour Ampere, avant d'avancer une fourchette de 8 milliards à 10 milliards d'euros, quand la Bourse ne valorise Renault lui-même que 11,1 milliards d'euros. "Il est beaucoup trop tôt pour s'enfermer dans un niveau de valorisation pour Ampere", balaye une banque mandatée pour l'opération.

Deux autres opérations d'ampleur devraient animer le marché, à commencer par la pépite industrielle Exosens. Deux grandes banques préparent la cotation de l'ex-Photonis, "peut-être dès ce printemps", souligne l'une d'elle. Tombé dans l'escarcelle du fonds HLD en 2021, après l'opposition de Bercy à sa prise de contrôle par des capitaux américains, ce spécialiste du matériel militaire ne veut plus être réduit à sa seule expertise en la matière "alors qu'il réalise déjà plus du tiers de son activité en dehors de la défense", précise un banquier.

L'autre gros morceau de l'année 2024 concerne le pôle de santé grand public de Sanofi, qui doit être scindé dans le cadre de sa stratégie de recentrage. "Ce serait l'opération de l'année puisqu'on parle d'une valorisation de 15 à 25 milliards d'euros", estime un banquier. "D'autres concurrents, comme Johnson & Johnson ou GSK, se sont séparés avec succès par le passé de leur activité 'consumer Healthcare'. Cela a du sens pour Sanofi d'explorer cette voie", ajoute-t-il. Le cas échéant, l'opération n'interviendrait pas avant le dernier trimestre 2024. Son format -- IPO ou sscission -- reste également incertain. Le groupe dirigé par Paul Hudson devra dépasser les mauvais souvenirs de la cotation d'Euroapi qui a laissé un goût amer aux investisseurs.

Quelle place pour les licornes en 2024 ?

Alors que l'Etat n'a pas caché l'espoir de voir une dizaine de licornes tricolores se coter d'ici à 2025, il est difficile à ce stade de voir les membres de la French Tech s'inviter en Bourse dès cette nouvelle année. "Pour les sociétés de rupture technologique, la tendance constatée est celle d'une année 2023 heurtée en termes d'activité. Ce qui ouvre la voie à un meilleur exercice en 2024 qui permettra d'envisager des IPO plutôt pour 2025", convient Jonathan Banet, SECM Syndicate Manager chez Natixis CIB.

"Beaucoup de licornes ne sont tout simplement pas prêtes pour 2024, soit parce qu'elles n'ont pas encore atteint le stade de la rentabilité, soit pour des raisons de taille", approuve Thomas Feuerstein chez Société Générale. "Comme en 2023, la question de la liquidité demeurera en 2024 un facteur clé pour les opérations ECM", souligne Alexis Le Touzé, responsable ECM France pour BNP Paribas.

"En 2024, les investisseurs vont sans doute privilégier les dossiers de croissance résiliente, assez balisée. Les dossiers de croissance plus élevée mais plus spéculative ne seront sans doute considérés que dans un deuxième temps", poursuit Thomas Feuerstein.

Au-delà des IPO, les restructurations financières

Les introductions en Bourse ne seront pas les seules à animer la cote l'an prochain. "Plusieurs 'drivers' sont attendus en 2024", souligne l'expert, à commencer par les opérations de restructuration financière. Clariane, Atos, voire Alstom, sont attendus sur ce terrain. "Les entreprises auront aussi besoin de venir sur le marché 'equity' soit pour essayer de réduire leur levier, soit pour limiter l'effet de conditions de financement relativement chères", estime Jose Antonio Gagliardi, responsable de la syndication actions de Société Générale.

Un autre vecteur d'accélération concerne le retour des fusions et acquisitions l'an prochain, "sans doute sur la deuxième partie de l'année", estime un banquier. "Si le profil organique pur ralentit quelque peu, les grands corporates se poseront la question de réaliser des opérations stratégiques ou de nouveaux détourages", prévient Jérôme Renard chez Bank of America. Aujourd'hui, au sein du CAC 40, "pas moins d'une quinzaine de grandes entreprises préparent et sont capables d'initier des opérations de croissance externe de plus de 10 milliards d'euros", analyse une grande banque américaine plus que centenaire par sa présence à Paris. Presque une promesse de feu d'artifices pour 2024.

-Lionel Garnier, L'Agefi ed: VLV

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