PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'épargne salariale rapporte.
Du moins aux actionnaires des sociétés qui la gèrent. L'annonce lundi matin par Eurazeo de la signature d'un accord pour reprendre la participation d'IK Partners dans la société d'épargne salariale Eres n'est pas une surprise, mais le prix de la transaction l'est davantage.
Celui-ci serait tout proche de 600 millions d'euros, selon les sources de L'Agefi, confirmant des informations de L'Informé. Cette transaction se situe dans la fourchette haute, voire très haute, des anticipations qui circulaient dans le marché.
En cinq ans, IK Partners a fait la culbute.
A l'époque, le fonds -- en cours d'adossement à Wendel - avait acquis Eres sur une base de 230 millions d'euros. Eurazeo, qui avait été cité comme étant sur les rangs à l'époque, avait laissé le dossier s'échapper.
Avec un excédent brut d'exploitation (Ebitda) de 30 millions d'euros en 2023 selon les sources de L'Agefi, la sortie d'IK se fait sur la base d'un multiple d'Ebitda passé supérieur à 20. En 2019, le multiple appliqué pour la transaction était de 15 fois, pour un Ebitda de 15 millions d'euros.
A titre de comparaison, la moyenne des multiples à l'entrée dans le capital-investissement se fait à environ 11 fois l'Ebitda. Si la croissance du résultat du groupe peut expliquer, à elle seule, la hausse du prix, ce n'est pas la seule raison.
Une gestion portée par les lois
Créée en 2005, Eres bénéficie de la "prime au leader" dans le secteur de l'épargne salariale indépendante. Au début des années 2000, cette activité restait l'apanage des grandes banques, et aucun acteur non directement lié à ces institutions financières ne proposait d'épargne salariale.
Pour se différencier, la société a fait le pari de l'architecture ouverte, en sélectionnant des sociétés de gestion partenaires pour construire ses produits et en optant pour des réseaux de distribution de courtiers et de conseillers en gestion de patrimoine.
Les débuts sont difficiles. Pendant les cinq premières années de son existence, Eres collecte une moyenne de 100 millions d'euros par an. Le mouvement s'accélère ensuite, avec 1,5 milliard d'euros sous gestion en 2016, puis 2,3 milliards en 2018, pour atteindre 6,7 milliards d'euros aujourd'hui.
En 2019, la loi Pacte, avec la création du plan d'épargne retraite (PER), a dynamisé l'activité de la société. Pour les années qui viennent, Eres compte sur de nouvelles dispositions législatives.
"La loi de partage de la valeur qui est entrée en vigueur en décembre 2023, et qui oblige toutes les entreprises, y compris les plus petites, à adopter un dispositif de partage du profit, constitue pour nous une opportunité au moins aussi importante que la loi Pacte", explique à L'Agefi Mathieu Chauvin, le président d'Eres.
Croissance embarquée et offres annexes
Les dispositions légales favorables à l'épargne salariale ne sont pas les seuls atouts que met en avant la société. Celle-ci peut aussi compter sur la croissance organique embarquée que lui confère son modèle. Les 20.000 entreprises clientes reversent ainsi chaque année les fonds issus de leurs dispositifs d'épargne salariale, ce qui fait progresser les encours sans même qu'Eres ait à conquérir de nouveaux clients. Cette montée en puissance est par ailleurs rendue possible grâce aux importants travaux de digitalisation effectués depuis 2018 avec son actionnaire IK Partners.
La société compte aussi sur la diversification de ses activités. Avec le rachat de Bienprévoir - Primalliance en 2022, Eres s'apprête à lancer dans les prochains jours une offre de plateforme de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) pour les conseillers en gestion de patrimoine.
"Même si elle constitue une bonne source de diversification, la commercialisation de SCPI, restera une activité adjacente à notre métier principal", précise néanmoins Mathieu Chauvin.
Synergies possibles
Selon certains observateurs du secteur, l'activité d'Eres pourrait aussi être tirée par des synergies avec le groupe Premium, une autre participation d'Eurazeo. Même si, comme s'en défend Mathieu Chauvin, "d'éventuelles synergies avec le groupe Premium n'ont pas été identifiées comme un levier de croissance. Notre plan de développement, qui vise un doublement de nos actifs d'ici à cinq ans, repose uniquement sur nous".
De telles synergies pourraient cependant "expliquer en partie la valorisation élevée de l'opération avec Eurazeo", assure un professionnel du 'private equity' qui connaît le dossier. Il y a tout juste un an, la société de capital-investissement avait voulu céder Premium.
Mais, dans un marché du private equity atone, aucun acheteur n'avait été trouvé. Blackstone était néanmoins entré au capital de la société, sur la base d'une valorisation de plus d'un milliard d'euros correspondant à un multiple, là aussi élevé, de 15 fois son Ebitda.
Eurazeo dispose donc de deux participations qui pourraient s'aider mutuellement. Premium pourrait profiter de sa force de frappe pour distribuer les produits d'Eres.
Le nouveau directeur de Premium, Nicolas Schimel, a bien des pistes de croissance en France et à l'international pour son groupe, mais l'ajout d'une nouvelle offre constituerait un plus.
Premium et Eres pourraient ainsi dynamiser leurs revenus et faire grimper leur valorisation tout en restant à des multiples raisonnables. La magie du private equity.
-Franck Joselin, L'Agefi ed: VLV
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