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SAN FRANCISCO (Agefi-Dow Jones)--Après son dernier tour de table, OpenAI est entrée dans le cercle des sociétés non cotées les plus valorisées du monde. Alors que la concurrence fourbit ses armes, la start-up à l'origine de ChatGPT aura fort à faire pour se montrer à la hauteur des attentes.
OpenAI a annoncé mercredi avoir levé 6,6 milliards de dollars à l'issue d'un tour de table destiné à "accélérer les progrès vers la réalisation de sa mission", et qui lui a permis d'atteindre une valorisation ébouriffante de 157 milliards de dollars. Cette levée de fonds implique la société de capital-risque Thrive Capital, des actionnaires existants comme Microsoft, et de nouveaux investisseurs parmi lesquels le conglomérat japonais Softbank et le géant des puces pour l'IA Nvidia, ont confié des sources au Wall Street Journal.
A ce niveau de valorisation, OpenAI pèse plus lourd que 87% des entreprises du S&P 500. Le groupe compte ainsi parmi les entreprises non cotées les plus chères du monde, aux côtés de SpaceX, actuellement valorisée à 201 milliards de dollars, et de TikTok. Selon les données de Forge Global, OpenAI était valorisée à 29 milliards de dollars au début 2023, et à 110 milliards de dollars avant le dernier tour de table.
D'après le New York Times, qui a pu obtenir une copie de la documentation financière remise aux investisseurs par OpenAI, le pionnier de l'intelligence artificielle (IA) prévoit pour 2025 un chiffre d'affaires de 11,6 milliards de dollars, contre 3,7 milliards de dollars pour 2024. Le groupe s'attend aussi à perdre 5 milliards de dollars cette année, après prise en compte du coût d'exploitation de ses services, des salaires et d'autres dépenses. Le quotidien américain précise que cette prévision n'inclut pas le coût lié au plan de rémunération en actions des salariés.
Pari sur l'avenir
Dans une démarche inhabituelle, OpenAI n'a communiqué sa documentation financière qu'aux investisseurs disposés à investir 250 millions de dollars au minimum, a rapporté le Wall Street Journal. Un capital-risqueur a précisé qu'il s'agissait sans doute d'une forme de présélection.
"Compte tenu des montants levés/utilisés, [les dirigeants d'OpenAI] ont besoin d'importants contributeurs et ne peuvent pas vraiment se permettre d'absorber un grand nombre de petits investisseurs", explique dans un e-mail Bob Ackerman, gérant et fondateur d'AllegisCyber Capital. "Personne ne s'engagerait à verser 250 millions de dollars sans audit préalable, donc j'imagine qu'il y en a eu un".
L'agence Reuters avait indiqué en fin de semaine dernière que l'investisseur chef de file, Thrive Capital, obtiendrait une option exclusive pour investir une nouvelle enveloppe de 1 milliard de dollars dans OpenAI au cours de l'année à venir, au même niveau de valorisation, à condition que le groupe atteigne ses objectifs de chiffre d'affaires.
Investir dans OpenAI revient à investir dans l'avenir, observe Duncan Davidson, associé chez Bullpen Capital. "Je pense que pour cette catégorie d'investisseurs, cela n'est pas un problème, puisqu'il ne s'agit pas d'une opération financière mais d'un gigantesque pari sur l'avenir", souligne-t-il. "En outre, bon nombre d'entre eux (les fonds souverains) aimeraient développer des capacités d'IA dans leur région et le monétisent de cette façon".
Fuite des cerveaux
Malgré tout, OpenAI n'est pas complètement stabilisée. La start-up a connu une vague de départs ces derniers mois, dont celui de sa cofondatrice et directrice technologique Mira Murati, qui a brusquement démissionné à la fin septembre. La société compte par ailleurs se transformer en une entreprise à but lucratif, ont confié des sources au Wall Street Journal. Elle a été créée en tant qu'organisme philanthropique, avec pour mission de développer l'IA dans l'intérêt de l'humanité. Pour de nombreux observateurs de la Silicon Valley et au-delà, cette récente fuite des cerveaux - une vingtaine au cours de l'année passée - est due aux craintes que le groupe abandonne ses valeurs fondatrices ainsi que son statut non lucratif.
"Tous les signaux laissent penser [...] que ces personnes ne sont pas à l'aise avec la direction que semble prendre la société", constate David Borish, stratégiste spécialisé dans l'IA. Dans un billet de blog, OpenAI affirme pour sa part que sa mission consiste à "faire en sorte que l'intelligence artificielle générale [IAG] bénéficie à l'humanité tout entière". L'IAG fait référence à un type d'IA capable d'effectuer des tâches aussi bien, ou mieux, que l'humain.
Dans le même temps, OpenAI n'est pas toute seule dans la sphère de l'IA avec ChatGPT et les autres technologies que la start-up développe actuellement. Anthropic, Google et Meta Platforms développent eux aussi des produits et grands modèles de langage (LLM) de plus en plus compétitifs. En outre, les développeurs à travers le monde utilisent toute une variété de LLM libres pour élaborer des produits concurrents.
Les investisseurs d'OpenAI ont, semble-t-il, "vu quelque chose que nous n'avons pas vu", conclut David Borish.
OpenAI s'est fixé d'ambitieux objectifs, qu'il lui faut atteindre compte tenu des sommes colossales qu'elle continue de dépenser. Vis-à-vis de ses concurrents, la start-up est sans doute avantagée par son image de pionnière dans le domaine de l'IA générative. Pour autant, à Wall Street, tout le monde n'est pas convaincu que l'IA dégagera un retour sur investissement suffisant pour justifier la récente explosion des dépenses.
-Therese Poletti, MarketWatch
(Version française Emilie Palvadeau) ed : LBO
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