Les actions françaises connaissent déjà une année 2024 difficile. Elles doivent maintenant subir un défi de plus: une hausse de la fiscalité.
L’année 2024 aura un goût amer pour les investisseurs en actions françaises : l’indice Morningstar France ne gagne que 3,3% (dividendes inclus) contre une hausse de 11,4% pour l’indice Morningstar Developed Markets Europe et de 19% pour l’indice Morningstar Global Markets.
L’incertitude politique provoquée par la dissolution de l’Assemblée nationale cet été, l’atermoiement du Président à nommer un Premier ministre, le ralentissement du secteur du luxe, poids lourd de la cote parisienne, et dernièrement la perspective d’une hausse de la fiscalité des entreprises expliquent pourquoi la classe d’actifs sous-performe fortement les autres places boursières en Europe et encore davantage les marchés mondiaux.
Selon Oddo BHF, 440 groupes ayant un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard d'euros seront impactés en 2024 et 2025. Les sociétés réalisant des ventes comprises entre 1 et 3 milliards d'euros verront leur impôt augmenter de 20,6% en 2024 et de 10,3% en 2025.
Au-delà de ce seuil de ventes, le taux d'impôt augmentera de respectivement 41,2% et 20,6% en 2024 et 2025.
L’annonce d’un tel effort fiscal n’est pas négligeable, même si les entreprises françaises de l’indice Morningstar France ne réalisent que 16% de leur chiffre d’affaires global en France. A titre de comparaison, soixante pourcent des entreprises américaines dépendent de l’économie de leur pays. Pour l’Allemagne, ce pourcentage se monte à 28%. Pour le Japon, il est de 50%. Pour la Chine, il est de 89%.
Des bénéfices sous pression
Selon les calculs de la banque Morgan Stanley, l’impact des mesures fiscales décidées dans le cadre du budget 2025 serait de 3% sur le bénéfice estimé pour l’indice CAC 40 et de moins de 1% pour l’indice MSCI Europe. Oddo calcule un impact d'environ 5% sur les bénéfices 2024-2025 « pour une société avec une base fiscale 100% française et un taux normatif effectif de 25% », selon une étude publiée le 11 octobre.
« Depuis qu’une hausse de l’imposition des sociétés est évoquée dans la presse, l’indice CAC 40 a reculé de 3,2%, en ligne avec l’impact la première année de la proposition de hausse de la fiscalité », souligne Morgan Stanley dans une note en date du 11 octobre 2024.
L’impact serait donc limité et déjà intégré par le marché, selon la banque américaine.
Mais le budget 2025 est encore loin d’être voté et le diable se cache dans les détails.
Il est probable que certains secteurs, les plus exposés au marché français, seront parmi les plus touchés par la hausse de la fiscalité.
Cette perspective a déjà pénalisé les estimations de bénéfice par action au niveau du principal indice boursier français, le CAC 40 (graphique). Depuis le début de l’année, celui-ci a été revu en baisse de 4,3%.
Mais cette baisse a été en partie contrebalancée par la remontée du multiple de valorisation des actions françaisess, qui a progressé de 5,1% et se situe à 14,4x les bénéfices attendus au cours des 12 prochains mois pour l’indice CAC 40, selon Factset.
Au sein de l’indice Morningstar France, un certain nombre de grandes valeurs ont déjà bien souffert de l’incertitude politique et économique, que ce soit dans le secteur de la technologie (STMicroelectronics, Dassault Systèmes), du luxe (Kering), des services (Edenred, Teleperformance), de la consommation courante (L’Oréal) ou de la santé au sens large (Sartorius Stedim Biotech).
Ces baisses ont amené de nombreux titres à des niveaux de décote significatifs par rapport à l’estimation de juste valeur de Morningstar.
Parmi ces valeurs, nous nous attardons sur trois titres ayant enregistré les fortes baisses depuis le début de l'année.
STMicroelectronics STMPA
Analyst: Brian Colello, CFA
- Economic Moat: Narrow
- Fair Value Estimate: €48.00
- Price/Fair Value: 0.54
- Morningstar Rating: 5 stars
- Morningstar Uncertainty Rating: High
« STMicroelectronics est l'un de nos meilleurs choix dans le domaine des puces analogiques et mixtes. L'entreprise est bien exposée au marché de l'automobile avec une position de leader dans les semi-conducteurs à base de carbure de silicium, grâce à son partenariat solide avec Tesla et à un contenu croissant dans les VE avec d'autres constructeurs automobiles. constructeurs automobiles.
ST s'est également bien comportée dans le domaine des microcontrôleurs ces dernières années, avec un éventail étendu de clients et de marchés finaux. Nous apprécions l'exposition de ST aux vents contraires séculaires liés à l'augmentation du contenu en puces par véhicule. Nous pensons également que le marché est généralement trop préoccupé par l'offre excédentaire de semi-conducteurs SiC qui sera mise en service. Nous pensons également que le marché est généralement trop préoccupé par l'offre excédentaire de semi-conducteurs SiC qui sera mise en service dans les années à venir, ainsi que par l'expansion probable des concurrents chinois dans le domaine des semi-conducteurs. Ces deux tendances méritent d'être surveillées, mais nous pensons que ST a été trop pénalisé jusqu'à présent. »
Edenred EDEN
Analyst: Benjamin Slupecki, CFA
- Economic Moat: Wide
- Fair Value Estimate: €76.00
- Price/Fair Value: 0.44
- Morningstar Rating: 5 stars
- Morningstar Uncertainty Rating: Medium
« Nous pensons qu'Edenred dispose d'un rempart étendu grâce à l'effet de réseau. Ticket Restaurant, la principale activité d'Edenred, a été créée en 1962 et est née de la reconnaissance par le gouvernement français des titres-restaurant comme avantage social. L'objectif de cette reconnaissance était de mettre sur un pied d'égalité fiscale les petites entreprises ne disposant pas de cantines et les grandes entreprises qui fournissaient des repas à leurs employés dans des cantines réservées à cet effet.
Dans le cadre de ce système, les employeurs achètent des chèques pour leurs employés, qui peuvent ensuite les utiliser dans différents restaurants. Depuis, Edenred a été à l'avant-garde du secteur des titres-restaurant, bénéficiant de l'avantage du pionnier et établissant des positions de marché et des réseaux solides dans des régions clés telles que la France et le Brésil. Edenred n'est présent que sur les marchés où il occupe une position de numéro un ou de numéro deux ; en France, par exemple, sa part de marché est estimée à 40 %, soit plus du double de celle de Sodexo, numéro deux. »
Kering KER
Analyst: Jelena Sokolova, CFA
- Economic Moat: Narrow
- Fair Value Estimate: €448.00
- Price/Fair Value: 0.51
- Morningstar Rating: 5 stars
- Morningstar Uncertainty Rating: Medium
« Kering a publié des résultats médiocres au premier semestre, avec des ventes au deuxième trimestre en baisse de 11% à taux de change constants (une légère aggravation séquentielle par rapport au premier trimestre). Gucci a été la principale cause de la faiblesse des ventes, en baisse de 19 % à taux de change constants (baisse de 18 % au premier trimestre). Cependant, les autres marques ont également baissé, à l'exception de Bottega Veneta dont les ventes ont augmenté de 4%. Les performances se situent dans le bas de la fourchette des marques comparables précédemment publiées, dans un contexte de faiblesse du secteur.
Pour Gucci, dont le redressement est un élément clé de la thèse d'investissement, seuls 25 % environ de son assortiment étaient constitués de nouvelles collections de créateurs au cours du trimestre et celles-ci ont mieux performé que les styles reconduits, touchés par la diminution du trafic et la faible demande des consommateurs exigeants. La marge de Gucci a résisté un peu mieux que prévu, atteignant 24,7 % (notre hypothèse pour l'ensemble de l'année est de 23 %, contre 33 % en 2023), mais les marges des autres marques ont également été mises sous pression, ce qui a entraîné une baisse de 42 % du bénéfice d'exploitation. Pour le second semestre, la société prévoit une baisse de 30 % du bénéfice d'exploitation, sans amélioration des marges par rapport au premier semestre. Le lancement de nouveaux produits pour Gucci devrait être soutenu par des investissements en marketing. Toutefois, la société devient prudente en ce qui concerne les autres dépenses. »
L'auteur de l'article détient des actions de l'une ou de plusieurs des entreprises mentionnées.
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