Après une année 2024 à oublier pour les actions françaises, les investisseurs peuvent néanmoins espérer un redressement boursier en 2025, malgré l’incertitude politique qui règne dans le pays, grâce à la reprise de la croissance en zone euro et à la politique plus accommodante de la BCE, et à l’international, au regard des tensions géopolitiques et de l’élection de Donald Trump.
Les principaux faits marquants et perspectives pour les actions françaises :
- en 2025, les actions françaises pourraient gagner entre 6% et 7% si la situation politique se stabilise et que l’Europe retrouve le chemin de la croissance.
- L’année 2024 a été marquée par une sous-performance importante par rapport au marché européen de plus de 12 points de pourcentage.
- Cette sous-performance relève de facteurs sectoriels, économiques et politiques.
- L’intégralité de la baisse de l’indice français vient des révisions en baisse des estimations de bénéfice par action, reflet de la situation morose de l’économie chinoise où beaucoup de grandes entreprises françaises réalisent une part importante de leur chiffre d’affaires, comme dans le luxe (LVMH) ou la consommation courante (L’Oréal).
Au 29 novembre, l’indice Morningstar France a reculé de 3,5% (hors dividendes), soit l’une des plus mauvaises performances en Europe. Les actions européennes ont, dans leur ensemble, progressé de 9% (graphique).
Optimisme prudent pour les actions françaises en 2025
Si une stabilisation voire un rebond des valeurs du luxe pourrait jouer un rôle pour la Bourse de Paris l’année prochaine, d’autres facteurs macro-économiques et politiques devraient conduire à un changement de perception des investisseurs par rapport aux actions européennes et françaises.
Selon le consensus Factset, les analystes prévoient que les bénéfices du CAC 40 progresseront de près de 9% en 2025 et de 10% en 2026, dans un contexte de reprise économique pour l’Europe (+1,2% attendu par le consensus après +0,7% en 2024) et de poursuite de la baisse des taux de la BCE, qui soutiendrait le crédit aux ménages et aux entreprises.
Dans ce contexte, plusieurs des entreprises qui ont connu une année 2024 difficile, pourraient enregistrer un rebond de leurs profits en 2025.
Au total, Xavier Chapard de LBPAM estime que les actions françaises pourraient progresser de 6% à 7% l’an prochain.
« En 2025, après deux années de stagnation des profits des entreprises en Europe, le consensus table sur une progression des BPA de 7-8%, qui peut s’expliquer par la baisse du pétrole, et un environnement macro un peu plus favorable avec la baisse des taux et une possible hausse des revenus des ménages », estime pour sa part Catherine Garrigues.
« La baisse des taux qui alimenterait une reprise du cycle du crédit, la hausse des salaires réels et un calendrier politique, en particulier en Allemagne, qui pourrait conduire à une politique budgétaire pro-cycle sont autant de facteurs qui pourraient favoriser les actions en France et en Europe », estime pour sa part Laurent Chaudeurge de BDL Capital Management.
A ce jour, la BCE a déjà annoncé deux baisses des taux et pourrait poursuivre le mouvement, si l’inflation reste modérée et en ligne avec son objectif de 2%. Ces baisses de taux devraient aider à améliorer la distribution de crédit et soutenir ainsi la croissance économique de la zone euro.
La France échappe à une dégradation de sa note, pour l’instant
L’autre inconnue, de nature politique, est la situation budgétaire de la France. Le pays vient d’échapper à une dégradation de sa note de crédit ou de la perspective de celle-ci, mais doit démontrer qu’il est en mesure de réduire son déficit public, qui a atteint 6,1% du PIB en 2024 et doit revenir vers 5% l’an prochain, objectif jugé très ambitieux par de nombreux économistes.
Mais l’annonce d’une motion de censure contre le gouvernement Barnier pourrait rendre la situation plus compliquée pour les actions françaises au moins à court terme.
« Le principal facteur d’incertitude est la situation politique en France avec le risque d’une instabilité gouvernementale, qui pèserait sur le moral des ménages et des entreprises et conduirait à un ralentissement de la consommation et des investissements l’an prochain », note Laurent Chaudeurge.
Les raisons d’une sous-performance des actions françaises
Les raisons de la sous-performance des actions françaises sont bien connues.
« Le CAC 40 est le seul ‘gros’ indice en repli cette année, en raison d’effets sectoriels (exposition du luxe à la Chine), mais également des incertitudes politiques, notamment autour du budget de l’Etat français pour 2025 », estime Xavier Chapard, stratégiste chez LBPAM.
« La sous-performance des actions françaises et européennes a d’autres explications : une reprise en zone euro plus faible que celle prévue en début d’année ; une profitabilité des entreprises européennes inférieure à celle des entreprises américaines ; des effets sectoriels et une exposition plus grande du revenu des entreprises européennes à l’international, qui représente 70% des ventes au sein de l’indice Eurostoxx contre 30% pour l’indice S&P 500 », ajoute-t-il.
Catherine Garrigues, responsable de la gestion actions Europe Conviction chez Allianz Global Investors, abonde: « La contre-performance du CAC s’explique principalement par des effets sectoriels : les valeurs de consommation, dont le luxe, ont connu une normalisation de leur niveau de valorisation après une très forte surperformance ces dernières années, à cause de la situation compliquée de l’économie chinoise. »
« Depuis juin, la situation politique n’a rien arrangé et elle a affecté d’autres secteurs, comme les banques ou les opérateurs de concessions », ajoute la gérante.
La décomposition de la baisse des actions françaises, au niveau de l’indice CAC 40, montre que l’intégralité de cette baisse s’explique par un mouvement de révision en baisse des prévisions de résultats, avec une baisse de 5,2% des estimations de BPA, le multiple moyen de l’indice ayant été à peu près stable, à 13,8x les bénéfices attendus à 12 mois selon les données Factset.
« L’explication du mouvement de révision en baisse des estimations de résultats en Europe (mais aussi en France) tient exclusivement à la situation morose de l’économie chinoise », souligne Laurent Chaudeurge, gérant actions chez BDL Capital Management. « Si l’on retraite de l’impact des prix de l’énergie, les bénéfices étaient attendus en légère hausse », ajoute-t-il.
Vers un changement de sentiment à l’égard des actions européennes ?
« On pourrait également observer un changement de sentiment de la part des investisseurs », ajoute le gérant. « Actuellement, ces derniers ont tendance à ne voir que le verre à moitié vide et préfèrent les Etats-Unis à l’Europe. Un changement de sentiment pourrait conduire à une revalorisation des actions européennes et françaises. »
« On pourrait aussi se rendre compte qu’en 2025, la politique commerciale de Trump n’est aussi dure que craint, ce qui serait positif pour de nombreux secteurs d’activité. Et ce, d’autant que d’après nos travaux, une politique de hausse des tarifs douaniers n’aurait qu’un impact très limité sur le chiffre d’affaires des entreprises européennes. »
Dans un tel contexte, gérants et stratégistes pensent que l’on pourrait assister à une évolution du sentiment des investisseurs qui pourrait se traduire par une revalorisation des multiples des actions françaises et européennes.
A 13,8x le bénéfice attendu à 12 mois, le P/E de l’indice CAC 40 se situe dans sa moyenne historique, ce qui signifie que le marché ne preuve ni d’un excès de pessimisme ni d’optimisme à l’égard des actions françaises.
Les actions françaises sous-pondérée
« Nous sommes prudents à court terme sur les actions européennes et sous-pondérons la France dans nos allocations » avertit néanmoins Xavier Chapard, notant que cette prudence est surtout liée à la situation politique incertaine à court terme.
A moyen terme, « nous pensons qu’il faudra revenir sur les actions européennes dans le courant de l’année prochaine, dans l’éventualité où l’on n’aurait pas une guerre commerciale totale avec les Etats-Unis, grâce notamment à la poursuite des baisses de taux de la BCE qui soutiendront une reprise du crédit et à l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages européens », souligne-t-il.
Sur le plus long terme, l’Europe, et la France, devront relever des défis structurels majeurs, estime Catherine Garrigues.
« A plus long terme, le problème de l’Europe est que ses deux principales économies, l’Allemagne et la France, doivent revoir leur modèle. L’Allemagne doit trouver une solution face au déclin de son industrie avec une politique fiscale plus ambitieuse. La France doit se focaliser sur la création de richesses avant d’envisager d’augmenter ses dépenses, au risque de suivre la même trajectoire de l’Italie. »
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