L’or a atteint un nouveau record historique lundi 3 février, porté par une vague d’investissements vers les actifs refuges après la décision du président américain Donald Trump d'imposer des droits de douane commerciaux au Canada, à la Chine et au Mexique, ce qui a ajouté aux craintes d’une inflation susceptible de nuire à la croissance économique.
Le prix au comptant a atteint 2 830 dollars l’once lundi matin avant de reculer à 2 812 dollars, malgré la force du dollar, avec lequel le métal jaune a historiquement une corrélation inverse.
“C’est comme si nous étions face à une conjonction astrale réunissant différents types d’investisseurs”, explique Maurizio Mazziero, analyste financier et expert en matières premières. “Les particuliers regardent l’or avec confiance, car il a été la meilleure catégorie d’actifs en 2024 avec une performance de 27%, qui monte à 36% pour les investisseurs en euros. Dans le même temps, les gestionnaires de fonds considèrent l’allocation en or comme une assurance compte tenu des risques géopolitiques et des tarifs commerciaux, les prix des actions étant toujours au plus haut”.
Les banques centrales des pays émergents toujours avides d’or
Pendant ce temps, les banques centrales poursuivent leurs acquisitions massives : Selon les données du World Gold Council, les réserves d’or mondiales ont augmenté de 694 tonnes au cours des dix premiers mois de l’année dernière, ce qui correspond au record de 2023.
Au cours des trois premiers trimestres de l’année dernière, la banque centrale indienne a enregistré à elle seule des achats nets d’or de 77 tonnes, suivie par la banque centrale turque avec 72 tonnes, ce qui porte la part des réserves d’or dans le total des réserves de change à 34 %. Le troisième acheteur d’or en 2024 est la banque centrale polonaise avec 69 tonnes. La Chine, qui s’est imposée comme le plus grand acheteur d’or ces dernières années, se classe quatrième avec un peu moins de 30 tonnes.
“La décision des pays occidentaux de placer des sanctions sur les réserves de la banque centrale russe en 2022 a représenté un point de non-retour et suggère qu'à l’avenir, tout pays qui se trouve en fort désaccord politique avec l’Occident pourrait implicitement courir le risque de voir ses actifs confisqués”, déclare Peter Kinsella, responsable mondial de la stratégie Forex à l’Union Bancaire Privée. “En conséquence, les banques centrales du monde entier ont augmenté leurs réserves d’or et cette tendance devrait se poursuivre en 2025”.
L’enquête 2024 Central Bank Gold Reserves Survey, commandée par le World Gold Council, révèle que 69% des banques centrales interrogées s’attendent à de nouveaux achats nets de réserves d’or, bien que modérés, à l’avenir. Elles ont souligné le rôle du métal précieux en tant qu’actif stratégique pour la réduction du risque de portefeuille et la diversification des réserves de change. 83 % des banques centrales des pays industrialisés s’appuient également sur sa fonction traditionnelle de couverture de l’inflation et de valeur refuge en temps de crise. Parmi les banques centrales des marchés émergents interrogées, ce pourcentage atteint 90 %.
“En arrière-plan, il y a toujours le projet des BRICS d’initier une nouvelle monnaie arrimée à l’or à utiliser dans les échanges commerciaux à la place du dollar américain”, rappelle encore Mazziero. “Le fait que Trump ait annoncé des droits de douane de 100 % pour ceux qui l’adopteront met en évidence sa faisabilité réelle et les craintes qui l’accompagnent.”
Quand l’or atteindra-t-il les 3 000 $ ?
D’une manière générale, les investisseurs affichent un sentiment positif sur l’or pour 2025. Selon M. Kinsella de l’UBP, “il pourrait continuer à augmenter pour atteindre des niveaux de l’ordre de 2 900 à 3 000 dollars l’once”. Les analystes de JP Morgan écrivent également dans leurs perspectives annuelles qu’ils s’attendent à ce que le prix de l’or dépasse les 3 000 dollars, surtout si les politiques américaines deviennent plus perturbatrices, sous la forme de tarifs douaniers plus élevés, de tensions commerciales accrues et de risques accrus pour la croissance économique.
“Il est difficile de faire des prévisions de prix”, prévient Maurizio Mazziero, “nous naviguons en haute mer, à des niveaux jamais atteints : Je dirais qu'à l’heure actuelle, 3 000 dollars sont à portée de main, mais la hausse pourrait également se poursuivre jusqu'à 3 200 dollars l’once. Je ne pense pas que l’on puisse déterminer cela avec une bonne approximation”.
Enfin, Diego Franzin, responsable des stratégies de portefeuille chez Plenisfer Investments SGR, rappelle que “quelle que soit l'évolution des prix à court terme, l’Or continuera d'être un solide facteur de diversification, aidant à contenir la volatilité du portefeuille grâce à sa faible corrélation avec d’autres actifs et offrant une protection contre l’inflation.”
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