Les actions françaises, comme le reste des places boursières dans le monde, jouent au yo-yo, au gré des annonces du président américain Trump sur la mise en œuvre, puis la suspension partielle (LINK MOVER), de sa politique de barrières tarifaires à l’égard du reste du monde.
Elles atteignent des niveaux de valorisation décotés, qui pourraient le rester, selon l’analyse de Morningstar. Les investisseurs tentent de déterminer si le risque de récession aux États-Unis pourrait se concrétiser dans un avenir plus ou moins proche et faire baisser davantage les valorisations.
La valorisation des actions françaises redevient attrayante
Depuis le début de l’année, la baisse des indices boursiers, dont le CAC40, s’explique uniquement par la chute des multiples de valorisation, lesquels reflètent le pessimisme croissant des investisseurs quant aux perspectives de l’économie américaine et mondiale.
Le ratio cours/juste valeur des actions françaises au sein de l’indice CAC 40 suivies par les analystes de Morningstar a reculé à 0,80x le 9 avril, contre un pic de 0,97x atteint le 14 février dernier.
Cette décote de valorisation devrait être en partie résorbée après le rebond de l’indice jeudi 10 avril, mais elle indique que les investisseurs s’interrogent sur les conséquences de la politique de Trump pour l’économie mondiale.
Le risque de récession n’est pas encore dans les cours
« On est dans une situation inconfortable où il a 50% de chances qu’une récession se produise mais aussi 50% de chances que ce ne soit pas le cas » estime Michel Saugné, responsable des investisseurs de La Financière de l’Echiquier.
Pour ce spécialiste, il est probable que les marchés vont rester volatils, car même si les grands indices boursiers mondiaux ont frôlé le « bear market » (seul l’indice NASDAQ a subi une baisse de plus de 20% par rapport à son dernier plus haut), cette correction n’intégrait pas un scénario de récession.
Si un tel risque devait se matérialiser, les multiples de valorisation des indices boursiers en France et dans le reste du monde ont de grandes chances de reculer de nouveau.
« Quand on est en récession, le P/E prospectif du marché américain tombe à 15-16x », indique Michel Saugné. Selon les données de Factset, l’indice S&P 500 affiche un P/E prospectif de 19x ce jeudi 10 avril, contre 22,5x pour son plus haut de l’année atteint le 19 février dernier – un niveau très au-dessus de sa moyenne historique des 25 dernières années, qui est de 16,7x.
En France et en Europe, la situation est similaire. Les actions ont corrigé mais le risque de récession n’est pas encore intégré dans les cours, ce qui laisse craindre une deuxième phase de baisse dans les semaine et mois à venir si le scénario de récession devait se confirmer.
Au niveau du CAC 40, de fait, si le multiple boursier a corrigé depuis son plus haut de l’année atteint le 18 février dernier, passant de 16x le bénéfice attendu à 12 mois à 13,5x mercredi 9 avril, les estimations de bénéfice par action sont restées quasiment stables, selon les données de Factset.
« En Europe, les phases de récession se sont traduites en moyenne par une baisse de 25% environ des bénéfices des entreprises », souligne Gilles Gibout, responsable de la gestion actions européennes chez AXA Investment Managers. « Or, comme les multiples ont déjà baissé d’environ 10% (P/E 12 mois forward de l’indice Stoxx Europe 600 entre le 14 février et le 4 avril), sachant que l’on part d’un niveau de valorisation plus bas (14x en ligne avec la moyenne historique), on peut considérer que l’on a fait entre la moitié et les deux tiers du chemin de la baisse, si le scénario de récession devait être confirmé. »
Un net regain de volatilité pour la Bourse de Paris
Face aux craintes de récession de l’économie américaine, qui représente une part importante de l’activité d’un grand nombre de grandes entreprises cotées à la Bourse de Paris, l’indice Morningstar France devrait donc continuer de jouer au yo-yo.
L’indice cédait 6,6% depuis le début de l’année, en clôture mercredi soir, il rebondit de 5,2% ce jeudi 10 avril, après l’annonce de la suspension des mesures tarifaires pour 90 jours (hormis la Chine et hors hausse de 10% déjà mise en œuvre depuis la semaine dernière).
Au sein de l’indice CAC40, ce sont les entreprises parmi les plus exposées au marché américain qui menaient la hausse à 16h32, Publicis PUB gagnant près de 9%, Saint-Gobain SGO 8,4% AXA CS progressait de 6,6% tout comme Société Générale GLE.
Pour Michael Field, chef stratégiste actions pour l’Europe chez Morningstar « la nouvelle du retrait de Trump des droits de douane est très positive pour les marchés, beaucoup affirmant que le pire scénario est désormais écarté. Mais les conséquences de la guerre commerciale devraient persister pendant un certain temps. Les marchés ont déjà réagi positivement à la nouvelle, mais les investisseurs restent inquiets face à l’augmentation des tensions avec des droits de douane élevés pour la Chine. »
L'auteur ou les auteurs ne possèdent pas de parts dans les titres mentionnés dans cet article. En savoir plus sur les politiques éditoriales de Morningstar.