Vous êtes un véritable promoteur des pays émergents, voire un inconditionnel…
Où est-ce que l’on peut trouver des relais de croissance et des gains de productivité dans les pays développés ? Je suis en effet convaincu que les pays émergents offrent de réelles opportunités pour les investisseurs même si tous les pays émergents n’affichent pas les mêmes perspectives.
Ce sont des pays qui ont des besoins, en infrastructure et en terme de consommation, et qui sont très mal valorisés. Il est bon de rappeler que la somme des capitalisations de la Corée, de Taiwan, de Hong Kong et de la Thaïlande, est à peine égale à la capitalisation boursière des trois plus grosses entreprises du S&P 500 : General Electric, Microsoft et Exxon Mobil.
Vous vous êtes fortement renforcé sur la région Asie au cours des derniers mois, pour quelles raisons ?
Il est vrai que l’Asie représente actuellement 50% de notre portefeuille, contre 26% début 2001. Nous avons recommencé à privilégier l’Asie à l’automne parce que dans l’univers émergent il s’agit de la région qui offre les meilleures chances de profiter de la reprise économique.
Bien sûr, cette analyse est relative et il faut tenir compte du contexte : les perspectives sont globalement incertaines sur l’Amérique Latine et sur l’Europe de l’Est. Dans ce contexte, l’Asie continue à bénéficier de l’effet délocalisation, de taux d’intérêt qui sont bas et d’une situation économique favorable avec une demande intérieure soutenue.
Il s’agit d’une région qui offre une bonne diversification sectorielle. On peut espérer profiter de la reprise des valeurs technologiques, en particulier sur des marchés comme Taiwan. En Corée en revanche, nous investissons sur des valeurs technologiques mais aussi des valeurs liées à l’économie domestique, dans la banque ou les équipementiers automobiles par exemple. Enfin, dans les pays comme la Thaïlande nous investissons des entreprises bénéficiant de la demande locale.
Notre portefeuille est exposé à environ 30% aux valeurs technologiques dont la majorité sont en Asie.
Quelle est votre position sur l’Amérique Latine ?
En Amérique Latine, qui représente 28% de notre portefeuille, nous sommes surtout présents au Mexique (20%). On table avec le Mexique sur la reprise aux Etats-Unis. Nous y avons 2 grosses positions : sur une compagnie de travaux publics et un opérateur de téléphonie mobile. Nous sommes aussi investis sur le secteur bancaire ou la distribution.
Le Mexique est un pays de convergence par rapport à l’économie américaine qui bénéficie d’une bonne intégration avec son voisin du Nord tant au niveau de la production qu’en termes douaniers. On joue le Mexique comme on a pu jouer la Grèce 3 ans avant son entrée dans l’Union européenne.
En ce qui concerne le Brésil la situation est un peu différente. Nous pensons que la situation économique peut s’y améliorer par rapport à 2001, mais compte tenu de l’élection présidentielle qui aura lieu à l’automne nous sommes prudents et investissons sur des valeurs de la distribution comme Pao de Acucar ou Globex Utilidades.
Asie et Amérique Latine laisse peu de place dans votre portefeuille au reste du monde émergent…
En ce qui concerne l’Europe de l’Est, nous sommes pour l’instant presque exclusivement concentré sur la Russie depuis fin 98. En particulier sur les ressources naturelles avec Norilsk pour les mines de nickel, l’électricité, l’acier, mais aussi les télécommunications mobiles.
Depuis octobre, nous avons fait un retour sur la Turquie. C’est un marché avec des mouvements très brusques mais nous somme convaincus que le FMI et les Etats-Unis vont soutenir la Turquie.
Sur ce marché volatile, on navigue un peu à vue. Il représente 2 à 3% de notre indice de référence, le MSCI Emerging Makets, et notre exposition se situera entre 0 et 5%. Alors que nous avons une gestion long terme, la Turquie nous oblige à être opportuniste. La Turquie c’est comme du lait sur le feu, il faut savoir prendre ses bénéfices très vite.
Quelles sont vos perspectives pour le moyen terme sur ces marchés ?
Pour moi, 2 constats s’imposent. Les marchés émergents en 2001 ont fait mieux que tout autre marché. Sur 3 ans, c’est la même chose, sauf par rapport aux small caps US.
D’autre part, je ne crois pas au risque de contagion d’un pays à un autre au sein de la classe d’actifs. Les marchés émergents sont devenus un univers investissable : ils sont plus facilement regardables par la communauté des investisseurs.
Parce qu’ils sont de plus en plus transparents, mais aussi parce qu’ils présentent des niveaux de valorisation très attractifs : par rapport aux pays développés ils offrent un discount de 50% sur les PE et d’environ 45% en terme de ration prix/actifs nets.
Les marchés émergents représentent aujourd’hui 80% de la population mondiale, mais 4% seulement de la capitalisation boursière. Il est évident que ces pays connaîtront de plus en plus une phase de rattrapage.