C’est typiquement ce que l’on appelle une boutique : une petite maison gérant une poignée de fonds avec un encours total de 1,3 milliards d’euros dont le fondateur est devenu un gérant vedette, comme on en a en France avec des Didier Le Menestrel chez Financière de l’Echiquier ou Gérard Augustin-Normand chez Richelieu Fiance. Le tout avec une philosophie de gestion volontariste mais prudente.
Bref Outre-Manche on ne présente plus Charles Montanaro qui a décidé de voler de ses propres ailes au début des années 90 après s’être formé pendant plus de 10 ans chez Merrill Lynch, Dean Witter et Drexel Burnham. Depuis cette époque sa philosophie de gestion n’a pas changé : il s’intéresse aux petites et même très petites valeurs, ayant une activité solide et profitable, offrant des perspectives de croissance, avec une préférence pour celles qui sont faiblement valorisées. Mais attention le faible niveau de valorisation n’est pas le seul critère qu’il prend en compte, loin s’en faut : "certains titres sont faiblement valorisés mais comme ils ne valent rien, il faut surtout rester à l’écart." C’est cette philosophie qui est appliquée au fonds European Smaller Companies depuis sa création en 2000.
Sauf en 2003 où il a fait sensiblement moins bien que la moyenne de sa catégorie (14% pour lui contre plus de 30% pour la catégorie ) le fonds s’est régulièrement placé dans le premier quartile depuis sa création avec un fil des années une grande rigueur en matière de stratégie d’investissement : il s’intéresse aux titres capitalisant jusqu’à 3 milliards d’euros avec une prédilection pour ceux pesant moins d’un milliard. Si le fonds n’a pas de préférences sectorielles, le gérant reconnaît avoir identifié des thèmes de prédilection comme le vieillissement de la population, les loisirs, les infrastructures ou l’énergie (mais plus coté sociétés de conseil et d’ingénierie que des exploitants). Des fils conducteurs qui l’aident à s’orienter dans le gisement de 5.000 sociétés que compte au niveau européen son terrain de chasse. Il est vrai que des filtres quantitatifs (liquidité du titre, croissance annuelle du bénéfice supérieure à 6%, endettement inférieur à 80%, PER inférieur à 15, etc) réduise drastiquement l’univers réellement investissable. Au total une dizaine de critères quantitatifs ramène le terrain de chasse à quelques centaines de titres.
"Mais ce que nous regardons en premier, insiste Charles Montanaro, ce ne sont pas les chiffres: nous voulons d’abord comprendre l’activité de l’entreprise, voir comment elle se positionne sur son marché, quels sont ses avantages vis à vis des concurrents. L’analyse des ratio vient ensuite". Et puis il y a aussi la rencontre avec la direction de l’entreprise, une étape incontournable que le gérant conseille de ne pas sous-estimer. Il avoue avoir lui-même mal apprécié la capacité d’une équipe dirigeante à gérer sa croissance externe dans le cas de Worthington Nicholls, une société britannique spécialisé dans la climatisation qui s’est engagée dans une politique d’acquisition mal maîtrisée.
Avec un portefeuille comptant en moyenne 80 lignes, le fonds qui pèse actuellement un peu plus de 500 millions d’euros offre un bon niveau de diversification et devrait être en mesure d’encaisser une croissance des encours jusqu’à 1 milliard d’euros. "Au-delà, nous ferons un soft closing et nous n’accepterons plus d’argent sur ce fonds" annonce Charles Montanaro. Une promesse qui nous semble crédible dans la mesure où le gérant est véritablement maître chez lui et que le maintien d’une taille d’encours gérable est conforme à son approche de la gestion. A cela il convient d’ajouter qu’il a investi tout son patrimoine financier dans les fonds qu’il gère, à l’instar des autres gérants de la maison…