"Qu’est-ce que l’analyse de Style ? Est-ce que la Boîte de style publiée par Morningstar est basée sur les actifs ou les rendements "
Alors qu’au début des années 2000, les notions de style en matière de gestion n’étaient guère utilisées que par une poignée d’aficionados et demeuraient largement mystérieuses, voire inconnues de la grande majorité des investisseurs individuels, il est intéressant de constater que progressivement ces notions de styles, entre autre croissance (growth) et valeur (value), commencent à faire leur chemin. Pour autant, ces notions de style recouvrent différentes choses et une certaine confusion subsiste, chacun ayant sa définition du style…
Commençons par rappeler ce qu’est la Boîte de Style. Il s’agit d’une représentation synthétique des actifs d’un fonds. La Boîte de style reproduite ci-dessous indique que le fonds est globalement investi en moyennes capitalisations boursières ayant un profil croissance.
Cette Boîte de style est basée sur l’analyse des actifs détenus par le fonds : chaque action du portefeuille est identifiée par son style en termes de capitalisation (Grande, Moyenne, Petite) et de profil (Croissance, Mixte, Valeur) avant d’être positionnée sur l’espace de style. On obtient ainsi un nuage de points (représentant les actifs du fonds). On calcule ensuite le barycentre de ce nuage (identifié ci-dessous par la flèche rouge.). C’est ce point central qui synthétise le style du portefeuille.
L’identification du style d’un fonds est d’une aide précieuse pour l’investisseur qui en fonction des cycles de marché peut décider de s’exposer plus ou moins à un style donné. On se souvient que jusqu’à la fin des années 90 ce sont les actifs de type croissance qui ont caracolé en bourse. A partir de 2000, avec l’effondrement des marchés boursiers, ce sont au contraires les fonds investis en petites et moyennes capitalisations, et ayant un profil value, qui ont tiré leur épingle du jeu.
Mais cette Boîte de style ne peut être calculée que si on dispose des actifs… Lorsque l’on ne dispose pas du portefeuille d’un fonds, on peut appréhender le style à travers d’autres approches. En particulier via l’analyse de style par les rendements ("return based style analysis", par opposition à l’analyse à partir des actifs appelée en anglais "holdings-bases style analysis")
Ce modèle d’analyse à partir des rendements a été élaboré par William Sharpe (le même que celui du ratio) dans les années 80. Schématiquement, il consiste à identifier des référentiels par rapport auxquels le fonds peut se comparer ou se positionner. Les référentiels, ici des indices, sont cernés en tenant compte de leur niveau de R2 avec le fonds sur une période glissante.
La difficulté de l’exercice réside ici dans la construction du bouquet d’indices, ou référentiels, à l’aide duquel on va mesurer l’évolution de style du fonds. De la qualité de la sélection faite au niveau des indices va dépendre la qualité de l’analyse finale. Cette dernière procède par calculs de régression afin de positionner le fonds par rapport à un univers de référentiels comme on le voit dans l’exemple suivant.
Il s’agit ici du fonds Pictet Asian Eq ex Japan qui est positionné via des calculs de régression par rapport aux différents indices régionaux de la famille MSCI. On voit clairement sur cette représentation que le fonds est diagonalement opposé à l’indice MSCI Japon, ce qui est assez cohérent. Et qu’il corrèle plus ou moins fortement avec les indices MSCI Taiwan et MSCI Corée, et dans une moindre mesure avec les indices MSCI Singapore et MSIC China.
Au-delà de cette image statique, on peut pousser plus loin l’analyse et tenter une analyse du style dans le temps. Dans la série historique suivante on voit bien la progression du poids de l’indice MSCI Taiwan, représenté au rouge, au détriment de l’indice MSCI Hong Kong.
Il est intéressant de comparer cette analyse de style par les rendements avec l’analyse de style par les actifs du même fonds Pictet Asian Eq ex Japan… Dans le cadre de cette analyse, on a tout simplement pris les inventaires de portefeuilles du fonds sur plusieurs années et regardé sur quels marchés ils sont, ou ont été cotés. Le segment rouge représente les actions taïwanaises comme sur la représentation précédente
Mais ici, avec l’analyse à partir des actifs, on voit que le poids des actions taïwanaises ne présente pas beaucoup plus de 25% des actifs du fonds (contre plus de 50% pour l’indice MSCI Taïwan dans le cadre de l’analyse de style par les rendements). Autre divergence : l’analyse par les rendements identifie l’émergence au sein du fonds d’une poche taïwanaise dans le cours de l’année 2005 alors que l’analyse des actifs montre bien que le fonds comptait des actions taïwanaises, en proportion importante, dès 2004…
Economique, et relativement facile à mettre en œuvre, l’analyse par les rendements peut être d’une aide précieuse lorsque l’on ne dispose pas d’une série historique d’inventaires de portefeuille.